Archives pour la catégorie Prix (autres) décernés à des femmes

Les saisons de l’amour / Clémentine Beauvais – Songe à la douceur

Un jeu un peu torturé de chronique en vers libre ! 🙂

Clémentine Beauvais accomplit un tour de force littéraire et un travail formel de grande ampleur à travers ce roman en vers libre inspiré de l’œuvre d’Alexandre Pouchkine.

Elle parvient à traduire dans un récit universel, les troubles, les atermoiements et les émerveillements du sentiment amoureux à travers les personnages de Tatiana et Eugène qui se rencontrent au début de l’adolescence, se perdent lors d’un événement tragique pour se retrouver par hasard dix ans après.

Une petite merveille littéraire qui continue de faire son chemin, en livre de poche, et a permis selon certains de « secouer la littérature », de réconcilier poésie et roman, de faire sentir la musicalité et le rythme de la langue, tout en jouant avec délectation avec l’histoire littéraire et la mise en réseau du patrimoine et matrimoine littéraire.

Elle prouve aux jeunes et aux moins jeunes que la culture n’est pas ennuyeuse, que des liens se tissent entre les œuvres, de manière parfois souterraine, et qu’à travers le temps et l’espace les thèmes sont universels.

La réflexion sur la forme et son possible carcan, surgit au détour de cette lettre d’amour écrite par Tatiana, convoquant les vers de Ronsard, Charles Baudelaire, Victor Hugo, Aragon, Arthur Rimbaud, Marie-Hortense de Villedieu et quelques autres. Le personnage s’interroge à la fin de cet exercice épistolaire :

 » Parfois, s’aperçoit-elle, on veut trop bien faire,

Faire alexandrin quand on peut faire libre. Faire rime quand on peu faire résonance. Faire écrit quand on peut faire ému. »

L’autrice crée un univers romanesque et poétique dans lequel la forme ne sacrifie ni au fond, ni à l’émotion.

Toute une réflexion passionnante sur le fond et la forme, sur les contraintes d’écriture, (que l’on songe à l’OULIPO par exemple), qui selon certains stimulent la créativité et selon d’autres épuisent le fond, ce que l’on a à dire, en faveur de la forme (la façon de le dire), en contraignant la pensée à enfiler un costume parfois trop étroit.

Un pur bonheur de lecture.

Je viens d’apprendre que ce roman est adapté au théâtre par Justine Heynemann avec six jeunes comédien·nes et musicien·nes de la compagnie Soy.

Auður Ava Ólafsdóttir – Miss Islande / Le feu sous la glace

Rosa Candida de Audur Ava Olafsdottir - Grand Format ...

Auður Ava Ólafsdóttir – Miss Islande, 2018 – Zulma, 2019 pour la traduction française.

Sois belle et tais-toi ! Ou plutôt sois belle et n’écris pas ! Dans les années 60, comme partout ailleurs, être une femme et écrire est terriblement compliqué.

L’Islande, à l’époque est très isolée, deux avions transatlantiques seulement, et à peine notée sur la carte.

Lorsque vous êtes belle, on vous passe la main aux fesses, et on vous propose, comme à Hekla,  de devenir Miss Islande.

Mais Hekla est aussi le nom d’un volcan , et en elle tout bouillonne, une farouche soif d’indépendance et de liberté, mais aussi des mots qui tels des coulées de lave, échouent sur le papier.

«  Dans le monde de mes rêves l’essentiel serait : du papier, un stylo-plume et le corps d’un homme. Quand nous avons fini de faire l’amour, je me dis qu’il pourrait aussi remplir le réservoir d’encre de mon stylo. »

Seulement, faire l’amour n’est pas sans danger, sans danger d’enfants. Et là s’enroule une spirale infernale, des bébés à ne plus savoir comment vivre sa propre vie, dans laquelle est entraînée l’amie Isey, condamnée à s’échapper par les mots…

« Les hommes naissent poètes. Ils ont à peine fait leur communion qu’ils endossent le rôle qui leur est inéluctablement assigné : être des génies. Peu importe qu’ils écrivent ou non. Tandis que les femmes se contentent de devenir pubères et de faire des enfants. »

Et puis il y a Jon John, pris par la mer, mais jamais épris du corps d’Heklà. Il coud sans relâche le décousu de leurs vies… L’ami fidèle, le compagnon.

