Louise de Vilmorin (1902-1969)

Louise de Vilmorin (1902-1969)

Je possédais un de ses textes depuis longtemps (Sainte-Unefois), remettant toujours au lendemain l’occasion de le lire. Je me souvenais très vaguement d’une ancienne lecture « Une lettre dans un taxi » faite dans mes jeunes années. Est-ce dans l’air du temps, en tout cas, son œuvre et sa vie suscitent un intérêt renouvelé. Pour preuve cette biographie de Geneviève Haroche-Bouzinac qui a obtenu le « Grand Prix de la Biographie Littéraire de l’Académie française » cette année.

Amie de Cocteau, d’Orson Welles, mondaine et créative aussi, Louise de Vilmorin fut une figure importante du Tout-Paris de la première moitié du XXe siècle. On a parfois du mal à se représenter cette époque qui connut deux guerres mondiales, la folie de Hitler, la publication de Mein Kampf, mais aussi de « Le Malaise dans la civilisation » signant l’importance accrue de la psychanalyse, et l’œuvre majeure d’un grand philosophe, Henri Bergson, qui se déploie avec « La pensée et le mouvant ». Du côté des femmes, Colette et Rachilde publient et sont connues.

   Si Louise de Vilmorin est aujourd’hui presque oubliée, elle est l’autrice d’une quinzaine de romans, de recueils de poèmes et d’une importante correspondance.

Son premier roman, Sainte-Unefois (1934) et les suivants, La Fin des Villavide (1937), Julietta et Madame de… (1951), adapté à l’écran par Max Ophüls  en 1953, Les Belles Amours (1954), La Lettre dans un taxi (1958), L’Heure maliciôse (1967), des poèmes aussi, révèlent une forme d’ingéniosité formelle.[1]

Elle fut une incroyable touche à tout, écrivit les dialogues de « Les amants », en 1958 , film qui fit scandale, mais aussi les premiers couplets de « Girouette » enregistrée par Colette Renard.

La légende a fait d’elle une femme élégante, capricieuse et dépensière attachée seulement à plaire dans un tourbillon de dîners, de fêtes, de voyages.

Mais cette agitation cachait peut-être une mélancolie profonde, une blessure qui ne guérissait pas, l’indifférence peut-être d’une mère qui ne l’avait pas suffisamment aimée.

« Celles qui ne veulent pas plaire ou ne craignenet pas de déplaire, elles me font peur, leur compagnie m’est dangereuse et je prends soin de les éviter ».

Martine Reid, dans sa préface de « Sainte-Unefois » ne manque pas de souligner l’inquiétude qui perce derrière l’apparente frivolité de l’écrivaine.

La vie de Louise de Vilmorin s’est éteinte à l’aube des grandes luttes féministes des années 70.

Sa liaison avec André Malraux, la fit entrer « en écriture » en 1934. Il avait su flairer «  un talent véritable, un style, un ton, une plume alerte qui n’est pas seulement capable de billets bien tournés. »[2] Elle le retrouvera à la fin de sa vie pour peu de temps car elle mourra deux ans plus tard.

Dans son poème à la lune, en 1939, alors que le monde sombrait dans une des plus grandes folies meurtrières du XXe siècle, elle écrit :

Prenant l’amour à son image,
La lune brise au fil de l’eau
Les amants pris au fil de l’âge
Et leur indique les roseaux.

Les roseaux hantés de suicide
Et le dessein de belle mort
Fixé aux profondeurs liquides
Où se perd le plongeur de sort.


[1] Dictionnaire Universel des Créatrices, Christiane BLOT-LABARRÈRE

[2] Martine Reid, préface de Sainte-Unefois, page 9

3 réflexions sur « Louise de Vilmorin (1902-1969) »

  1. Il me semble avoir lu un ou plusieurs de ses romans mais j’avoue ne plus m’en souvenir ! Femme très en vue au siècle dernier qui, c’est vrai, est complètement oubliée ! Elle correspond à une image obsolète de la femme, pour moi, même si elle était certainement plus profonde qu’elle ne le laissait paraître… Merci de la remettre en lumière

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