Archives pour la catégorie Autrices de théâtre

ARTCENA – Catherine Benhamou présente « Romance »

Romance Catherine Benhamou/ Grand Prix de Littérature Dramatique 2020

Romance Catherine Benhamou Koïnè Editions, 2019 – Grand Prix de Littérature Dramatique 2020

Romance - Catherine Benhamou - theatre-contemporain.net

De ce texte dense, au bord du souffle, et dans lequel il faut d’abord s’immerger, trouver sa propre respiration, partiemment, qui convoque notre propre corps dans une lecture, où chaque nerf est une corde tendue prête à vibrer, chaque pouce de chair un réceptacle à l’émotion, on ne peut ressortir indifférent.

La lecture peut être cela, le corps qui s’écrit en même temps qu’il lit. Et c’est parfois le miracle du texte dramatique, et aussi le miracle de la lecture…

Jasmine est une jeune fille de seize ans qui rêve de sortir de l’invisibilité :

« […] ici quand vous êtes une fille, tout ce que vous pouvez faire c’est vous rendre invisible pour éviter les embrouilles […] »

La narratrice s’adresse à la mère d’Imène, tentant de  comprendre ce qui a poussé Jasmine à choisir un rêve de sang et de mort, seul rêve qu’elle croit à sa portée, hors des mots et du langage. Un rêve qui ne serait qu’une onomatopée, « Boum ».  Un rêve d’un seul mot mais à multiples résonnances.

Une idée fixe, la répétition de ces mots qui s’enroulent sur eux-mêmes, en boule, comme celle qu’on a dans la gorge, ou à l’estomac, partout où ça se noue : « ça bouchait tout comme sur une photo quand on a laissé son pouce sur l’objectif ».

Il faut se méfier, toujours, de ce qui se résumerait à un seul mot ou à deux : amour par exemple ou amour toujours. Dans lesquels il n’y a pas d’aller retour possible, pas d’échappatoire.

Jasmine trouve donc l’amour sur Internet, son corps, quatre vingt kilos et le regard éteint d’un homme fiché S.

Pour lui, l’amour c’est à la vie à la mort, il la brûlerait vive plutôt que d’être quitté. Il est ce genre d’homme, la brûtalité à fleur de peau, qui ne se reconnaît jamais dans les mots de l’autre.

Depuis toujours c’est la guerre à l’intérieur de lui « et maintenant c’était une ville morte ».

Mais le pire n’aura peut-être pas lieu, grâce à Imène, qui porte toutes les voix dans la sienne comme autant de possibles.

Avant d’écrire Romance, Catherine Benhamou, a mené un atelier d’écriture en Seine-Saint-Denis, « où des jeunes filles ont exprimé leur malaise et leur peur les poussant à préférer l’invisibilité, juste pour avoir la paix. »

Son écriture se nourrit de ses rencontres, ses mots sont toujours tissés de ceux des autres et des émotions qu’ils suscitent en elle. Elle est aussi profondément politique et questionne l’actualité : pourquoi ces jeunes français.es ont-ils fait le choix de la radicalisation, pourquoi sont-ils partis en Syrie ?

Mais son écriture ne s’instrumentalise jamais, elle reste profondément poétique:

« on voyait son regard, on savait que ce regard ne vous lâcherait pas, qu’il faudrait faire avec et que ce ne serait pas facile »

C’est un peu comme avec sa plume, une fois sous le charme, elle non plus ne vous lâche pas.

oeuvre Tour Eiffel : sur Pixabay Mikka Mobiman

Catherine Benhamou – Ana ou la jeune fille intelligente

Catherine Benhamou Ana ou la jeune fille intelligente des femmes Antoinette Fouque, Paris, 2016

J’ai rencontré la belle écriture de Catherine Benhamou, lors d’un apéro littéraire organisé par une autre belle écrivante, Sarah Pèpe, à travers la lecture publique de « Nina et les managers », lecture vivante et jouée,  du texte qu’il m’avait fallu interroger et avec lequel j’étais entrée en résonance et aussi dans une forme de connivence, si tant est que l’écriture est charnelle et parle autant au corps qu’à l’esprit.

Cela faisait longtemps que je souhaitais lire et voir « Ana ou la jeune fille intelligente », j’avais manqué les dernières représentations à Paris, et je me promettais de lire ce texte car Catherine Benhamou, à l’instar de quelques rares autres,  a ce talent de faire vivre un texte dramatique sans représentation. Les mots créent assez d’espace et de liberté pour créer des images, il s’incarne avec force dans notre lecture intérieure, il s’anime et se joue, pour nous seul.e.s, spectateur ou spectatrice. Il se met en scène. A la lecture, j’entendais les voix, je jouais tous les personnages.

La puissance et la poésie de ce texte, sa mélancolie, lui donne une certaine autonomie et surtout, une grande beauté.

D’une histoire somme toute banale, une très jeune fille mariée  à un homme plus âgé qui vit en France, Catherine Benhamou, crée un conte universel. Il possède une belle oralité et le texte se dit, se murmure, se joue, à haute voix ou dans le langage intérieur. D’ailleurs n’est-il pas enracinée dans la tradition orale de ces femmes tenues hors de l’écriture, « Ana comme analphabète » ?

Et c’est un conte entendu enfant, qui nourrit l’Idée qui la poursuit.