Alors peut-on vraiment écrire, vivre et aimer ?

Il faut lire Auður Ava Ólafsdóttir, et cette drôle de fin qui laisse un peu d’amertume mais annonce aussi les mondes à venir.

Prix Jean-Monnet de littérature européenne de 1998 à 2018

Les prix mettent en lumière les auteurs qui les reçoivent et encore plus les femmes.  En 13 ans, 5 auteures ont été primées. Ce n’est pas tout à fait la moitié, mais ces prix européens montrent le chemin de la parité dans la reconnaissance sociale des auteurs quel que soit leur genre. C’est une bonne nouvelle !

 

 

Prix Jean-Monnet de littérature européenne

1998 : Herbjørg Wassmo (Norvège) pour Ciel cruel – Actes Sud – traduit du norvégien par Luce Hinsch

2000 : Lídia Jorge (Portugal) pour La Couverture du soldat – Métailié – traduit du portugais par Geneviève Liebrich

2006 : Rosetta Loy ( Italie) pour Noir est l’arbre des souvenirs, bleu l’air – Albin Michel – traduit de l’italien par Françoise Brun

2008 : Danièle Sallenave (France) pour Castor de guerre – Gallimard

2011 : Sylvie Germain (France) pour Le Monde sans vous – Albin Michel

Résultat de recherche d'images pour "ciel cruel wassmo"  Résultat de recherche d'images pour "La Couverture du soldat"  Résultat de recherche d'images pour "Noir est l'arbre des souvenirs, bleu l'air"

Résultat de recherche d'images pour "Castor de guerre" Résultat de recherche d'images pour "Le Monde sans vous"

 

Le cœur battant de nos mères – Brit Bennett / Devenir mère ou pas – Découverte Festival America

Résultat de recherche d'images pour "le coeur battant de nos mères"

Le cœur battant de nos mères, The Mothers (2016), Brit Bennett, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Jean Esch, Autrement 2017 (J’ai Lu n°11977)

Le choix du titre en français est assez surprenant, car il induit des représentations qui ne sont peut-être pas tout à fait celles du roman, le titre en anglais est « Les Mères », car la question centrale du roman est bien de devenir mère ou pas. Il évoque des destins de femmes dont la dimension maternelle a été source d’interrogations, et de difficultés, voire d’impuissance. Le suicide, l’avortement, la difficulté à assumer ce rôle de mère sont au cœur du récit.

« L’avortement prenait peut-être un autre aspect quand c’était juste un sujet intéressant pour un article ou un débat autour d’un verre, quand vous n’imaginiez pas que cela pouvait vous atteindre. »

Le droit des femmes à disposer de leur corps et la question de l’avortement a été largement évoqué lors des débats du Festival America autour du Féminisme.

La narration est menée par un chœur, comme au sein de la tragédie, mais un chœur de Mères.

L’auteure avoue s’intéresser depuis longtemps au rôle des femmes au sein des Eglises, souvent cantonnées aux basses œuvres et rarement mises en avant. Elle a donc décidé de leur donner la parole, de les faire sortir de cet anonymat.

Nadia et Aubrey, les deux protagonistes de l’histoire vivent sans leur mère et se sentent trahies, abandonnées. Leur réponse va consister, par ricochet, à se mettre à distance de la maternité, par peur de devenir leur propre mère et de connaître la même fin tragique ou à conjurer le sort, devenir une mère autre. Deux alternatives que les deux personnages vont devoir choisir.

Le fait d’être membre d’une communauté religieuse va avoir une incidence sur leur vie de jeune femme en devenir. L’Eglise a été un refuge pour elles deux, elles y ont trouvé un soutien. Toutefois cette communauté fermée, et bienveillante, va devenir une force de répression, une force maléfique qui va aussi les juger.

Le chœur de Mères exprime aussi la frustration par rapport à toutes les épreuves qu’elles ont été amenées à vivre dans leur condition de femmes. Elles projettent inévitablement leurs souffrances passées sur la jeune génération.

La question de l’avortement est inévitablement traitée, et d’une façon qui m’a paru terriblement maladroite car le fœtus est toujours envisagé comme un bébé, et non comme un futur possible bébé et par conséquent les femmes assument une forme de culpabilité lorsqu’elles interrompent volontairement leur grossesse.

