Archives pour la catégorie ♥♥♥♥♥ – Coup de ♥

Anne Sexton, « Tu vis ou tu meurs », oeuvres poétiques (1960-1969) » bientôt disponible en France

Et nous sommes de la magie se parlant à elle-même,

bruyante et solitaire. Je suis la reine de tous mes vices

oubliés. Suis-je toujours égarée ?

Jadis j’étais belle. Maintenant je suis moi-même,

comptant des mocassins rangée après rangée

sur l’étagère muette où ils continuent d’espérer

Cela faisait des années que j’attendais cela, et ce sont les Edition « des femmes – Antoinette Fouque » qui ont réalisé ce rêve de voir enfin traduites, en France, les oeuvres poétiques d’Anne Sexton ! Prix Pulitzer en 1967 pour « Live or Die », immense poétesse qui devint une figure marquante du confessionalisme américain incarné par le poète Robert Lowell, Anne Sexton(1928-1977) est l’autrice d’une oeuvre poétique composée de plus d’une dizaine de recueils. Elle s’est vue décerner de nombreux titres honorifiques dans des universités telles que Harvard, Colgate ou encore Boston.

Son style est novateur et transgressif, d’une incroyable modernité, les menstruations, l’avortement, le lien matriciel ou l’inceste et la psychanalyse sont parmi les thèmes de cette poésie iconoclaste. Poétesse tourmentée, à la biographie parfois polémique (voir Diane Wood Middlebrook, Anne Sexton, a biography), qui finira par se suicider, à l’instar de Sylvia Plath, et dont le poème « Mercy Street » a fait l’objet d’une chanson par Peter Gabriel, son oeuvre mérite d’être davantage connue en France.

Le 13 janvier 2022 paraîtra « Tu vis ou tu meurs », oeuvres poétiques (1960-1969) », traduit de l’anglais par Sabine Huynh, et présenté par Patricia Godi. Cette édition réunit les quatre premiers recueils d’Anne Sexton (1928-1977) publiés dans les années soixante.

« Chaque être en moi est un oiseau.
Je bats toutes mes ailes.
Ils voulaient te retrancher de moi
mais ils ne le feront pas.
Ils disaient que tu étais infiniment vide
mais tu ne l’es pas.
Ils disaient que tu étais si malade que tu agonisais
mais ils avaient tort.
Tu chantes comme une écolière.
Tu n’es pas déchirée. »
A. S., Pour fêter ma matrice

Anne Sexton

Pour un temps soit peu – Laurène Marx- Editions théâtrales

Pour un temps sois peu / transe - broché - Laurène Marx - Achat Livre | fnac

Je me suis toujours demandé à quoi tenait la force des grands textes ? Est-ce la manière qu’ils ont de résonner dans leur époque ? Ou de poser les questions qui la taraudent ? Ou peut-être la manière qu’ils ont de vous rendre plus intelligent.e, en vous aidant à cheminer dans votre labyrinthe intérieur ?

Le texte dramatique de Laurène Marx est un grand texte.

S’il s’agit de « couper tout ce qui dépasse » pour être une femme, pour devenir une parmi les autres, l’invisibilité est-elle alors la seule issue ? Pour vivre heureux, vivons cachés ou alors vivons gâchés ? En quoi son personnage, cette femme trans, qui n’a « ni le charme, ni les souvenirs d’une femme » permet-il de réinterroger le féminin ? Est-il réellement impossible qu’il y ait « des femmes avec une bite ? »   

Vous me direz, mais nous avons déjà la réponse, elle a été trouvée depuis quelque temps déjà, il s’agirait de la non-binarité, un terme générique venu des sciences sociales et des études sur le genre, qui signifierait que l’on ne s’identifie ni à l‘un ni à l’autre genre (au mieux un mélange des deux). Judith Butler, chef de file de la théorie queer, proposait déjà de subvertir les normes de genre et à dépasser la dualité entre féminin et masculin.

Et pourtant, il y a ce mystère, de ces personnes qui, nées dans un corps d’homme, se sentent, en leur for intérieur, femme.

« Etre une femme, c’est pas une question d’apparence. C’est une question de… c’est une question. »

Et toutes les questions recèlent une part de mystère, il y a, en chacune d’elle, quelque chose qui ne trouvera jamais de réponse.

Certain.es pointent les dérives d’une société individualiste où chacun passe son temps à se chercher, à se définir, à se choisir, au détriment d’un collectif qui a besoin de définitions stables basées en partie sur la tradition, ou la transmission. Agenre, non-binaire, demigars, demifille, neutrois, mais qui suis-je donc ? Ce brouillage constant des normes de genre n’est-il pas préjudiciable à la construction d’une identité « stable » ?

