Archives pour la catégorie Label Litterama

Un Texte Une Femme : « Pleins feux sur les autrices » !

« Recevez chaque jour un texte écrit par une femme, qui parle des femmes ! De la romancière à la salonnière, de la physicienne à la journaliste, redécouvrez la condition féminine dans tous ses états. »

Voici la présentation de cette merveilleuse application créée par Sarah Sauquet, et Dominique Sauquet, Fondatrice d’It’s Sauquet.com, Directrice technique des applications.

Chaque jour donc, vous pouvez découvrir un article et un extrait d’une oeuvre écrite par une autrice dont l’oeuvre est dans le domaine public.

Je me suis abonnée à cette application dont le coût est extrêmement modique et j’ai pu découvrir ou re-découvrir les textes d’Edith Wharton, Madeleine Pelletier, Aline de Valette.

Chaque texte est resitué dans l’oeuvre, l’oeuvre dans son contexte, et dans l’Histoire, accompagné d’une notice biographique. Leur particularité est d’évoquer tous les sujets qui ont un lien avec les femmes, ainsi Madeleine Brès, première femme docteure en médecine évoque l’allaitement et l’intérêt du biberon, ou Madeleine Pelletier, première femme diplômée en psychiatrie, le célibat, le manque de liberté accordé aux jeunes filles, ou les agences d’avortement.

Un vrai coup de cœur !

Christian Bach, un éditeur engagé…

Christian Bach est l’éditeur des Editions Koiné et publie de nombreux textes de femmes. Fruit du hasard, et non geste politique, attentif seulement aux qualités du texte, cet état de fait montre encore, s’il était besoin, que non seulement les auteures ont toutes les qualités nécessaires pour faire le chemin par elles-mêmes mais bat en brèche la thèse essentialiste de l’incapacité des femmes à écrire pour la scène.

Cecilia Beach a dénombré 1500 femmes dramaturges pour le XXe siècle, mais 15 % des textes joués aujourd’hui sont écrits par des femmes. D’autre part, si vous tapez « auteurs contemporains » dans un moteur de recherche, certains sites proposent dix noms de femmes pour une quarantaine de noms d’hommes.  Ce n’est pas faute d’être publiées (En tout cas par les éditions Koiné). Elles sont également moins nombreuses à être couronnées par des Prix  (mais ça, on a l’habitude !). Cependant, des hommes et des femmes aujourd’hui tentent de faire bouger les lignes. A remarquer que Lucie Depauw,et son oeuvre « Lili Heiner intra-muros » publiée par les éditions Koiné, ont fait partie des cinq finalistes de ce prix prestigieux qu’est le Prix de Littérature dramatique en 2015 (Il était présidé par Jean-René Lemoine et composé de Maïa Bouteillet, Hubert Colas, Dominique Chryssoulis, Gilles David, Michel Didym, Mohamed El Khatib, Joëlle Gayot, Marguerite Gourgue, Bernard Garnier, Claire Lasne-Darcueil et Clémence Weill.)

Au catalogue de la maison, en dehors de Lucie Depauw déjà citée plus haut, Aurore Jacob, Noémie Fargier, Marie-Pierre Cattino, Sonia Ristíc, Yan , Benoît Fourchard, Joachim Latarjet, Sarah Pèpe, Gwendoline Soublin et  prochaînement Nina Chataignier et Sabine Revillet.. J’ai posé quelques questions à cet éditeur qui m’intrigue depuis longtemps :

Litterama : Christian Bach, vous êtes profondément homme de théâtre : metteur en scène, comédien, éditeur de textes dramatiques, compositeur, directeur de compagnie  quel est l’itinéraire qui vous a conduit à cet engagement ?

Christian Bach : Je suis d’abord musicien (agrégé de musique hors classe), je suis passé par la danse baroque avant d’aborder le théâtre (baroque dans un premier temps puis contemporain) par la pratique de la scène et par la création.

L:  Votre catalogue d’éditeur fait la part belle aux auteures/autrices, est-ce un pur hasard ?

CB : Je mets le texte au centre de mes préoccupations.

L : Quelles sont les qualités déterminantes selon vous pour qu’un texte dramatique puisse être édité ?

CB : Qu’il est difficile de définir cette fameuse ligne éditoriale dont les contours sont si malaisés à baliser. Une de ces balises, pour moi primordiale, est la forme. Ce qui m’intéresse est la construction du récit. Le sujet aussi bien sûr, le théâtre est pour moi un miroir du monde et l’auteur.e fait un pas de côté pour mieux l’observer (par l’originalité de son style, de sa langue…). Le récit seul ne me suffit pas. Disons que j’aime bien tricoter des neurones quand je lis ou que j’écoute, sans doute ma formation de musicien, l’écriture polyphonique de la musique permettant d’entendre ce qui n’est pas dit. C’est aussi pour cela que je ne lis pas les didascalies.

C’est l’interaction entre ces deux balises qui me sert de guide, l’une pouvant être plus importante, ça dépend du projet: 50%/50% ou 40%/60% c’est selon, l’un dépendant de l’autre.

Liiterama : Un texte de théâtre doit-il forcément être joué ?