« Tu l’as tué ! » s’écrie un des personnages.

Le récit décrit une des manifestations contre l’avortement de l’Eglise, le Cénacle, à laquelle appartiennent Aubrey et Nadia :

« Notre manifestation n’avait duré que trois jours. (Non pas à cause de nos convictions chancelantes, mais à cause des militants qui nous avaient rejoints, le genre de Blancs complètement fous qui se retrouveraient un jour à la une des journaux pour avoir fait sauter des cliniques et poignardé des médecins. »

Quand au chœur, elles disent avoir toutes été mères dans leur cœur ou dans leur corps.

Une jolie ficelle qu’il suffirait de tirer…

Brit Bennett est diplômée de littérature à Stanford et fait partie des cinq meilleurs auteurs américains du National Book Award. Son roman a été finaliste de nombreux prix littéraires. Son dernier ouvrage , Je ne sais pas quoi faire des gentils Blancs, est paru chez Autrement. On la compare bien sûr inévitablement à Toni Morrison ( !).

Chanson douce – Leïla Slimani

Le Prix Goncourt 2016 – disponible à la médiathèque ...

Leïla Slimani – Chanson douce – Editions Gallimard 2016

A peine ouvre-t-on le livre, la première phrase vous saute au visage avec une violence inouïe. Le bébé est mort. Pourquoi, dans quelles circonstances, on ne le sait pas encore. Par petites touches, Leïla Slimani, brosse le portrait des différents protagonistes de l’action, celle qui a précipité la mort du petit.  Elle ne s’embarrasse pas de fioritures, la langue est concise, presque sèche mais efficace et aussi redoutable qu’un scalpel.

Elle analyse les rapports de domination et de soumission. La nounou, si parfaite, qui devance les moindres désirs de ses patrons, ne vit plus qu’à travers eux ; elle a aboli toute distinction entre sa vie privée et sa vie professionnelle, et chaque humiliation est ressentie comme une injure que rien ne vient amortir, parce qu’elle est ressentie à travers le prisme de la sensibilité et de l’affect.

Les patrons Myriam et Paul font partie de cette classe aisée, éduquée et cultivée qu’on appelle les « bobos » parisiens, parce qu’ils ont des valeurs dues à leur éducation, mais que leur réussite professionnelle ou leur ambition amènent à distendre de telle façon qu’ils basculent sans le vouloir dans la cruauté.

Au fond, ils ne se préoccupent pas de leur nounou, Louise, et ils ne savent rien d’elle, trop préoccupés par leur propre réussite. Ils vivent à cent à l’heure et n’ont jamais le temps. Ils naviguent à vue entre désir et culpabilité.

Myriam surtout voudrait être une mère parfaite mais souhaite aussi réussir sa vie professionnelle. Femme moderne, elle est conduite à déléguer une part importante de la vie affective de ses enfants à Louise.

Mais à force d’ignorer l’autre, cette indifférence sauvage qui consiste à ne penser qu’à soi va les conduire au drame. On assiste, impuissants, à la montée de la folie de Louise.

Un petit clin d’œil de Leïla Slimani, à propos d’une nounou maghrébine : « Elle craint que ne s’installe une complicité tacite, une familiarité entre elles deux. Que l’autre se mette à lui faire des remarques en arabe. A lui raconter sa vie et, bientôt, à lui demander mille choses au nom de leur langue et de leur religion communes. Elle s’est toujours méfiée de ce qu’elle appelle la solidarité d’immigrés. »

Céline Minard – Faillir être flingué

Résultat de recherche d'images pour "faillir être flinguée céline minard"

Céline Minard Faillir être flingué Rivages poche, 2013, Editions Payot & Rivages

Prix du Livre Inter 2014

Céline Minard revisite le mythe de l’Ouest américain et la confrontation de deux mondes celui des Blan,cs et des Indiens, à travers des personnages atypiques et attachants. Elle n’élude pas la violence des colons, ne fait pas des Indiens uniquement des martyrs, mais brosse des portraits vivants de ces parias qui quittèrent la vieille Europe pour tenter leur chance dans ce Nouveau Monde. Ce n’est pas exactement le début de la colonisation, les Indiens élèvent les chevaux, guerroient entre tribus ennemies, commercent avec les Blancs et conservent encore une grande partie de leurs terres.