Au fond, cette quête, qui semble sans fin, n’est-elle pas la demande, le besoin, l’exigence d’une reconnaissance ? « J’avais pensé à être heureuse ».

Le récit, bien sûr, est non seulement celui d’une transition, douloureuse et parfois cruelle, à coup de chirurgie esthétique, d’hormones et de bistouris, mais aussi celui de la violence qu’elle suscite chez les autres.

Quel tabou, quelle transgression de l’ordre social et du pouvoir franchit celui/celle qui veut affirmer son genre et changer d’état civil ? Surtout quand il s’agit d’un homme biologique ? (Je ne maîtrise ni les pronoms, ni les accords des genres neutres !)

Laurène Marx dit bien cette violence, et celle, souterraine, psychologique qui mine celle qui entreprend ce long parcours : la perte d’un travail, de certain.es ami.es. La prostitution, la drogue.

Et le danger qui guette. La solitude.

Son écriture est alerte. Des phrases longues et brèves, un rythme que l’on ressent particulièrement quand on dit le texte, ou j’imagine, quand on le joue. L’humour est parfois au vitriol, et le texte est très drôle.

Mais pas de guimauve, ni de bons sentiments.

Son écriture est belle, souvent, des images qui vous prennent, parcourent vos nerfs, font vibrer cet entrelacs de chair, et de sensations que nous sommes quand nous lisons. Une écriture extraordinairement vivante, à certains moments d’une douceur et d’une poésie inouïes.

Il n’a jamais fait bon être différent.e, et pas tellement plus aujourd’hui. Il n’a jamais fait bon être une femme non plus. On en meurt encore un peu partout.  Alors être une femme d’horizon lointain, n’en parlons même pas.

Quant à accepter notre bisexualité psychique, notre bipolarité homme-femme, beaucoup ne le peuvent ni chez eux.elles, ni chez les autres.

Alors, c’est le seul regret, à la fin de la lecture, que tout ce qui est enduré ne soit pas fiction.

Et quant à mon opinion, oui, certaines femmes en ont bien une (de bite).

A lire absolument et aussi à voir sur scène car ce texte dramatique a une vie qui va se déployer surtout l’année prochaine :

18 – 27 juin 2021 – (Création in situ)  Lyncéus Festival (Binic – Etables-sur-mer – 22)

20 juillet 2021 – (Lecture) Théâtre du Train Bleu (Avignon)

15 – 17 septembre 2021 – (Lecture)  Temps fort du Studio-Théâtre (Nantes – 44)

18-22 octobre 2021 (maquette)  Festival Fragments à  L’Etoile du Nord (Paris 18e)

22-25 février 2022 – (maquette) Festival Fragments au Cabaret de curiosités (Valenciennes – 59)

Texte : Laurène Marx / Mise en scène: Lena Paugam/Interprétation: Hélène Rencurel/Création lumières : Jennifer Montesantos/Création sonore : Lucas Lelièvre

Production en cours. Production et diffusion: Collectif Lyncéus/ Coproduction (recherche en cours) – Studio-Théâtre de Nantes

Création en salle prévue pour la saison 22-23 /avec le soutien d’ARTCENA (Aide à la création)

​​« À travers le témoignage d’une femme trans, un questionnement se met en place sur la féminité et ses injonctions. Des questions sont posées d’une façon frontale à l’interlocuteur/spectateur direct.
Si les femmes cisgenres ne s’habillent même plus vraiment en « femmes », en quoi s’habillent les femmes trans ?
Si la féminité s’est fluidifiée et libérée grâce aux luttes féministes, quels objectifs peuvent
raisonnablement viser les femmes qui transitionnent, sans trahir « la cause » ?

Faut-il, finalement devenir complètement invisible pour pouvoir exister ? »
Le second texte « Transe », fera l’objet d’un prochain article

Les saisons de l’amour / Clémentine Beauvais – Songe à la douceur

Un jeu un peu torturé de chronique en vers libre ! 🙂

Clémentine Beauvais accomplit un tour de force littéraire et un travail formel de grande ampleur à travers ce roman en vers libre inspiré de l’œuvre d’Alexandre Pouchkine.

Elle parvient à traduire dans un récit universel, les troubles, les atermoiements et les émerveillements du sentiment amoureux à travers les personnages de Tatiana et Eugène qui se rencontrent au début de l’adolescence, se perdent lors d’un événement tragique pour se retrouver par hasard dix ans après.