« Il était une fois une jeune fille si intelligente qu’on l’appelait Ana l’intelligente… »

Catherine Benhamou anime depuis plusieurs années des  ateliers avec des femmes en situation d’illettrisme : « Dans ces ateliers, on s’intéresse aux mots, on joue avec eux, on les apprivoise, on les écoute ; ils nous entraînent dans des histoires. 

Les personnalités de ces femmes, leur état de dépendance, d’enfermement, mais aussi leur courage et leur volonté, ce qu’elles m’ont livrée d’elles à travers les exercices, tout cela m’a inspiré le personnage d’Ana, qui parvient à changer sa vie grâce aux mots ».

Au cours d’écriture, Ana joue avec les mots, en décortiquant mariage, elle trouve « rage », « laisser tout en plan ouvrir la porte et partir ».

Son rêve ? Voir la Tour Eiffel. Quelques cailloux en poche, un jour, elle se décide.

Les mots ont-ils le pouvoir de changer nos vies ?

Pour le savoir, il faudra lire et entendre la voix d’Ana. Une voix essentielle dans le monde d’aujourd’hui …

ANA ou la jeune fille intelligente a été créée au Théâtre de l’Opprimé à Paris le 20 mars 2013 dans une mise en scène de Ghislaine Beaudout. La pièce a été interprétée par son auteure du 14 mars au 17 avril 2016 au Théâtre Artistic Athévains et également joué en 2019.

Les flèches perdues – Marie-Pierre Cattino

Les flèches perdues – Marie-Pierre Cattino Koïné éditions, 2012

Les flèches perdues - Marie-Pierre Cattino - Koine - Grand format - Place  des Libraires

J’ai rencontré cette œuvre dans des conditions très particulières : j’étais à Marseille et nous avions longé la mer avec ma fille pendant des kilomètres, nous émerveillant de la découverte de cette ville offerte à la Méditerranée, lorsque nous sommes arrivées devant le Mémorial des Rapatriés d’Algérie par César, cette immense pâle d’hélice qui semble tutoyer le ciel, et qui symbolise la traversée de la Méditerranée qu’ont du faire les rapatriés en 1962 pour rejoindre Marseille.

Deux ou trois semaines avant, j’écoutais la chanson de Camélia Jordana, « Dans mon sang un peu de bruine, Toujours lavait mes racines »

Et gravement, à la télévision, Emmanuel Macron parlait de la colonisation comme d’un crime contre l’humanité, suscitant tollé et polémiques, plus rarement quelques approbations et hochements de tête.

La flèche tirée par l’autrice n’a pas été perdue, elle m’a atteinte en plein cœur.

Je ne suis qu’une lectrice, ni critique littéraire, ni encensoir, mes émotions créent les conditions de ce partage entre un.e auteur.e et moi.

La pièce raconte l’histoire de trois jeunes gens, dont deux jeunes hommes partis faire leur service militaire en Algérie en 1956, et l’attente, les embuscades, l’incompréhension face à cette guerre qui ne dit pas vraiment son nom : « pacification… ». « On était là pour maintenir l’ordre, pas pour foutre le bordel ! » s’indigne le frère de Claire.

Ce sont des lettres échangées à la place des cœurs entre Paul et Claire, sa marraine de guerre. C’est le silence autour des mots, les mensonges par omission qui peuplent les missives entre les deux jeunes gens. Le talent de l’autrice est de suggérer, de tisser avec nos souvenirs, avec ce que nous savons ou pas de cette guerre, de nous relier à notre histoire.

Je suis souvent allée chercher des informations au sujet de cette guerre que je connaissais si mal. Cette lecture m’a engagée sur des chemins que je n’avais pas encore vraiment pris, sur une partie de ma mémoire que j’avais occultée.

Elle prouve q’un texte dramatique peut vivre un temps sans représentation si ses mots sont vibrants, si un flux, comme une marée, traverse le texte.

Nous faisons alors notre propre mise en scène, nous peuplons ce lieu encore fantôme de créatures que nous agitons d’abord en tous sens. Mais les silences qui peuplent le récit délimitent et bientôt organisent l’espace de notre scène imaginaire, lui conférent un sens et quelques directions.

Une belle lecture, merci.

« Logiquimperturbabledufou » de Zabou Breitman /A voir absolument au théâtre du Rond-Point, Paris 8e

« J’avais commencé il y a dix ans à saisir des presque riens, des petites choses, « Le petit chien de Monsieur Bergeret ne regardait jamais le bleu du ciel incomestible. » C’est une phrase rtrouvée chez Anatole France. le spectacle se jourait sur des tapis roulants, on marchait sur place, on courait dssans avancer. Ce sont des visions, des images. L’éloge de la Folie d’Erasme, Lewis Caroll et Alice… Ce sont des moments de la folie, il y a aussi les gens de Depardon, des portraits d’humanités fragiles, enfermées, contraintes. Ce n’est pas une folie spectaculaire, mais une logique imperturbable. […]

La vérité et la folie ne se trouvent jamais là où on imagine. »

J’ai assisté aujourd’hui à cette très belle pièce, sensible, drôle, poétique et poignante.

Les comédiens sont d’une virtuosité et d’une rare justesse, entre déraison et poésie. Leur jeu est d’une grande précision; ils n’en font jamais trop mais parviennent à nous faire saisir un personnage, une atmosphère. La souffrance est parfois silencieuse, dans la désarticulation des corps, la profondeur d’un regard, l’immobilité et la stupeur, plutôt que dans l’agitation.