Dans cette nature sauvage composée de grandes prairies, de montagnes et de forêts, tous les destins convergent vers une ville naissante. Celui d’Eau-qui-court-sur-la-plaine, une indienne dont tout le clan a été décimé, qui rencontre Brad, Jeff et le fils de Brad, Josh, celui de Bird Boisvert , ancien cow-boy reconverti dans l’élevage de mouton, Sally, tenancière de saloon qui n’a pas froid aux yeux et sait manier le colt aussi bien qu’un homme, de Zébulon, au passé mystérieux et tourmenté, qui transporte de mystérieuses sacoches, sans compter Elie Coulter, voleur de chevaux au caractère intrépide, et Gifford, ancien médecin repenti, n’aimant rien tant que contempler la nature sauvage et dessiner les oiseaux.

Ce western est une ode à la nature sauvage et aux grands espaces, une ode contemplative, dont Eau-qui-court-sur-la-plaine est l’élément le plus poétique : « Eau-qui-court-sur-la -plaine n’avait pas de parents, ils avaient brûlé. Eau-qui-court-sur-la -plaine n’avait pas de wigwam, il s’était déchiré. Pas de provisions, elles avaient roulé. Pas de pleurs, ils s’étaient asséchés. »

Elle est le symbole de la rencontre de ces mondes, elle n’a pas un seul peuple mais plusieurs, et veille, guérit, soigne les colons, pour finir par être respectée de tous.

Un livre et des destins auxquels on s’attache. Un bon livre. Beaucoup plus qu’un livre de genre.

Léonor de Récondo – Amours / Une merveille…

Afficher l'image d'origine

Léonor de Récondo – Amours Sabine Wespieser Editeur 2015 Points 4327

Grand prix RTL-LIRE / PRIX DES LIBRAIRES

Ce livre est une merveille. D’ailleurs, point n’est besoin de lire cette chronique, il vous suffit de courir à la librairie la plus proche, d’arracher sauvagement le livre des rayonnages, et là, sans même attendre, de vous plonger dans ce chant d’amours.

Car il s’agit d’amour multiples, entrelacés, d’une terrible force, de ceux qui vous arrachent à votre vie pour vous élever vers une autre, plus grande, plus pure, plus passionnée.

Léonor de Récondo est musicienne, et cela s’entend, son écriture a la beauté des musiques baroques, où les motifs se dilatent et se multiplient dans un éternel recommencement. « Les uns contre les autres s’aimer ». Un jeu de tensions et de détentes…

Et que de violence pourtant, dans cette France de début du siècle, derrière les volets des grandes maisons bourgeoises, des femmes se meurent d’ennui, dans un univers aussi serré que leurs corsets, où les pas des domestiques sont si feutrés qu’ils brisent à peine le silence. Même les conversations sont pleines du vide qui les étreint. Les hommes jettent leur gourme avec les servantes ; leurs femmes n’ont pas appris l’amour et le sexe les rebute. D’ailleurs la morale, la religion, et l’ignorance héritée de leurs mères ont tout fait pour les en dégoûter.

Leur destin est d’être mère, de reproduire et de donner des enfants à la France. Enfanter c’est servir la famille et la patrie. Et des fils, car les fils font des affaires, l’amour et la guerre.

Victoire n’a pas d’enfant alors qu’elle est mariée depuis plusieurs années. Elle n’aime pas son mari, elle s’ennuie, absorbée par la vacuité d’une vie sans saveur. Les domestiques s’affairent autour d’elle ; Victoire ne fait rien car elle n’a rien à faire. Elle évite autant qu’elle peut les étreintes de son mari. Mais qui l’en blâmerait ?

« Il ira à l’essentiel comme toujours. L’essentiel se situant entre ses cuisses, qu’elle rechigne à écarter, il lui faut toujours forcer un peu ».
Alors le corps de Victoire se tait.

Monsieur va voir ailleurs de toute façon, mais elle ne le sait pas, Monsieur connaît bien l’autre chambre sous les combles …

Née en 1976, Léonor de Récondo vit à Paris. Violoniste baroque, elle se produit régulièrement avec de nombreuses formations, dont l’Yriade, ensemble de musique qu’elle a fondé en 2004. Elle est l’auteure de quatre romans.