Une petite merveille littéraire qui continue de faire son chemin, en livre de poche, et a permis selon certains de « secouer la littérature », de réconcilier poésie et roman, de faire sentir la musicalité et le rythme de la langue, tout en jouant avec délectation avec l’histoire littéraire et la mise en réseau du patrimoine et matrimoine littéraire.

Elle prouve aux jeunes et aux moins jeunes que la culture n’est pas ennuyeuse, que des liens se tissent entre les œuvres, de manière parfois souterraine, et qu’à travers le temps et l’espace les thèmes sont universels.

La réflexion sur la forme et son possible carcan, surgit au détour de cette lettre d’amour écrite par Tatiana, convoquant les vers de Ronsard, Charles Baudelaire, Victor Hugo, Aragon, Arthur Rimbaud, Marie-Hortense de Villedieu et quelques autres. Le personnage s’interroge à la fin de cet exercice épistolaire :

 » Parfois, s’aperçoit-elle, on veut trop bien faire,

Faire alexandrin quand on peut faire libre. Faire rime quand on peu faire résonance. Faire écrit quand on peut faire ému. »

L’autrice crée un univers romanesque et poétique dans lequel la forme ne sacrifie ni au fond, ni à l’émotion.

Toute une réflexion passionnante sur le fond et la forme, sur les contraintes d’écriture, (que l’on songe à l’OULIPO par exemple), qui selon certains stimulent la créativité et selon d’autres épuisent le fond, ce que l’on a à dire, en faveur de la forme (la façon de le dire), en contraignant la pensée à enfiler un costume parfois trop étroit.

Un pur bonheur de lecture.

Je viens d’apprendre que ce roman est adapté au théâtre par Justine Heynemann avec six jeunes comédien·nes et musicien·nes de la compagnie Soy.

Nathalie Papin – Le pays de Rien/ Un écho au Rien d’aujourd’hui – D’ailleurs, le Rien deviendrait-il politiquement correct ?

Nathalie Papin – Le pays de Rien – L’école des loisirs, 2002

Marie Dilasser, dans une interview, confie que les contes de fée lui ont gâché son enfance, en lui faisant croire qu’elle était un monstre. Et à bien des égards, je suis d’accord avec elle. Les filles qui ont droit à l’amour, sont toujours riches (ou nobles) ou en potentialité de l’être, belles, vertueuses et hétérosexuelles. Il est possible que la téléréalité soit un effet de cette conception de la réussite et de l’amour.

Dans ce conte, il y a bien un roi et une princesse, mais ils sont tout à fait originaux. Le Roi comme beaucoup, fait la guerre, mais l’objet de son courroux est ce qui constitue notre humaine nature. En effet, il chasse les cris, les larmes, les couleurs, les soupirs, les rêves et les enferme dans des cages. Donc le pays du rien, ce n’est pas le néant, mais l’absence et l’ennui. Un pays du « grand silence, et de la grande immobilité ».  Jusqu’au jour où un jeune garçon arrive en sifflotant…

Alors bien sûr, ce conte permet un questionnement philosophique sur le pouvoir, la démocratie et l’émancipation. A vouloir s’épargner la douleur, on se condamne également à n’éprouver aucune joie. Dans un univers, où tout se répète indéfiniment, où le corps est contrait à l’immobilité, anesthésié, aucun rêve, ni aucun espoir ne sont possibles.

 Il questionne habilement la liberté et le désir d’émancipation de cette fille vis-à-vis de son père face à une représentation du monde qui ne lui convient pas. Pour s’émanciper, elle devra désobéir, accueillir la singularité de l’autre, facteur de désordre, mais aussi possibilité d’amour.

Le corps est  lieu de notre finitude, sceau de notre humanité, de nos fragilités mais aussi de notre résilience et de notre force face à l’adversité.

Beaucoup d’autres interprétations sont encore possibles.

Je dois aller voir cette pièce le 02 avril, au théâtre de Sartrouville, dans la mise mise en scène de BETTY HEURTEBISE qui promet d’être absolument somptueuse, en espérant qu’elle ne sera pas annulée.

avec Youna Noiret, Guillaume Mika, Olivier Waibel
vidéo Valéry Faidherbe, Sonia Cruchon (Collectif sur le toit)
scénographie et costumes Cécile Léna
lumière Jean-Pascal Pracht
son Sylvain Gaillard, Nicolas Barillot
chants Lousse
construction décor Rémi Laureau, Franck Lesgourgues, Sylviane Lièvremont
régie générale, régie lumières et régie vidéo Véronique Bridier
régie son et régie plateau Sylvain Gaillard
costumes Patricia Depetiville
graphisme Mikaël Cixous, Veronica Holguin (Collectif sur le toit)
chargé de production Joachim Gatti
chargée de diffusion Céline Vaucenat
production déléguée Cie La Petite Fabrique

