Il y a quelques semaines, j’ai eu le plaisir de rencontrer Moïra Sauvage, une femme pleine d’énergie, à l’œil pétillant, chaleureuse et communicative. J’arrivais, un peu intimidée, mais elle a su très vite me mettre parfaitement à l’aise.
Moïra sauvage est journaliste et écrivain, auteure de « Guerrières ! A la rencontre du sexe fort » et « Les Aventures de ce fabuleux vagin ».
Anis : Bonjour Moïra, je voulais savoir quelle est votre relation à l’écriture, à ce type particulier qu’est l’essai ?
Moïra Sauvage : J’ai toujours aimé écrire. Et j’ai cette chance, j’écris facilement. En ce moment, je trie mes papiers et j’ai retrouvé des textes, des poèmes que j’écrivais à l’adolescence. L’intérêt pour le journalisme est né de ma curiosité, et de mon envie de partager et de transmettre ce que j’avais appris.
J’avais envie avec « Guerrières » de faire connaître les choses formidables que les femmes faisaient dans le monde.
Mon plaisir, en fait, c’est de créer, je peins également, et j’ai mis au monde quatre enfants ! Un enfant ou un livre, c’est un peu pareil, on a le plaisir de regarder ce qui n’aurait pu exister sans nous puisque c’est nous qui l’avons créé. On peut écrire pour soi un journal intime, mais pour le reste, on a envie d’être publié ; on a besoin de cette reconnaissance.
Anis : On compare souvent la création à la maternité.
Moïra Sauvage : Oui, je ne sais pas si c’est vouloir laisser sa marque sur la terre mais créer c’est le plus grand bonheur.
Anis : Il semble que les femmes écrivent moins d’essais que de romans. A votre avis, à quoi cela est-il dû ?
Moïra Sauvage : Les causes sont historiques, évidemment. Les femmes étaient la plupart du temps cloîtrées chez elle. C’est à partir du XIXe siècle que les choses ont commencé à changer même s’il y avait peu de femmes qui faisaient des études. Et puis dans leur quotidien elles étaient plus amenées à parler d’elles-mêmes, à analyser leurs sentiments. C’est une question d’éducation et de culture.
Anis : Avez-vous des rituels d’écriture?
Moïra Sauvage : Non, pas vraiment, mais j’ai un endroit pour écrire, une chambre de bonne de six mètres carrés dans lequel je m’isole pour écrire.
Anis : Quelles sont les auteures qui vous ont influencée?
Moïra Sauvage : Virginia Woolf et j’ai été bouleversée à la lecture d’une canadienne, Carol Shields, dont j’ai lu les romans et qui parle de la vie quotidienne des femmes. Toutes les féministes américaines des années 70, et aussi le rapport Hite, de Shere Hite qui m’a beaucoup appris.
En France, Simone de Beauvoir bien sûr, et Elizabeth Badinter. Je préférais les américaines aux féministes françaises car elles avaient un style plus direct, et étaient plus faciles à lire.
Anis : Pensez-vous que les femmes soient moins représentées que les hommes ?
Moïra Sauvage :Je suis les actions de « LA BARBE » et à chaque fois que je tourne les pages d’un magazine, d’un journal, je compte le nombre de femmes. Dans le cinéma aussi, à peine une réalisatrice dans la sélection officielle de Cannes. Quant aux écrivaines, ce sont les journalistes littéraires qui choisissent de les mettre en avant ou pas. Mais personne ne se rend vraiment compte de cette invisibilité des femmes.
Anis : Oui elle est intériorisée depuis si longtemps, et par les femmes elles-mêmes. Mais pourquoi les femmes sont-elles moins reconnues ?
Moïra Sauvage : Il y a un a priori sur l’écriture des femmes, on les accuse souvent de sentimentalisme. Les a priori sont dans la tête des éditeurs, des journalistes, des attachés de Presse.
Anis : Y a-t-il, selon vous, une écriture féminine ?
Moïra Sauvage : Je n’aime pas ce terme car il est dévalorisé. Tout ce qui est féminin est dévalorisé. L’écrivain crée avec sa vision du monde, et les femmes ayant eu un vécu assez différent de celui des hommes , elles l’ont forcément traduit dans leurs œuvres.
Anis : Pourquoi avoir écrit « Guerrières », pourquoi ce titre ?
Moïra Sauvage : Pour moi, c’était une évidence. Depuis le début. Curieusement, je ne vois pas le mot « Guerre » de Guerrière, car bien sûr la guerre c’est l’horreur. Pour moi, c’est très politique. C’est une femme qui lutte, épanouie. Elle n’est plus soumise si elle est guerrière. Au début, c’était montrer que les femmes étaient capables d’être vraiment fortes.
Anis : Merci Moïra, j’ai vraiment été ravie de vous rencontrer.