La mise en scène est extrêmement bien pensée, rythmée, intégrant la musique, la danse , le chant, mais le tout dans un bel équilibre.

J’ai été subjuguée …

Et c’est du 9 mai au 2 juin, à 21H, le dimanche à 15H30, relâche les lundis.

du 24 au 27 avril – PRESQU’ILLES CABARET SUR LA FÉMINISATION DE LA LANGUE FRANÇAISE du 24 avril au 27 avril 2019

Théâtre de la Reine Blanche

La Reine Blanche est un lieu de culture indépendant, une scène des arts et des sciences située au nord de Paris.

Sarah Pèpe, autrice talentueuse, passionnée et engagée propose un texte inédit sur la féminisation de la langue française.

Cabaret sur la féminisation de la langue française

Elle prend la parole et se présente en tant qu’autrice. Sitôt le mot lâché, il suscite des réactions d’une violence inattendue. Alors, elle décide de prendre sa défense, et voici qu’une sorte de tribunal surgit, qui verra des expertes plaider en sa faveur. Bientôt, d’autres figures, sorties de l’Histoire, viendront nous révéler les résistances qui ont entravé la féminisation de la langue.

 Production Compagnie M42 — Coproduction DSN — Dieppe Scène Nationale et Théâtre du château de la ville d’Eu
↘ Avec l’aide de la DRAC Normandie, de la Spedidam, de la délégation départementale à l’égalité F/​H et aux droits des femmes.
↘ Avec l’aide du Jeune Théâtre National.
↘ Avec le soutien de La Factorie, Val-de-Reuil, de l’Étincelle, théâtre de la ville de Rouen.
↘ Le spectacle a reçu le soutien du CDN Normandie Rouen dans le cadre d’une résidence artistique

TEXTE=Sarah Pèpe
MISE EN SCÈNE=Louise Dudek
AVEC=Alvie Bitemo + Clémence Laboureau + Pier Lamandé + Soizic Martin + en alternance Claudia Mongumu (24-25/04) / Léa Perret (26-27/04)
SCÉNOGRAPHIE=Heidi Folliet
CRÉATION DES MUSIQUES=Soizic Martin
CRÉATION & RÉGIE LUMIÈRE=Jérôme Bertin
DATES
Mercredi 24 avril → 19h00
Jeudi 25 avril → 19h00
Vendredi 26 avril → 19h00
Samedi 27 avril → 19h00
INFORMATIONS PRATIQUES

20€ → Tarif plein
15€ → Réduit ( séniors | résidents du 18e | Pôle emploi | étudiants | minima sociaux)
10€ → –26 ans

 

Minna Canth, engagée et enragée contre l’injustice et la misère/ 19 mars jour de l’égalité en Finlande

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Mina Canth (1844-1897) , née Ulrika Johnsson, romancière et dramaturge finlandaise.

Après trois années à l’école de filles, elle entre à l’institut de formation des maîtres de Jyväskylä, ouvert en 1863, qui lui permet d’apprendre un métier et d’être indépendante, à une époque où la poursuite des études est limitée pour les femmes. Cependant elle ne deviendra pas institutrice car elle épouse son professeur d’histoire naturelle !

Elle écrit pour les journaux, sous un pseudonyme des articles servant à promouvoir Résultat de recherche d'images pour "minna canth"l’éducation des filles, et analysant les difficultés de la condition féminine.

Elle fut veuve très jeune à trente-cinq ans et mère de sept ans (rien que ça) commence une carrière de journaliste et de femme de lettres.

Kaarlo Bergbom, le directeur du Théâtre national de Finlande en visite à Jyväskylä, lira sa première pièce Murtovarkaus (Vol avec effraction), et acceptera de la monter.

Femme courageuse, malgré les idées étroites du temps, elle défend les idées progressistes, prend le parti des plus faibles, des plus démunis et s’insurge contre la condition qui est faite aux ouvriers, aux prisonniers et aux aliénés. Féministe militante, elle dénonce dans « La femme de l’ouvrier » les lois injustes envers les femmes, la morale hypocrite de l’Eglise et l’alcoolisme. Elle suscita de vives polémiques et choqua profondément ses contemporains, notamment les conservateurs, et se fit quelques ennemis ! Nous devons beaucoup, je crois, en Occident à ces femmes courageuses.

Elle tient salon et réunit sous son toit, dans sa maison de Kuopio, un groupe de jeunes écrivains qui forma le mouvement jeune Finlande.

Son œuvre rassemble essentiellement des pièces de théâtre, très marquées par l’influence d’Ibsen (Ou est-ce Ibsen qui fut influencé par elle ?)  et a laissé deux romans de veine naturaliste, engageant des problématiques sociales.

« Sans verser dans l’excès, il est possible de qualifier la littérature dramatique finlandaise de forme d’expression féminine. »[1]

Ses trois derniers drames, où se font sentir l’influence de Tolstoï et d’Ibsen acquièrent plus de finesse psychologique :  La Famille du pasteur, puis Sylvi, écrite en suédois, et enfin, Anna Liisa, qui traite de l’infanticide et du déni de grossesse.

Le 19 mars est jour d’égalité en Finlande, ses nouvelles et ses pièces sont étudiées dans les lycées finlandais.