CB : Non, pour moi un texte de théâtre se joue et/ou se lit. Par contre tous les textes portés sur la scène ne font pas forcément de bons livres.

L : Il me semble que vous éditez de nombreux  monologues, quels sont les atouts et les inconvénients de ce type de texte ?

CB : Non, il n’y pas que des monologues. Dans le contexte économique actuel du monde du spectacle l’investissement financier est devenu très important, le monologue répond sans aucun doute à ces difficultés.  Je choisi des textes, qu’il y ait un ou plusieurs personnages, peu m’importe.

L : On redécouvre aujourd’hui des textes d’autrices du XVIe siècle jusqu’au XIXe siècle, effacés des manuels d’Histoire littéraire, l’intérêt est-il seulement historique ?

CB : Il est politique. On se sert communément maintenant du mot autrice parce qu’on a redécouvert cette façon de dénommer les femmes écrivains et on s’est alors aperçu qu’une partie de la langue française avait servi à privilégier les hommes au détriment des femmes. Les dénominations féminines des noms de métier sont éloquentes à ce sujet.

Les préoccupations actuelles et légitimes de l’égalité femmes/hommes s’appuient donc sur une réalité historique.

L : Comment voyez-vous l’éditeur du futur ?

CB : Permettez-moi de ne pas répondre à cette question en me défaussant, je n’en sais rien. Peut-être simplement qu’il sera toujours dépendant de la qualité des textes qui sont écrits. Car on écrira encore.

Les moments littéraires n°40, feuilles d’automne : Mais pourquoi lire des journaux intimes ? Vingt-six écrivains vous livrent leur journal intime.

Pierre Bergounioux, René de Ceccatty, Anne Coudreuse, Colette Fellous, Claire Dumay, Roland Jaccard, Lambert Schlechter, Charles Juliet, Belinda Cannone, Annie Ernaux, Lydia Flem, Marcelin Pleynet, Béatrice Commengé, Michel Braud, Emmanuelle Pagano, Hervé Ferrage, Jocelyne François, Dominique Noguez, Patrick Combes, Denis Grozdanovitch, Christian Garcin, Camille Laurens, Anne Serre, Régine Detambel, Fabienne Jacob, Jeanne Hyvrard.

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Les moments littéraires est une revue littéraire, dirigée par Gilbert Moreau, qui publie exclusivement des écrits relevant de l’écriture de soi, de l’intime, à travers récits autobiographiques, carnets de notes, journaux intimes, correspondances. Vingt-cinq auteurs et autrices ont été sollicités afin de livrer leur journal écrit du 23 au 29 octobre.

Que cherche-t-on dans la lecture d’un journal intime ? Chacun certainement a sa réponse. En ce qui me concerne, j’en trouve souvent la lecture fastidieuse, soit je me sens exclue à la lecture – je ne connais parfois ni les gens dont on parle, ni les événements qui ne sont pas explicités,- soit j’ai l’impression d’être dans une position de voyeurisme qui me gêne un peu. Pourtant ici rien de tel.

Les journaux publiés dans cette revue ont une caractéristique commune : ils sont bien, voire très bien écrits car les diaristes sont des écrivains qui s’expriment dans des formes brèves ou longues, échappant peu ou prou au récit linéaire, acceptant de se livrer, ou se dissimulant tant bien que mal derrière l’écran des mots. Mais tout voilement est aussi un dévoilement, et l’on devine parfois ce qui est tû.

De l’immersion dans le présent du journal, les échos de l’actualité, l’affaire Weinstein, régulièrement évoquée, des prises de position politiques, bref tout ce qui agite le quotidien d’un individu.

La majeure partie des écrivains souligne la difficulté d’écrire un journal dont on sait d’avance qu’il va être publié : « Impossible d’être vraiment sincère dans l’exercice », « ce qu’il faut préciser, clarifier pour les autres, où à l’inverse, omettre, taire, afin de les épargner, lorsqu’on les connaît d’un peu trop près », « Au fond, je n’aime pas ça. Que je le veuille ou non, je me regarde écrire ».

Pourtant l’idée de Gilbert Moreau est vraiment intéressante, car chacun se confronte à sa manière à l’exercice, et s’y révèle. La saison aussi, donne une atmosphère un peu mélancolique, une sorte de retenue parfois heureuse, parfois douloureuse à l’ensemble des récits. Le lecteur a l’impression d’aller à la rencontre de chacun dans une sorte de speed-dating littéraire, où il ne parlerait pas avec des mots mais avec son corps, son regard, sa lecture.

J’ai eu l’impression d’aller à la rencontre d’êtres dont certains sont devenus des amis, des amis de littérature, dans une sorte de communauté bienfaisante, humaine, de valeurs et d’émotions partagées. A d’autres moments j’ai conçu de l’irritation, de l’agacement, et je me suis surprise à grommeler intérieurement, à objecter. Mais la plupart du temps, j’ai aimé rencontrer chacun, même dans les rodomontades, ou une légère crânerie, voyez-donc qui je suis, mais enfin si légère ! J’ai aimé rencontrer chacun disais-je, j’ai été parfois bouleversée, dans une totale empathie, émerveillée souvent devant la délicatesse de l’écriture, les vibrations intérieures, la beauté.

Merci.