Joyce Carol Oates Premier amour Philippe Rey /fugues 2015 – Actes Sud 1999 -, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Sabine Porte, 105 pages.
Ce récit, présenté comme un « conte » gothique a été publié pour la première fois en 1997 par The Ontario Review.
Atmosphère macabre, noirceur, et sentiment d’horreur mais aussi conte d’avertissement vont donc caractériser ce court récit. Joyce Carol Oates est un auteur prolifique qui écrit la plupart du temps de longs romans de plusieurs centaines de pages mais aussi de nombreuses nouvelles, et des poèmes. L’écriture est sa respiration et un thème hante tous ces récits : celui de la violence de la société et des hommes sur d’autres plus faibles qu’eux, souvent des enfants. En général, les victimes deviennent des adultes résilients, fragilisés par leurs traumatismes mais éclairés aussi par une force, une intuition, une intelligence qui leur a permis de survivre. Le ressort du récit tient dans leur fragilité mise à mal par un ou des événements qui réveillent les blessures enfouies. La tension du récit s’organise autour du trauma initial et de la façon dont le personnage principal va apporter une réponse à la situation qui le fait basculer. Joyce Carol Oates sait doser tous les ingrédients psychologiques pour distiller un suspense efficace.
Le récit pourrait commencer par : « Voilà ce qui arrive si …. ». Voilà ce qui arrive si vous êtes l’enfant d’une mère frivole et faible qui ne s’occupe pas de vous, si votre cousin est un enfant pervers adulé par sa tante, si délaissée vous avez terriblement besoin d’amour.
Voilà ce qui arrive si les adultes qui sont censés vous protéger sont des adultes défaillants.
Vous ne devrez qu’au hasard, à la chance et aussi un peu à vous-même de ne pas être broyé totalement par le monstre.
Elle a onze ans, cette fois, et se retrouve un été dans la maison de sa grand-tante Esther, hautaine et méprisante, qui couve d’un amour jaloux son petit neveu Jared, vingt-cinq ans, et étudiant en Théologie. Un bois et un marais jouxtent la maison, des figures fantasmagoriques peuplent le récit d’éléments fantastiques, les humains se transforment en serpent ou en rapace, et la figure d’un Jésus martyrisé hante la bibliothèque de la maison.
La religion ici est le couvert sous lequel s’abrite l’hypocrisie des habitants de cette petite bourgade, leur faiblesse, leur lâcheté mais aussi leur cruauté. Se punir de ses crimes pour mieux les perpétrer, briser son corps et ses élans mène à la perversité et à la déviance. La haine du corps et de l’amour charnel conduit à de terribles expiations. Et l’idée du sacrifice permet de justifier le crime.
Comment aimer au milieu de tout cela, dans tant d’obscurité ? Au bord de quelle sordide histoire d’amour Josie va-t-elle être entraînée ? Et qui pourrait la sauver sinon Joyce Carol Oates dans un monde où les contes de fée ne sont plus pour les petites filles ?
Je n’ai encore lu aucun des romans de veine gothique de cet auteur mais j’ai apprécié tous les autres, où on retrouve sensiblement les mêmes thèmes dans le monde contemporain… J’ai hâte de découvrir celui-là !
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Oui, elle brode toujours autour du même thème mais c’est toujours bien fait et intéressant.
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J’aime beaucoup cette auteure. Je viens de finir un de ses livres
https://empreintedemesmots.wordpress.com/2015/05/09/le-samedi-je-lis-19/
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Moi aussi, c’est une de mes préférées.
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Excellente critique ! Chapeau bas ! Je me sens toute petite à côté.
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Mais tu n’as pas à te sentir toute petite, du tout…
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J’ai dû mal à aller vers cette auteure, je me sens mal à l’aise… je sais que tu l’aimes beaucoup et cela se sent dans tes billets sur ses romans.
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Les histoires sont difficiles, vraiment et les violences réelles mais les personnages sont vraiment attachants, et toujours il y a beaucoup d’espoir. On est avec eux complètement !
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