En français, Hanna : Et autres récits, Editions Zoé, coll. « Les classiques du monde », 19 août 2012, 414 p. (ISBN 978-2881828744)

 En voici un extrait : « Salmela était au comble du bonheur, il la serrait dans ses bras au point de presque l’écraser et il lui embrassait fougueusement les joues, les lèvres et le cou. Le chapeau d’Hanna tomba par terre et ses cheveux se répandirent sur ses épaules. Mais elle était heureuse et encore plus heureuse du bonheur de Salmela. Puis ils apprirent à se tutoyer et à s’appeler par leur prénom.“Kalle.”

Dans son for intérieur, Hanna pensa que ce n’était pas un joli prénom, mais sans doute apprendrait-elle à l’aimer peu à peu.

http://data.bnf.fr/12572765/minna_canth/

[1] Hanna HELAVUORI, dictionnaire universel des créatrices

sources wikipedia, Dictionnaire des femmes célèbrs, Laffont 1992.

Trois autrices de théâtre parlent du monde du travail, le jeudi 14 mars à la Bibliothèque Landry, dans le dixième arrondissement.

Trois autrices de théâtre vont présenter des lectures d’extraits de leur pièce. Le fil rouge en est le monde du travail et ses dérives. En effet, il semble bien fini le monde où  il pouvait être facteur d’épanouissement personnel et d’ascension sociale. La culture du résultat, les injonctions paradoxales, les dilemmes intériorisés, ainsi qu’une banalisation de la violence deviennent facteur de déshumanisation et crée un monde pathologique et paradoxal qui génère de profondes souffrances chez les salariés. L’exclusion, le chômage, l’effacement de la frontière nécessaire entre les sphères publiques et privées qui seule peut garantir l’autonomie, deviennent les conséquences inévitables d’un monde où le culte de la performance et  la quête effrénée de la rentabilité font des hommes et des femmes des moyens et non des fins.

Noémie Fargier, dans une recrue, évoque l’entrée dans le monde du travail comme une période de transition entre l’adolescence et l’âge adulte, avec la perte des illusions, et le renoncement inévitable à des idéaux qui ne résisteront pas à la brutalité du monde réel.

Catherine Benhamou (Nina et les managers), décrit de manière ironique et grinçante à travers le parcours de Nina, jeune comédienne recrutée pour animer des ateliers imposés au salariés « Sortir de la crise, manager dans la tempête », les méthodes du nouveau management pour inciter des managers à mettre une nouvelle organisation du travail en place et « dégraisser les effectifs ». Le processus de déshumanisation auquel ces méthodes conduisent par le mépris total de l’humain, et la banalisation de la violence, engendre le désespoir et la soumission des managers au culte de la rentabilité et de la performance.

Sarah Pèpe ( Les pavés de l’enfer), pointe, quant à elle, le danger d’une confusion entre la sphère privée et la sphère publique. L’organisation de l’aide ne doit pas être du ressort des initiatives privées, mais de l’action publique. Car l’enfer est pavé de bonnes intentions, tout le monde le sait, et vouloir faire le bonheur d’autrui peut conduire à toutes sortes de dérives. Toutefois, même l’aide organisée par l’Etat, finit inévitablement par culpabiliser la victime de l’exclusion sociale, et instaurer une relation de pouvoir destructrice.

De quoi l’enfer est-il pavé ? Sarah Pèpe

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Sarah Pèpe – Les pavés de l’enfer – Théâtre contemporain L’OEIL DU PRINCE – 2018

J’avais découvert Sarah Pèpe, avec « La ligne », et je parcours depuis son œuvre dramatique avec bonheur. Une œuvre engagée, qui tente de penser le monde, les rapports sociaux, de pouvoir, de domination et de soumission, mais aussi la part inaliénable de nous-mêmes, la possibilité de dire non, de se rebeller et d’inventer son destin. Même si cela consiste à préférer la rue aux hébergements d’urgence. Cette marge, même la plus réduite qui soit,  est celle de nos choix, dont on ne peut se décharger sur personne d’autre.

Une œuvre forte, aux multiples échos, qui aide à penser le monde d’aujourd’hui.

Dans une note, Sarah Pèpe expose les questions qui la taraudent et qu’elle tente de développer et de mettre en scène dans les « Pavés de l’enfer », « La bonne volonté peut-elle ou doit-elle se substituer à l’action publique ? Est-il possible de ne pas compter ce que l’on donne et s’empêcher d’attendre en retour ? Le don a-t-il tendance à devenir une relation de pouvoir ? »

Nous connaissons tous l’expression « L’enfer est pavé de bonnes intentions ». Vouloir œuvrer au nom du bien peut conduire aux pires catastrophes car le bien est une notion morale, à laquelle nous associons des valeurs qui peuvent être différentes selon chacun. Ce qui est bien pour moi ne l’est pas forcément pour quelqu’un d’autre, c’est pourquoi, à la charité, qui dépend de la bonne volonté individuelle, les sociétés ont substitué un système de répartition qui vise à assurer la solidarité entre ses membres.

Sarah Pèpe observe donc « Les pavés de l’enfer », ces bonnes intentions qui virent au cauchemar pour Olivier, sans domicile fixe, qui a sombré dans la grande précarité, hébergé par une famille qui souhaite l’accompagner dans sa réinsertion, et suivi par les conseillers de Pôle emploi qui lui proposent des dizaines de modules sans rapport avec ses qualifications. Elle appuie son propos sur l’analyse du don de Marcel Mauss, selon laquelle, il est nécessairement associé à un contre-don et s’articule autour du triangle « donner-recevoir-rendre » dans une relation de pouvoir.