Fanny Chiarello – Dans son propre rôle

Fanny Chiarello – Dans son propre rôle – Editions de l’Olivier 2015 –  version de  poche Points P4283

Vignette femmes de lettresLa guerre a laissé des traces profondes dans la vie des anglais. Nous sommes en 1947, et Fanny Chiarello nous raconte l’histoire de deux femmes, éprouvées dans leur cœur et leur corps par le drame. L’une a perdu son mari et l’autre sa voix ; elle est devenue muette. Une lettre reçue par erreur et une même passion pour l’Opéra vont leur permettre de se rencontrer.

Elles sont toutes les deux dans une position de sujétion, l’une est femme de chambre dans un grand Hôtel et l’autre bonne dans la maison d’une aristocrate. Les chapitres alternent l’histoire de l’une et de l’autre et décrit leur attitude face au deuil. Marquées par un même traumatisme, le passé leur cloue les ailes et il faudra le choc d’une rencontre, sa violence et son amertume, pour qu’elles puissent continuer à cheminer et osent se lancer vers l’avenir.

J’avoue que je ne suis pas du tout entrée dans cette histoire ; je n’ai pas compris pourquoi Fenella voulait rencontrer à tout prix Jeanette, ni ce qui la séduisait chez elle. Pas plus que leur lien à l’opéra.

Tout m’a paru artificiel et invraisemblable et je n’ai pas cru une seconde à cette histoire. Toutefois la réflexion est intéressante et m’a fait penser à la mauvaise foi du garçon de café de Sartre. Si nous jouons un rôle, autant jouer sa propre partition, puisque nous ne saurons jamais qui nous sommes, étranger à nous mêmes et aux autres. L’Opéra et son rapport à la voix, au corps, au chant, est une belle métaphore.

Malgré mes réserves, toutes personnelles, ce livre a eu un réel succès car il a reçu le Prix Orange du livre 2015.

( Depuis sa création en 2009, le jury du Prix Orange du Livre, sous la présidence d’Erik Orsenna est composé pour moitié de professionnels du livre, et pour l’autre moitié de lectrices et lecteurs passionnés par la littérature.)

C’est un roman dont les avis semblent assez partagés mais qui est très bien écrit et dont la légitimité ne fait aucun doute.

Prix Médicis 2015 – Nathalie Azoulai / Titus n’aimait pas Bérénice

Le prix Médicis a été décerné jeudi 5 novembre à Nathalie Azoulai pour « Titus n’aimait pas Bérénice » (éditions POL), a annoncé le jury. « Je suis très heureuse. C’était une semaine difficile, mais qui se termine de la plus belle des manières. ». Elle a été aussi finaliste du prix Goncourt.

 

« Titus n’aimait pas Bérénice alors que Bérénice pensait qu’il l’aimait. Titus n’aimait pas Bérénice alors que tout le monde a toujours pensé qu’il n’avait pas le choix et qu’il la quittait contre sa propre volonté. Titus est empereur de Rome, Bérénice, reine de Palestine. Ils vivent et s’aiment au 1er siècle après Jésus-Christ. Racine, entre autres, raconte leur histoire au XVIIe siècle. Mais cette histoire est actuelle : Titus quitte Bérénice dans un café. Dans les jours qui suivent, Bérénice décide de revenir à la source, de lire tout Racine, de chercher à comprendre ce qu’il a été, un janséniste, un bourgeois, un courtisan. Comment un homme comme lui a-t-il pu écrire une histoire comme ça ? Entre Port-Royal et Versailles, Racine devient le partenaire d’une convalescence où affleure la seule vérité qui vaille : si Titus la quitte, c’est qu’il ne l’aime pas comme elle l’aime. Mais c’est très long et très compliqué d’en arriver à une conclusion aussi simple.  » Présentation de l’Editeur

Le prix Renaudot à « D’après une histoire vraie », de Delphine de Vigan

Prix du livre inter 2015 : Valérie Zenati – Jacob, Jacob

« Le goût du citron glacé envahit le palais de Jacob, affole la mémoire nichée dans ses papilles, il s’interroge encore, comment les autres font-ils pour dormir. Lui n’y arrive pas, malgré l’entraînement qui fait exploser sa poitrine trop pleine d’un air brûlant qu’elle ne parvient pas à réguler, déchire ses muscles raides, rétifs à la perspective de se tendre encore et se tendant quand même. »

Jacob, un jeune Juif de Constantine, est enrôlé en juin 1944 pour libérer la France. De sa guerre, les siens ignorent tout. Ces gens très modestes, pauvres et frustes, attendent avec impatience le retour de celui qui est leur fierté, un valeureux. Ils ignorent aussi que l’accélération de l’Histoire ne va pas tarder à entraîner leur propre déracinement.

