J’ai vu, j’ai aimé : Mémoire de fille – Annie Ernaux, Cécile Backès / Subtil dialogue entre le théâtre et la littérature

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Mémoire de fille – Annie Ernaux, Cécile Backès

Sur scène, un chœur, trois femmes, deux hommes, qui initient la narration. Ce qui va nous être joué et narré est l’événement qui a marqué les dix-huit ans, en 1958, d’Annie Ernaux, sa nuit d’amour avec un homme, dans laquelle elle s’éprend, mais devient pour les autres la « putain », la fille facile, dont on peut abuser et qu’on peut maltraiter. Le texte joué questionne dans un va-et-vient entre passé et présent de la narration cette jeune fille dont le souvenir comporte en lui-même des trous d’ombre, des partis-pris que les lettres, les photographies parviennent parfois à rectifier.

Les corps se meuvent, dansent, les images fusent sur un écran au fond de la scène. Deux comédiennes traduisent les deux états du corps, les deux âges, Annie E, l’écrivaine et Annie D, la jeune fille.

Les chorégraphies des corps, les tensions, torsions, parfois contorsions racontent l‘amour, le choc, la déchirure. Pauline Belle a la démarche de l’adolescente un peu gauche, les habits qui préservent la pudeur des jeunes filles de l’époque, col fermé (pas d’échancrure), jupe longue et cintrée. Elle est l’exception, celle dont les résultats scolaires lui offrent les premières marches de l’ascension sociale, même s’il faudra bifurquer un temps vers une formation d’institutrice, métier pour lequel elle n’est visiblement pas faite. On le lui dit. L’université sera sa renaissance, son second souffle, la jouissance intellectuelle.

Judith Henry, Annie E, ordonne par son récit la mémoire, Pauline Belle lui donne chair magnifiquement.

Jules Churin, Simon Pineau et Adeline Vesse font de leurs corps, de savants contrepoints, toujours justes, ils se déploient  avec sensualité, traduisent le désir, la quête, la conquête et le mépris, l’éloignement et l’abandon, la jouissance aussi.

Bravo !

18 réflexions sur « J’ai vu, j’ai aimé : Mémoire de fille – Annie Ernaux, Cécile Backès / Subtil dialogue entre le théâtre et la littérature »

  1. J’ai eu la chance de rencontrer Annie Ernaux, lors d’une conférence à Rouen, et d’échanger un peu avec elle…
    Voix de moineau effrayé, grand corps long orné de cheveux blonds de plumes éparses.
    Définitivement conquise, pour un tas de raisons, dont certaines sont véritablement intimes…

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  2. j’ai lu seulement « La place » d’Annie Ernaux que j’ai apprécié mais qui m’a frappée par la froideur du ton qu’elle emploie, du coup je n’ai pas tenté d’autres livres de cette auteure!
    je vais essayer de retenter l’expérience avec « Mémoire de fille »

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  3. J’ai emprunté Mémoire de fille à la bibliothèque l’autre jour après avoir lu ton premier article sur cette pièce/ce roman. Je compte le lire bientôt. J’avais lu Passion simple et La place aussi, il y a un bon moment déjà. Et aimé les deux. Mémoire de fille étant récent, je suis entre autres curieuse de voir comment l’écriture d’A.E a pu se transformer au fil du temps. Merci.

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      1. Il semble bien que je ne te répondrai pas maintenant. Trop d’eau dans ma rivière. Trop de livres sur mes tables et de mots à écrire. J’ai lu quelques pages, je l’ai déposé, les jours ont passé, et il est déjà temps de le rendre. Le vent de l’instant ne s’y prêtait pas. Si j’y reviens, je me souviendrai de te dire. En attendant, belle fin de journée à toi.

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  4. Annie Ernaux.. il faut que je lise cette écrivaine. L’alliance de la littérature et du théâtre c’est magique. Nous avons, nous aussi, un très beau théâtre ici à Lorient avec une belle programmation. Merci pour ce beau partage 🙂

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  5. Oh, je ne savais pas que ce livre était adapté en pièce de théâtre. J’ai lu ce livre et j’aimerais bien le relire, mais tant qu’à en relire un, j’aimerais bien relire « Les Années », premier livre que j’ai lu d’elle.

    Quelle chance d’avoir pu voir cette pièce en tout cas !

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