Un don peut-il être véritablement gratuit ? N’en attend-on pas toujours un retour, une reconnaissance ? Comment Olivier devra-t-il rendre ce qu’on lui a donné ? Et où cela le conduira-t-il ?

A la lecture, on ressent de l’empathie pour ce personnage, qui malgré ses difficultés, se tient debout, alors que tous les autres autour de lui « vacillent ».

J’ai adoré cette lecture, et cela m’a donné très envie de voir ce texte joué. A lire ! A monter ! A jouer !

Grand Prix de littérature dramatique 2016 FINIR EN BEAUTÉ de Mohamed El Khatib/ Léonie et Noélie – Nathalie Papin

FINIR EN BEAUTÉ de Mohamed El Khatib, Solitaires intempestifs

Mohamed El Khatib n’a de cesse de mener une enquête sur la langue, à partir de la sienne, sa langue maternelle, l’arabe. il explore les trous de la langue, les mots où les mots français viennent remplacer les mots arabes, les moments où la langue arabe fait défaut, où on n’arrive plus à nommer les choses.

« J’ai réuni l’ensemble du « matériau-vie » à ma disposition entre mai 2010 et août 2013. Je n’ai pas toujours demandé les autorisations utiles. Je ne me suis pas posé la question de la limite, de la décence, de la pudeur. J’ai rassemblé ce que j’ai pu et j’ai reconstruit. Tout est allé très vite et sans préméditation. Cette fiction documentaire est restituée ici arbitrairement sous la forme d’un livre, de façon chronologique, à peu près linéaire. Il n’y a aucun suspense, à la fin on sait qu’elle meurt et que son fils est très très triste. On sait également que si c’était à refaire, j’agirais sans doute différemment. J’aurais été un fils irréprochable. Les parents se demandent toujours s’ils ont été de bons parents. Mais nous, est-ce qu’on a été de bons enfants ? On a été des enfants au niveau, nous ? On a été des enfants olympiques, nous ? »

36 ans. Auteur et metteur en scène, il s’astreint à confronter le théâtre à d’autres médiums (cinéma, installations, journaux) et à observer le produit de ces frictions.
Après des études de Lettres (Khâgne), un passage à Sciences Po, puis au CADAC (Centre d’Art dramatique de Mexico) et une thèse de sociologie sur « la critique dans la presse française » (Dir. Nicolas Pélissier), il cofonde à Orléans en 2008 le collectif Zirlib autour d’un postulat simple : l’esthétique n’est pas dépourvue de sens politique.

Source : Théatre contemporain.net

Finir en beauté (Pièce en un acte de décès)

Léonie et Noélie – Nathalie Papin, Théâtre l’école des loisirs

Deux soeurs jumelles, Léonie et Noélie, se retrouvent une nuit sur les toits d’une grande ville pour contempler à leurs pieds les feux orangés d’un incendie qu’elles ont déclenché. Léonie apprend les derniers mots d’un dictionnaire, Noélie joue au funambule. Aucune raison d’avoir peur. Elles sont fortes, elles sont deux, elles sont une. Combien de temps encore ?

Nathalie Papin publie son premier récit chez Paroles d’Aube en 1995.
Par la suite, la collection théâtre de l’école des loisirs édite l’ensemble de ses écrits depuis sa première pièce, Mange-Moi, en 1999 jusqu’à aujourd’hui.
La plupart de ses pièces ont été mises en scène.
Le Pays de Rien, sa pièce emblématique, donne lieu chaque année à de nombreuses mises en scène dont on peut citer celles de Catherine Anne, Émilie Le Roux et Betty Heurtebise.

Source : Théatre contemporain.net

 

Grand Prix de littérature dramatique 2013 – Alexandra Badea Pulvérisés

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« Pulvérisés » d’Alexandra Badea, l’Arche éditeur

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Présentation de l’éditeur

Quatre métiers, quatre villes : Shanghai, Dakar, Lyon, Bucarest. La vie en entreprise aux quatre coins du monde. Une ouvrière chinoise raconte ce qu’elle subit chaque jour à l’usine : l’humiliation quotidienne. Au même moment, un superviseur de plateau sénégalais dénonce la cruauté dont peut faire preuve son chef d’entreprise pour « faire du chiffre ». Ailleurs, un responsable assurance-qualité voit se détériorer sa relation familiale sous la pression du travail. Et à Bucarest, une ingénieur d’études et développement témoigne de sa difficulté à s’intégrer, à réussir, à gravir les échelons. Le quotidien de ces individus est rude, tranchant, parfois cruel et honteux.

Avec cette pièce à la construction étonnante, Alexandra Badea nous livre une série de portraits et décortique sous nos yeux le système qu’ont généré la mondialisation et ses rouages. Née en 1980 en Roumanie, elle est auteur, metteur en scène et scénographe.

L’auteure

« Née en 1980 Alexandra Badea est auteure, metteure en scène et réalisatrice.

