Le château d’Ulloa -Emilia Pardo-Bazán / premier roman naturaliste en Espagne

Emilia Pardo-Bazán – Le château d’Ulloa – Viviane hamy, 1990 pour la traduction française.

vignette femme qui écritPremière publication en espagnol en 1886. Traduit de l’espagnol par Nelly Clemessy Seul roman traduit en français de cette grande dame des lettres espagnoles, « Le château d’Ulloa » fait connaître au public francophone cette contemporaine et admiratrice de Zola. Emilia Pardo-Bazán (1851-1921) dépeint une société soumise aux soubresauts révolutionnaires, dans laquelle la noblesse, brutale et archaïque, impose un système féodal qui tient sous sa coupe le petit peuple de Galice. Si elle ne rompt pas avec le catholicisme, Emilia Pardo-Bazán n’en dépeint pas moins la vénalité des membres du clergé qui, au lieu de sauver les âmes, ripaillent, boivent et chassent en compagnie du marquis d’Ulloa qui règne sur la région en maître absolu. Si l’homme est déterminé par son hérédité et son environnement, les habitants de la région de Cebre ont la sauvagerie de leurs paysages escarpés, et de leurs forêts profondes et inquiétantes. La mort rôde partout, les hommes chassent la perdrix et le lièvre, battent les femmes qui sont, avec les enfants, les premières victimes de leur brutalité de prédateur. Dans ces régions reculées, le progrès de cette fin de siècle pénètre à grand peine, et les superstitions sont encore vives. Cette société violente sonne le glas d’une noblesse ruinée, décadente, et ignorante. Entre monarchie absolue et constitutionnelle, un monde s’achève… Même si la corruption règne, et que la politique est aux mains des caciques qui extorquent les votes, assassinent et tiennent leurs électeurs grâce au chantage, de nouvelles aspirations à un monde meilleur sont portées par des partisans tenaces. Ce qui signe la fin de ce monde est l’immoralité des puissants et des seigneurs, soumis entièrement à leurs vices et leurs faiblesses et se comportant en véritables despotes. En ce qui concerne l’hérédité, le seigneur d’Ulloa a une santé de fer qui contraste fort avec celle de son nouveau chapelain, dont la faiblesse de  tempérament «lymphatico-nerveux, purement féminin, sans ardeurs ni rébellions, enclins à la tendresse, doux et pacifique » semble le condamner irrémédiablement. Il est toutefois consternant de lire sous la plume d’une femme que celle-ci est « l’être qui possède le moins de force dans son état normal mais qui en déploie le plus dans les convulsions nerveuses. « L’auteure partage-t-elle les croyances de son temps ? Ou se moque-t-elle ? Avance-t-elle, elle aussi, masquée ? Mais le dénouement orchestre un retournement prophétique et donne un visage aux nouveaux maîtres. Elle écrivait excessivement bien cette femme ! Il le fallait pour s’imposer dans ce pays et à une époque de patriarcat quasi-absolu. Son roman est brillant et il a traversé plus d’un siècle sans prendre trop de rides. Elle parvient à nous tenir en haleine, orchestre de savants retournements de situations et utilise avec brio tous les ressorts de la narration. A découvrir …

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