Image mise en avant : licence creative commons

ARTCENA – Catherine Benhamou présente « Romance »

Romance Catherine Benhamou/ Grand Prix de Littérature Dramatique 2020

Romance Catherine Benhamou Koïnè Editions, 2019 – Grand Prix de Littérature Dramatique 2020

Romance - Catherine Benhamou - theatre-contemporain.net

De ce texte dense, au bord du souffle, et dans lequel il faut d’abord s’immerger, trouver sa propre respiration, partiemment, qui convoque notre propre corps dans une lecture, où chaque nerf est une corde tendue prête à vibrer, chaque pouce de chair un réceptacle à l’émotion, on ne peut ressortir indifférent.

La lecture peut être cela, le corps qui s’écrit en même temps qu’il lit. Et c’est parfois le miracle du texte dramatique, et aussi le miracle de la lecture…

Jasmine est une jeune fille de seize ans qui rêve de sortir de l’invisibilité :

« […] ici quand vous êtes une fille, tout ce que vous pouvez faire c’est vous rendre invisible pour éviter les embrouilles […] »

La narratrice s’adresse à la mère d’Imène, tentant de  comprendre ce qui a poussé Jasmine à choisir un rêve de sang et de mort, seul rêve qu’elle croit à sa portée, hors des mots et du langage. Un rêve qui ne serait qu’une onomatopée, « Boum ».  Un rêve d’un seul mot mais à multiples résonnances.

Une idée fixe, la répétition de ces mots qui s’enroulent sur eux-mêmes, en boule, comme celle qu’on a dans la gorge, ou à l’estomac, partout où ça se noue : « ça bouchait tout comme sur une photo quand on a laissé son pouce sur l’objectif ».

Il faut se méfier, toujours, de ce qui se résumerait à un seul mot ou à deux : amour par exemple ou amour toujours. Dans lesquels il n’y a pas d’aller retour possible, pas d’échappatoire.

Jasmine trouve donc l’amour sur Internet, son corps, quatre vingt kilos et le regard éteint d’un homme fiché S.

Pour lui, l’amour c’est à la vie à la mort, il la brûlerait vive plutôt que d’être quitté. Il est ce genre d’homme, la brûtalité à fleur de peau, qui ne se reconnaît jamais dans les mots de l’autre.

Depuis toujours c’est la guerre à l’intérieur de lui « et maintenant c’était une ville morte ».

Mais le pire n’aura peut-être pas lieu, grâce à Imène, qui porte toutes les voix dans la sienne comme autant de possibles.

Avant d’écrire Romance, Catherine Benhamou, a mené un atelier d’écriture en Seine-Saint-Denis, « où des jeunes filles ont exprimé leur malaise et leur peur les poussant à préférer l’invisibilité, juste pour avoir la paix. »

Son écriture se nourrit de ses rencontres, ses mots sont toujours tissés de ceux des autres et des émotions qu’ils suscitent en elle. Elle est aussi profondément politique et questionne l’actualité : pourquoi ces jeunes français.es ont-ils fait le choix de la radicalisation, pourquoi sont-ils partis en Syrie ?

Mais son écriture ne s’instrumentalise jamais, elle reste profondément poétique:

« on voyait son regard, on savait que ce regard ne vous lâcherait pas, qu’il faudrait faire avec et que ce ne serait pas facile »

C’est un peu comme avec sa plume, une fois sous le charme, elle non plus ne vous lâche pas.

oeuvre Tour Eiffel : sur Pixabay Mikka Mobiman

Catherine Benhamou – Ana ou la jeune fille intelligente

Catherine Benhamou Ana ou la jeune fille intelligente des femmes Antoinette Fouque, Paris, 2016

J’ai rencontré la belle écriture de Catherine Benhamou, lors d’un apéro littéraire organisé par une autre belle écrivante, Sarah Pèpe, à travers la lecture publique de « Nina et les managers », lecture vivante et jouée,  du texte qu’il m’avait fallu interroger et avec lequel j’étais entrée en résonance et aussi dans une forme de connivence, si tant est que l’écriture est charnelle et parle autant au corps qu’à l’esprit.

Cela faisait longtemps que je souhaitais lire et voir « Ana ou la jeune fille intelligente », j’avais manqué les dernières représentations à Paris, et je me promettais de lire ce texte car Catherine Benhamou, à l’instar de quelques rares autres,  a ce talent de faire vivre un texte dramatique sans représentation. Les mots créent assez d’espace et de liberté pour créer des images, il s’incarne avec force dans notre lecture intérieure, il s’anime et se joue, pour nous seul.e.s, spectateur ou spectatrice. Il se met en scène. A la lecture, j’entendais les voix, je jouais tous les personnages.