Ses pièces sont publiées depuis 2009 chez L’Arche Editeur et montées en France par elle-même (Le Tarmac à Paris) mais également par d’autres metteurs en scène comme Frédéric Fisbach, Jonathan Michel, Jacques Nichet et Aurélia Guillet, Matthieu Roy, Cyril Teste, Anne Théron (Comédie de Reims, Théâtre National de Strasbourg, Théâtre de La Commune d’Aubervilliers, Comédie de Saint-Etienne, Les Francophonies en Limousin…)
Ses pièces sont traduites en allemand, en anglais, en portugais.
Elle collabore régulièrement avec le réalisateur Alexandre Plank sur des mises en voix de ses pièces pour France Culture (Pulvérisés, Europe connexion, Mondes).
Son premier roman Zone d’amour prioritaire est paru en février 2014 chez l’Arche Editeur.

Son premier scénario Solitudes est réalisé par Liova Jedlicki en décembre 2011, sélectionné au Festival de Clermont Ferrand et diffusé sur France 2. Le film a remporté le prix d’interprétation féminine, la mention de la presse et la mention du jury au Festival de Clermont Ferrand ainsi que le Prix du Jury et Prix du Jury Jeune au Festival d’Ales et le Grand Prix au Festival International de Barcelone.
Au cinéma, elle réalise deux courts métrages « 24 heures » et « Le Monde qui nous perd » (Prix du Meilleur jeune espoir masculin au Festival Jean Carmet). »

Grand Prix de littérature dramatique 2012- Claudine Galea Au bord

Au bord par Galéa

Claudine Galea, lauréate du Grand Prix de Littérature Dramatique 2011 pour Au bord (Editions Espace 34)

Présentation de l’éditeur

« Ecrit à partir de la célèbre photographie de la soldate tenant en laisse un prisonnier à Guantanamo, Au bord mêle l’intime et le politique pour interroger l’humain.

C’est un texte inclassable dont la force, évidente, hante.

« J’ai écrit Au bord en 2005.
J’en ai fait plusieurs lectures publiques, seule ou avec des musiciens.
J’en ai publié une version dans la revue Frictions, avec une présentation de Françoise Lebrun qui m’avait entendue le lire. 
Lors de chaque lecture ou performance, les réactions ont été vives. Remerciements ou oppositions, la parole appelait des paroles en retour, après un temps de silence, une forme de réanimation du cœur et des idées. Je reprends ici des mots qui ont été prononcés par des auditeurs-spectateurs.
(…)
Ce n’est pas une pièce de théâtre au sens habituel du terme, encore qu’aujourd’hui le théâtre soit « off limits » pour reprendre le titre d’une magnifique pièce d’Arthur Adamov. Mais c’est un texte pour la scène, c’est un texte à porter en public. »
[Claudine Galea, 2010] » »

L’auteur :

Depuis septembre 2015, Claudine Galea est auteure associée au TNS, sous la direction de Stanislas Nordey.

Le Théâtre de Claudine Galea est publié aux Éditions Espaces 34

Ecrire, Sarah Pèpe

Pourquoi et comment écrire pour le théâtre, voici la très belle proposition de Sarah Pèpe. D’elle je connaissais déjà « La ligne », que j’ai vu jouer. Et Rouge aiguilles dans le recueil « EmbraSer la nuit » m’a particulièrement intéressée, touchée aussi. Une autrice à suivre…

 

Pourquoi le théâtre on me demande

C’est comme ça que ça me vient je réponds

Des corps parlant dans un espace scénique

J’ai toujours eu un problème avec la contemplation du réel

Accéder à la possibilité du voir nécessite de longs débats intérieurs d’abord

Un débat avec soi pour savoir si on peut

Enfin

S’autoriser le regard sur le monde

Plus exactement

Si la parole intérieure laisse le temps la place

Pour ce regard

Alors je me suis dit

Ca commence avec le conflit

Le conflit entre soi et soi

C’est peut-être pour ça que je pense en dialogues

 

Il faut beaucoup regarder les autres aussi

Pour inventer des voix

Des personnages

Mais sitôt nés

C’est bien connu

Ils s’échappent

Ils m’échappent

Ils m’entraînent vers un ailleurs que je ne connais pas encore

 

Alors écrire

Ce serait comme

S’isoler

Pour mieux rencontrer

 

Alors écrire

Ce serait comme

Créer de la fiction

Pour mieux marcher vers le réel

 

Alors écrire

Ce serait comme

Emprunter la main

Pour mieux ouvrir les yeux

Son actualité : Sa pièce Les roses blanches  également édité par les éditions Koiné a été sélectionnée pour la 11ème édition du Prix ado du théâtre contemporain (délibération le jeudi 7 février 2019 à la Maison du Théâtre d’Amiens)…

 » Titulaire d’une licence professionnelle de théâtre et d’une maîtrise de théâtre à Paris 3, je crée ma compagnie de théâtre en 1997 dont l’objet principal estla réalisation de créations pour et par les adolescents ; plusieurs spectacles ont été ainsi représentées : Zouxor, Les ombres, Le monde et moi, dont certains achetés par la Ville de Paris pour le public scolaire et périscolaire. Je me consacre ensuite entièrement à l’enseignement du théâtre, pour tous les publics (enfants, adolescents et adultes).

Plus tard et en parallèle, je commence des projets d’écriture et de mise en scène plus personnels : Variations sur le don, Le Silence D’Emma, Méchante, La Ligne.

L’enseignement prend ensuite de nouveau toute la place ainsi que mon activité à la Ville de Paris.

Il y a un an, je décide d’arrêter l’enseignement du théâtre afin de reprendre le fil de l’écriture. »  http://www.eatheatre.fr

Marie-Pierre Cattino – « Ecrire »

Photographie  (copyright Sarah Meunier)

Marie-Pierre Cattino a accepté de livrer, pour Litterama, sa conception de l’écriture théâtrale.