Présentation de l’éditeur

La lauréate 2015 du Prix Marie-Claire du roman féminin est :

Saïdeh Pakravan avec son roman Azadi

prix closerie des lilas

livre déjà couronné par le  Prix de la Closerie des Lilas 2015.

Une consécration donc cette année pour cette auteure.

Juin est le mois des prix littéraires destinés aux écrivains femmes ou qui parlent des femmes

02 juin 2015 : Prix Marie-Claire du roman féminin.

Prix Anna de Noailles de l’Académie Française: Regroupement de fondations

Prix annuel constitué, en 1994, par regroupement des Fondations Alice-Louis Barthou, Jules Favre, Marcelle Dumas-Millier et Anaïs Ségalas. Destiné à une femme de lettres. (Dernière remise de prix (26 juin). 2014 : Comment j’ai appris à lire de Agnès Desarthe.

Le grand prix de l’héroïne Madame Figaro, créé en 2006, célèbre les nouvelles héroïnes de la littérature française et étrangère.

Présidé par Patrick Poivre d’Arvor, le jury est composé de personnalités, de journalistes de Madame Figaro et de lecteurs du magazine. Les lauréats sont choisis parmi plusieurs livres en compétition, tous sélectionnés par Eric Neuhoff dans les pages Livres du magazine.

Trois ouvrages sont couronnés : un roman français, un roman étranger (depuis 2010) et une biographie.

2014 : Lola Lafon, La Petite Communiste qui ne souriait jamais (Actes Sud)

2014 : Henri Gougaud, Le roman de Louise (Albin Michel)

2014 : Marjorie Celona, Y (Gallimard)

Dernier délivré le 18 juin 2014

  

Alice Zeniter – Sombre dimanche ou la maison qui tuait les femmes

Résultat de recherche d'images pour "sombre dimanche zeniter"

Alice Zeniter – Sombre dimanche – Editions Albin Michel 2013 – Le livre de poche 2015 Prix de Closerie des Lilas – Prix du Livre Inter 2013 – Prix des lecteurs de l’Express Sélection Prix des Lecteurs du livre de poche 2015 Quelle influence ont les lieux sur nos vies ? Nos maisons sont-elles assassines ? Faites pour abriter nos amours, élever nos enfants, nid douillet, refuge, peuvent-elles un jour se retourner contre nous ? Et pire encore, existe-t-il des maisons tue-femmes ? De quelle sorte est cette maison, coincée au milieu des rails, près de la gare de Nyugati, à Budapest ? Cette maison qui abrite les Màndy de génération en génération. Une maison peuplée d’hommes, où bizarrement les femmes disparaissent parce que c’est une tare familiale chez eux, perdre les femmes qu’ils ne peuvent ni garder, ni protéger. Ils y sont aidés par la dureté des temps, car il y a des époques et des lieux où il ne fait pas bon être une femme. Comme en 1945 , en Hongrie, lorsque des soldats soviétiques traînent dans les rues, ivres et désœuvrés… C’est peut-être la faute de Staline, ce monde épais et lourd, rempli de chuchotements et de secrets ? Imre assiste à l’effondrement de l’URSS, à l’arrivée des sex-shops, et à une liberté toute neuve sous les traits d’une jeune allemande de l’ouest. Mais « partout les gens manquent. Le monde ne sera jamais suffisamment plein. Sous trop de porches, des gens attendent, sûrs que la vie leur doit quelque chose, quelqu’un, et jamais ça n’arrive ». Kerstin sera-t-elle l’amour d’Imre, brisera-t-elle la malédiction familiale, de ces hommes enfermés en eux-mêmes comme des poissons dans un bocal ? Pour lesquels personne n’existe assez fort pour les atteindre, pour habiter leur monde, et devant qui les gens passent comme des trains. Des femmes qui restent au seuil d’eux-mêmes, comme au seuil de cette maison, des femmes obligées de se retirer ou de périr… Comment dire la beauté de ce roman ? Sa nostalgie, sa mélancolie, le miracle de sa construction qui s’égrène comme les vers d’un poème. Délicat et subtil, il dit notre solitude, la brutalité de l’histoire, notre profond désir d’aimer et notre impuissance. Née en 1986 en Basse-Normandie, Alice Zeniter est normalienne, doctorante en études théâtrales et chargée d’enseignement à Paris III. Elle a publié un premier roman à l’âge de 16 ans, « Deux moins un égal zéro » (Prix littéraire de la ville de Caen 2003) puis « Jusque dans nos bras » en 2010.