La puissance et la poésie de ce texte, sa mélancolie, lui donne une certaine autonomie et surtout, une grande beauté.

D’une histoire somme toute banale, une très jeune fille mariée  à un homme plus âgé qui vit en France, Catherine Benhamou, crée un conte universel. Il possède une belle oralité et le texte se dit, se murmure, se joue, à haute voix ou dans le langage intérieur. D’ailleurs n’est-il pas enracinée dans la tradition orale de ces femmes tenues hors de l’écriture, « Ana comme analphabète » ?

Et c’est un conte entendu enfant, qui nourrit l’Idée qui la poursuit.

« Il était une fois une jeune fille si intelligente qu’on l’appelait Ana l’intelligente… »

Catherine Benhamou anime depuis plusieurs années des  ateliers avec des femmes en situation d’illettrisme : « Dans ces ateliers, on s’intéresse aux mots, on joue avec eux, on les apprivoise, on les écoute ; ils nous entraînent dans des histoires. 

Les personnalités de ces femmes, leur état de dépendance, d’enfermement, mais aussi leur courage et leur volonté, ce qu’elles m’ont livrée d’elles à travers les exercices, tout cela m’a inspiré le personnage d’Ana, qui parvient à changer sa vie grâce aux mots ».

Au cours d’écriture, Ana joue avec les mots, en décortiquant mariage, elle trouve « rage », « laisser tout en plan ouvrir la porte et partir ».

Son rêve ? Voir la Tour Eiffel. Quelques cailloux en poche, un jour, elle se décide.

Les mots ont-ils le pouvoir de changer nos vies ?

Pour le savoir, il faudra lire et entendre la voix d’Ana. Une voix essentielle dans le monde d’aujourd’hui …

ANA ou la jeune fille intelligente a été créée au Théâtre de l’Opprimé à Paris le 20 mars 2013 dans une mise en scène de Ghislaine Beaudout. La pièce a été interprétée par son auteure du 14 mars au 17 avril 2016 au Théâtre Artistic Athévains et également joué en 2019.

Accabadora de Michela Murgia

Accabadora de Michela Murgia, traduit de l’italien par Nathalie Bauer, Editions Seuil 2011, 216 pages

Dans la Sardaigne des années cinquante, Maria enfant solitaire et délaissée, se voit offrir l’espoir d’une vie meilleure grâce à Tzia Bonaria, la « accabadora », couturière déjà âgée, célibataire sans enfants, qui fait d’elle « sa fille d’âme », c’est-à-dire sa fille adoptive.

Maria reçoit amour et tendresse de la part de la vieille femme, mais aussi l’opportunité de faire des études et d’apprendre le métier de couturière, afin de pouvoir assurer son indépendance. Cette émancipation féminine est assez inhabituelle dans cette société traditionnelle où la division des tâches s’organise encore fortement par le genre.

Mais la vie de TZia Bonaria recèle bien des parts d’ombre. Que fait-elle pendant ses absences nocturnes ? Elle est l’« accabadora », la « dernière mère » dans le village où elle jouit d’une place très particulière au sein de la communauté de ses concitoyens. Mais quel rôle joue-t-elle exactement, et cela n’a-t-il pas une légère odeur de soufre ? Que va découvrir Maria et va-t-elle accepter la vérité ?

Ce roman est somptueux, poétique et délicat. Il y a chez les autrices italiennes de la dernière décennie, une exploration tout à fait passionnante des arcanes de la psychologie humaine, et une vraie tentative de tisser la mémoire collective du rôle joué par les femmes dans leur émancipation au sein des sociétés traditionnelles.

Un vrai coup de cœur !

Silvia Avallone – Marina Belleza/ Un monde à réenchanter

Marina Belleza, bellissima. | Actu Du Noir (Jean-Marc Laherrère)

Silvia Avallone – Marina Belleza  (2013) – Liana Levi 204 (J’ai Lu n°11 630)

Dans une Italie désenchantée, au fond de la vallée Cervo,  Andrea rêve de reprendre la ferme d’alpage de son grand-père, Marina court les télécrochets afin de se faire un nom, et de décrocher le succès et l’argent.

Ils s’aiment depuis toujours, mais s’engagent sur des chemins à l’opposé l’un de l’autre.