ECRIRE…

« Il y a cette préférence chez moi pour un travail vecteur d’images. Mes textes sont une tentative d’approcher des personnages plongés dans un monde nouveau. Ce que je veux dire, c’est que je m’immerge dans un univers et regarde ce qui s’y passe quand les éléments bougent. Parfois, ils se défendent… Je travaille un texte jusqu’à ce qu’il ressemble à ce que je perçois de lui. Me mettre à table, pour comprendre ce qui se trame à l’intérieur, n’est pas un vain mot mais un choix, des lignes, des pistes pour obtenir ce qui ressemble à ce que je voudrais y mettre, tout en laissant une place au comédien et à l’imaginaire du lecteur. Je crois aussi que cette conscience poussée à l’extrême est usante et réjouissante et à la fois, me permet d’écrire de nouveaux textes. C’est difficile de transmettre le sens de son objet, car je ne suis ni sculpteur ni orfèvre, ne prends aucune matière brute en devenir. Je crée du sens avec du vide. J’aime tellement le vide et le plein. Ils sont faits pour cela les mots, mettre une matière à l’épreuve. Mais je le répète, pas comme un art en devenir mais plutôt comme une issue en phase avec son temps. On crée de la modernité incessante. L’écriture, serait alors mettre en bouche une langue formée de trous, d’aspérités, de silences, d’étonnement. Et le théâtre auquel j’aspire, (donner vie) use de la gomme. Il y a DES écritures, je le sais fort bien. Toutes et tous cherchons à y voir plus clair. Sans doute, est-ce pour cela qu’on écrit. Je me dis, parfois, qu’aller dans ce sens ne sera pas intéressant pour le texte, alors je m’efforce d’aller dans le sens où les personnages seraient à leur aise, c’est-à-dire, connivence entre sens et conflit. Mettre en jeu, en avançant un thème, un sujet, des personnages, ensemble, peu à peu, en faire un tout, une fin ouverte. Ce n’est pas si simple, on parle assez rarement des textes qui ont résisté, qui ne s’offrent pas facilement à l’auteur…« 

Embras(S)er la nuit/ Claire Barrabes-Marie-Pierre Cattino/ Sarah Pèpe- Sabine Revillet

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Embras(S)er la nuit/ Claire Barrabes – Marie-Pierre Cattino – Sarah Pèpe- Sabine Revillet, Editions Koiné, Bagnolet, 2018

Ce recueil est composé de quatre monologues, de quatre autrices : Claire Barrabes, Marie-Pierre Cattino, Sarah Pèpe, Sabine revillet

Ces quatre textes aident à repenser les problèmes inhérents à la place de la femme dans l’espace public. Mais ils sont avant tout des variations littéraires sur un même thème conduites avec brio. Un petit bijou !

« Louis ! Dans sa nuque ça sent le soleil et la crasse. Et quand je suis perdue je pense à ce recoin de peau et ça se pose en moi » Traversée obligatoire Claire Barrabès

Naître homme, pas celui qui vous harcèlera dans le bureau, dont le regard salace plongera dans votre décolleté, mais l’homme libéré des préjugés, des « clichés sociaux millénaires intégrés », l’homme libre de demain, aimant, dont la paternité heureuse et bienveillante, inventera le fils pour qui non c’est non, respectueux du désir ou non-désir de l’autre, dans un espace public commun, mixte, et égalitaire.

L’écriture de Claire Barrabès est cet « art plein de rencontres » qui dit la violence, la mort et l’amour dans une écriture tendue et poétique. Une merveille.

« Les requins oui à cause des requins des vagues des remous profonds car tu ne sais pas toi s’ils sont sans dents ou avec des dents acérées et pointues comme des scies. » Marie-Pierre Cattino, Parfum coquelicot

Être femme, être aux aguets, proie possible, le soir dans le métro. Ne pas savoir d’où le danger viendra, parmi ces hommes qui occupent l’espace public alors que les femmes s’y occupent, traversent, filent comme des ombres, le regard baissé, comme s’excusant d’être là.

Marie-Pierre Cattino possède des techniques d’écriture extrêmement maîtrisées : dans une écriture heurtée, sombre et précise, qui ménage comme des « ouvertures », des « pans de ciel bleu ». Un très beau texte.

 « La guerre n’aura pas lieu »  Sarah Pèpe Rouge aiguilles

Apprendre à avoir peur. Espace public = danger. Peur transmise, intériorisée, violence redoutée comme une prison dans la tête des femmes, harcèlement de rue, agressions. Quand être femme, c’est avoir peur.

Une fille seule le soir est une fille disponible, une jupe courte, des talons, une invitation, et si elle se fait agresser, elle l’aura bien cherché.

Sarah Pèpe traduit avec beaucoup de force et de subtilité ce qui se joue dans l’espace public, la transmission de la peur en héritage, la soumission à ces règles non-écrites qui font d’une femme seule, le soir, une proie possible.

« Tais-toi reste à ta place […] Mieux vaut rester à sa place à l’écart, comme ça, t’aura aucun problème. » « La nuit, c’est chaud pour nous » L’allumeuse Sabine Revillet

L’espace public est légitimement occupé par les hommes, les femmes longtemps reléguées à l’espace privé et sûr, du foyer. Espaces questionnés aujourd’hui, en renégociation, pour une reconquête de l’espace public par les femmes.