Trois femmes puissantes – Marie NDiaye

trois femmes puissantes

Trois femmes puissantes – Marie NDiaye Gallimard 2 009 Folio n° 5 199

Trois récits se succèdent dans ce livre, chaque longue nouvelle ou chaque partie correspondant à une femme. Marie NDiaye les saisit à ce moment de leur vie où elles se sont perdues ou en train de se perdre.

Ces trois femmes ont migré ou tentent de migrer afin de changer de vie. Mais elles n’y parviennent pas toujours, et lorsque enfin elles arrivent à destination, ce ne sont que déceptions et désenchantements.

Ces trois femmes pour être ébranlées n’en sont pas moins puissantes ; certaines ont réussi à s’émanciper et ont fait des études. Elle ne doutent jamais de leur valeur profonde, et ne peuvent de ce fait ressentir l’humiliation. Elles sont fières de ce qu’elles ont et de leur identité. Mais leurs relations avec les hommes sont difficiles. Un père indigne appelle la fille qu’il a toujours dédaignée en urgence, un époux se révèle un amant jaloux et faible, un autre vole sa petite amie et accepte qu’elle se prostitue.

Le récit réaliste mêle des éléments du récit fantastique, le rêve se confond parfois avec la réalité.

Et un symbole fort court à travers le récit qui est celui de l’oiseau : ainsi le père déchu dort dans un arbre, une buse menaçante attaque l’époux jaloux et tourmenté, et des corbeaux annoncent le danger et les mauvaises nouvelles. Khady Demba tente de s’envoler mais s’écrase figure contre le sol. Une mère à moitié folle voit des anges partout. Vouloir voler, s’envoler, est à la fois signe de déraison et de sagesse. L’être humain est de part en part traversé par le désir, inlassable voyageur, infatigable migrateur au risque même parfois de sa vie. Aller voir ailleurs si j’y suis, si quelque chose de moi s’y trouve que je ne connais pas encore. Au risque de me trouver comme de me perdre….

J’ai bien aimé ce roman , très fort, avec très peu de dialogues, qui demande parfois quelque effort mais qui procure beaucoup de plaisir tant la langue est belle. Car Marie NDiaye écrit très bien, ses phrases sont ciselées, ses métaphores poétiques. Je lirai d’autres livres d’elle c’est sûr.

Prix Goncourt 2014 : Lydie Salvayre

pas-pleurer

Une moisson de prix dont les femmes ne sont pas absentes cette année, avec le plus prestigieux d’entre eux et celui où il y a eu le moins de femmes jusqu’à présent :

« Deux voix entrelacées.
Celle, révoltée, de Georges Bernanos, témoin direct de la guerre civile espagnole, qui dénonce la terreur exercée par les nationaux avec la bénédiction de l’Église catholique contre les « mauvais pauvres ». Son pamphlet, Les Grands Cimetières sous la lune, fera bientôt scandale.
Celle, roborative, de Montse, mère de la narratrice et « mauvaise pauvre », qui, soixante-quinze ans après les événements, a tout gommé de sa mémoire, hormis les jours radieux de l’insurrection libertaire par laquelle s’ouvrit la guerre de 36 dans certaines régions d’Espagne, jours que l’adolescente qu’elle était vécut avec candeur et allégresse dans son village de haute Catalogne.
Deux paroles, deux visions qui résonnent étrangement avec notre présent, comme enchantées par l’art romanesque de Lydie Salvayre, entre violence et légèreté, entre brutalité et finesse, portées par une prose tantôt impeccable,tantôt joyeusement malmenée. » Source de l’éditeur Seuil