Marina Belleza est le roman d’un nom, comme Anna Karénine, Madame Bovary, résumant à lui seul les contradictions et les soubresauts d’une époque.

Comme toutes les femmes, Marina est identifiée à sa beauté, une beauté futile, liée uniquement à l’apparence, discriminante. Elle doit subir les sifflets, les remarques, les quolibets des hommes lorsqu’elle apparaît quelque part.

Elle utilise sa beauté comme une arme mais elle ne l’investit pas à la manière de ces midinettes qui sont ses concurrentes. Elle est une travailleuse acharnée depuis toujours ; elle investit dans son talent, dans sa voix.

« Quand je chante, dit-elle, je suis un homme. » Elle lutte pour la reconnaissance de son talent.

Elle en joue d’ailleurs, elle ose les tenues provocantes, fait d’innombrables caprices. Pourrait passer pour une vulgaire bimbo.

Andrea n’aime pas ce côté futile de Marina, il la connait autrement, talentueuse, fière, forte et indépendante, comme le cerf dans la forêt.

Les filles luttent pour conquérir leur liberté et partent du handicap hérité de leurs mères, de leur position de soumission, celle que leur a imposé la société.

Le roman va être la conversion de Marina vers son authentique beauté, la rage qui l’habite, son talent, sa soif de liberté.

Andrea rêve d’avoir une femme qui le seconderait, des enfants et sa ferme.

Deux rêves que tout oppose …

Dans l’entretien qu’elle donne à Mediapart, Silvia Avallone explique qu’elle a voulu donner la parole à ces jeunes, trahis par les grandes villes, qui n’offrent plus d’opportunités et retournent en province, dans les villages désertés, où les industries ont toutes fermées.  Des jeunes qui tentent de se réapproprier la beauté, en inventant leurs propres défis et leurs propres solutions.

Elle se défausse de cette société berlusconienne, du « bling bling » où l’on obtient tout, tout de suite, et où l’on vend du rêve. Une société qui repose sur la visibilité, la télévision, l’argent facile.

« L’époque du miracle économique, de la Roue de la Fortune et de la marionnette Gabibbo, quand il semblait évident qu’on pouvait vendre n’importe quoi : un projet politique, une paire de jambes, une plaque d’aggloméré aux faux airs de bois massif, une époque désormais ensevelie sous les pancartes annonçant « Tout disparaître » et « Fermeture définitive ».

Selon elle, il s’agit de réinventer autre chose, car on ne peut pas gagner dans le désert, ce dont va se rendre compte Marina, qui comprendra à un moment donné qu’elle fait fausse route.

En position de faiblesse, ses héros vont devoir se dépasser, surmonter les difficultés, franchir des barrières, psychologiques et sociales. Devenir des héros et des héroïnes du quotidien.

Inventer d’autres rêves, dans une Europe désenchantée, qui ne porte plus de grands rêves ou de projets, et où l’on a clamé la fin des idéologies dans un présent où il n’y a plus rien à désirer que des choses matérielles, vaines et futiles. Pourtant, selon elle, l’Eldorado est là où tu décides qu’il va être. Et ses personnages ont quelque de chose de brutal, de forcené, habités par leur soif de conquête.

« Il fallait devenir des héros, des rêveurs, des fous.« 

L’Eldorado ce n’est pas forcément ailleurs, à l’étranger, l’Italie contient son propre Eldorado.

Les romans de Silvia Avallone contiennent ce souffle puissant des grands romans populaires, qui véhiculent des thèmes importants, sociaux et politiques.

Sa littérature est engagée et enragée, elle veut raconter des histoires que nous pourrions tous habiter, qui nous racontent. En Italie, ou ailleurs …

Dolores Prato – Brûlures /Eté 2020 des romancières italiennes

Un Livre Que J'ai Lu (19) : Brûlures (Dolorès Prato) - LE JOURNAL ...

Éditeur : ALLIA (31/08/2000), nouvelle traduite par Monique Bacelli

« Cette nouvelle, que tous les critiques ont définie comme « parfaite », condense un univers poétique élaboré au long de toute une vie, et en même temps le dépasse par la description miraculeuse de l’instant du passage, de l’ouverture au monde, avec sa promesse effrayante de bonheur et de liberté. » Note de l’éditeur

En 1902, l’oncle qui l’avait recueillie, n’ayant pas les moyens de la garder, elle entra au collège des sœurs Visitandines, où elle resta huit ans.

Brûlures est l’évocation des brûlures externes et internes qui firent tant souffrir Dolores Prato.

«Je suis venu apporter le feu sur la terre ; que veux-tu d’autre sinon qu’il flambe ? »

Celle d’abord du mystère de ses origines et de sa mère qui l’abandonna, elle, la bâtarde.