L’allumeuse de Sabine Revillet est d’un genre tout à fait spécial, aussi je ne vais pas vous vendre la mèche !

Son écriture joue finement avec toutes les métaphores de l’embrasement, comme désir et  révolte.

Ce recueil est magnifiquement écrit, intelligent et poétique.

 

Vous pensiez qu’il n’y avait aucune femme dramaturge avant le XIXe siècle ? Que nenni…

« Pour la première fois en France, une anthologie réunit une cinquantaine de pièces écrites par des femmes dramaturges entre le XVIe et le début du XIXe siècle…

Enfin, toute l’énergie rassemblée par les chercheuses et les féministes de tous les continents portent enfin leurs fruits. Les auteures effacées des Histoires littéraires et des anthologies vont enfin pouvoir reprendre leur place grâce à ce magnifique travail de recherche et d’édition. Et dans une collection prestigieuse, puisqu’il s’agit des classiques Garnier (J’y ai lu « Le discours de la méthode de Descartes ! ) Vous pensiez qu’il n’y avait aucune femme dramaturge avant le XIXe siècle ? Que nenni…

Je vous invite à lire ce très bon article sur Catherine Bernard, dont l’oeuvre fut plagiée par … Voltaire !  Et dont un lent travail de sape fit oublier jusqu’à son nom. Mais elle n’est pas la seule … Des auteures oubliées parce qu’effacées

 » Les cinq volumes de cette anthologie au format poche présentent une trentaine d’autrices de théâtre nées sous l’Ancien Régime, dont la production s’étend des années 1530 (la reine de Navarre, première dramaturge connue à ce jour), jusqu’aux dernières productions théâtrales de Mme de Staël-Holstein (1811). En tout, une cinquantaine de pièces qui retracent l’Histoire du théâtre à travers la production de ses autrices, dans les différents genres dramatiques où elles se sont illustrées : comédies, tragédies, tragi-comédies, pastorales, drames, proverbes dramatiques… Les registres couvrent aussi bien la scène professionnelle que le théâtre amateur, dans des domaines aussi variés que les comédies religieuses de Marguerite de Navarre, le théâtre d’éducation de Mme de Genlis ou les pièces politiques révolutionnaires d’Olympe de Gouges. Presque toutes ces pièces ont été jouées, et près de la moitié ont été représentées sur les scènes de la Comédie-Française ou de la Comédie-Italienne. C’est donc tout un pan du répertoire dramatique français qui est ainsi remis à jour, offrant là une nouvelle page de l’histoire littéraire des femmes sous l’Ancien Régime, encore méconnue malgré les recherches de plus en plus nombreuses menées au cours de la dernière décennie. A travers les pièces de théâtres de ces autrices, professionnelles ou amatrices, se fait également entendre la voix de femmes décidées à braver l’interdit traditionnel d’un genre dit « mâle », pour accéder à la parole publique et à la mise en scène des rapports de sexe dans l’espace social et politique que constituait le théâtre de l’Ancien Régime. » Présentation de l’éditeur

Une équipe éditoriale internationale…

La direction de l’anthologie est assurée par trois spécialistes du théâtre des femmes sous l’Ancien Régime : Aurore EVAIN (Sorbonne Nouvelle), Perry GETHNER (Oklahoma State University) et Henriette GOLDWYN (New York University). La présentation et l’annotation des textes sont réalisées en collaboration avec des spécialistes reconnu-es des autrices/de la littérature féminine/du théâtre.

5 volumes brochés, format poche, textes en orthographe et ponctuations modernisées…

  • volume 1 : XVIe siècle. Marguerite de Navarre, Louise Labé, Catherine Des Roches. Parution : décembre 2006. 562 p., 10€.
  • volume 2 : XVIIe siècle. Françoise Pascal, Mme de Villedieu, sœur de La Chapelle, Anne de La Roche-Guilhen, Mme Deshoulières. Parution : mai 2008. 624 p., 15€.
  • volume 3 : XVIIe-XVIIIe siècle. Catherine Bernard, Mme Ulrich, Catherine Durand, Marie-Anne Barbier, Mme de Sainctonge, Mme de Gomez. Parution : 2009.
  • volume 4 : XVIIIe siècle Mlle Monicault, Mme Ricobonni-Baletti, Mme de Staal-Delaunay, Mme Duboccage, Mme de Graffigny, Mme de Montesson, Mme Benoist. Parution : 2010.
  • volume 5 : XVIIIe-XIXe siècle Mme de Genlis, Fanny de Beauharnais, Mlle de Saint-Léger, Olympe de Gouges, Isabelle de Charrière, Mme de Staël-Holstein. Parution : 2011.

Un site « compagnon »…

Ce site internet présente les volumes, accompagnés de documents inédits et d’extraits de pièces, ainsi que toute l’actualité consacrée au théâtre de femmes de l’Ancien Régime : articles, colloques, lectures, représentations, etc.

Des lectures videos

Un DVD de la lecture du Favori de Mme de Villedieu a été réalisé, sous le parrainage du GRAC (Université Lyon 2), de l’Université de Saint-Etienne, de l’Université de Liège et du département de français de l’Université de New York. Destiné aux centres de recherches, bibliothèques et départements universitaires, il est disponible au prix de 35€. (contact)

En savoir plus sur le projet

« Théâtre de femmes : les enjeux de l’édition », Agoravox.