« …un point noir, une tache, une zone d’ombre dans laquelle nous étions confondues elle et moi ; peut-être une terrible brûlure »

De ces années au couvent, où les mystères de la vie terrestre sont évoqués comme de possibles brûlures, le péché de chair, où la philosophie du lieu est de « punir son corps et le réduire en esclavage, non pas mourir mais souffrir », l’autrice évoque des moments symboliques, des moments charnières qui la menèrent vers la liberté.

« Pour la première fois je vis, au-delà des toits, un morceau de mer nocturne ! Il y avait de la lumière même dans le noir : une lumière chargée de nuit que je n’aurais jamais pu imaginer si je ne l’avais pas vue. »

De cette liberté qu’elle entrevoit, elle ne perçoit que des fragments, des promesses, durement conquises. Car on ne lui fait aucun cadeau, tout se paie par d’intenses brûlures, on dit de la honte qu’elle est cuisante, qu’elle vous met le feu aux joues, de la même façon que la chair brûle, elle aussi, et vous met le feu au derrière.

« Et, en effet, on évoquait souvent certaines « brûlures » sans plus de précisions, que le « monde » avait l’habitude d’infliger à ceux qui avaient trop de familiarités avec lui. »

Faire des études, fuir le pensionnat, devient le seul espoir… Échapper à la monotonie, à l’enfermement, à la sécurité mortifère d’une vie où l’on ne risque rien, retenue par l’obéissance de la dette, la reconnaissance de la honte.

« Je voyais toutes ces choses nouvelles sans savoir ce qu’elles étaient : un mystère sans peurs, plus grand que l’océan et moi libre, dans cette ampleur vitale. »

Nous ne sommes pas condamnés à brûler, il suffit juste d’apprendre les usages du monde, de la même façon qu’il faut utiliser de manière raisonnée l’eau et le soleil pour ne pas attraper d’insolation et de coups de soleil.

La brûlure est aussi celle du désir et de l’amour, de la vague qui claque contre une cuisse, de la morsure du soleil sous la peau.

La brûlure de la vie en soi.

Vivre tout simplement …

Mélancolie ouvrière – la belle figure de Lucie Baud, une des premières femmes syndicalistes françaises

Vendredi 10 juillet à 20h55 sur Arte. Téléfilm français de Gérard Mordillat (2018). Avec Virginie Ledoyen. 1h30. (Disponible en replay jusqu’au 11 août sur Arte.tv).

Une grande figure des luttes de femmes !

Mélancolie ouvrière, Michelle Perrot, Le Seuil, 2014

J’ai regardé ce soir ce beau film de Gérard Mordillat adapté d’un livre de Michelle Perrot, « Mélancolie ouvrière » qui a tenté de retracer la lutte mais aussi l’histoire de cette femme, ouvrière en soie du Dauphiné. Femme rebelle, courageuse, et qui paya très cher ses engagements. Elle organisa et soutint les grèves des ouvrières dans les usines de la soie dans lesquelles les femmes étaient exploitées, et où des fillettes de 10 à 12 ans travaillaient 12 heures par jour, quand ce n’était pas plus.

Les patrons, scandalisés, clament qu’augmenter les ouvrières les conduira à la faillite. Inutile de dire que cela n’est pas arrivé…Mais je crois qu’on entend encore certaines de ces diatribes encore de nos jours.

Elle aida les ouvrières italiennes, recrutées en grande partie dans le Piémont, et réduites pratiquement en esclavage, non seulement elles étaient payées encore moins que les ouvrières françaises mais on ne changeait leurs draps qu’une fois par an. de très belles scènes dans le film où ces femmes chantent.

Le choeur des esclaves…

« Je suis entrée comme apprentie chez MM. Durand frères. J’avais alors douze ans. » Ainsi commence le témoignage de Lucie Baud (1870-1913)…

Dans son livre, Michelle Perrot tente de comprendre son histoire, ses;luttes, ses souffrances et ses échecs mais aussi la singularité qui fait d’elle une personnalité forte, une meneuse, une femme révoltée.Ses échecs, ses chagrins qui durent être immenses. Sa mélancolie…Ce qui la brisa…

Ces femmes à qui l’on doit tant…

Coup de cœur : Hors normes ! Ce film est une merveille ! A voir de toute urgence!

Ce film est une merveille ! Allez le voir  de toute urgence !  Laissez ce que vous êtes en train de faire, appelez quelques amis.es. et installez-vous dans une salle de cinéma pour cette aventure humaine qui ne verse jamais dans la guimauve, brutale, chaleureuse et profonde… Ce plaidoyer pour plus d’humanité ne repose jamais sur les bons sentiments, dont l’enfer, nous le savons tous, est largement pavé, mais sur une énergie puissante au cœur des êtres, un mouvement vers la vie.

Tous les comédiens sont remarquables mais je n’avais jamais vu Vincent Cassel aussi lumineux.

Parmi eux certains référents des associations mais aussi de jeunes autistes qui ont accepté de jouer, car il semblait impensable de donner ces rôles à des comédiens professionnels.

De  Eric Toledano, Olivier Nakache
Avec Vincent Cassel, Reda Kateb, Hélène Vincent
Genre :  Comédie
Nationalité : Français
« Bruno et Malik vivent depuis 20 ans s’occupent d’ enfants et adolescents autistes profonds. Sans agrément, avec leur seule (bonne volonté », ils tentent de sortir de leur nuit ces personnes dont le rapport à soi et à la réalité est profondément affecté et qui, faute de lange, expriment leur souffrance par des auto-mutilations ou la violence envers les autres.
Ce film est un hommage à l’action de Stéphane Benhamou, créateur de l’association « Le silence des justes », qui accueille des enfants autistes et tente leur réinsertion et  socialisation. En 2015,les deux réalisateurs filment Stéphane Benhamou et Daoud Tatou, président du Relais de L’Île de France, une association qui met en relation de jeunes autistes avec des adolescents de quartiers difficiles dans un documentaire.
Aujourd’hui le film est un aboutissement.

Les Testaments – Margaret Atwood/ Eblouissant !

Les testaments

Testaments – Margaret Atwood – Collection Pavillons – Robert Laffont, octobre 2019

 Lorsque j’ai appris la sortie de ce nouvel opus du chef-d’œuvre dystopique de Margaret Atwood « La servante écarlate », je me suis demandé pourquoi l’autrice avait ressenti le désir d’écrire cette suite : une série télévisée s’en était chargée avec brio, malgré quelques critiques cependant sur une forme de surenchère dans la cruauté et la violence du système totalitaire de Galaad.

Mais Margaret Atwood, dans ses remerciements, à la fin de l’ouvrage, ne manque pas d’adresser ses plus vifs remerciements aux « équipes MGM et de Hulu qui ont adapté le livre en une captivante série télévisée, magnifiquement réalisé et maintes fois primée ».

Mais il est à noter qu’elle ne mentionne que l’adaptation du roman et non la suite.

Parce que la patronne, c’est elle, et la suite sera la sienne !

Mais quid de cette suite ? Est-il encore possible de maintenir la même tension, le même suspense et la même émotion  ?

Le récit se situe quinze ans après « la servante écarlate » dans un régime théocratique corrompu, dont les rouages impitoyables assassinent, torturent et réduisent au silence tous ceux et surtout toutes celles qui lui résistent.

Testaments, est le récit de trois femmes dont l’une est la fondatrice du système, et les deux autres  deux jeunes filles dont l’une a été élevée à Galaad, et l’autre au Canada.

Les destins de ces trois femmes vont être réunis sous le sceau du secret, dans une lutte clandestine et souterraine, éminemment dangereuse qui pourrait les broyer.

Je n’en dirais pas plus, parce qu’il ne faut rien savoir  afin de pouvoir se laisser porter par le récit.

Selon Margaret Atwood, il s’agissait de répondre à une question récurrente qui lui était posée : « Comment Galaad s’est-il disloqué ? »

Testaments y apportent une réponse.

« Il arrive que les totalitarismes s’effondrent, minés de l’intérieur, parce qu’ils n’ont pas réussi à tenir les promesses qui les avait portés au pouvoir ; il se peut aussi qu’ils subissent des attaques venues de l’extérieur ; ou les deux. Il n’existe pas de recette infaillible, étant que très peu de choses dans l’histoire sont inéluctables. »

 Il s’agit selon moi d’un récit virtuose, qui ne vous lâche pas, dont le suspense est haletant et vous fait vibrer jusqu’à la dernière page.

Je vous le dis, Margaret Atwood voulait avoir le dernier mot. Et elle l’a eu dans cette suite éblouissante.

T’es pas mon genre ! Ou un amour sans résistance, Gilles Rozier/ Gabriel Debray, Chantal Pétillot, et Xavier Béjat au Théâtre Le Local à Belleville

un amour sans résistance

Au cœur de Belleville, dans ce quartier foisonnant et populaire, qui évoque Edith Piaf, Willy Ronis mais aussi les célèbres Triplettes, se niche un théâtre qui est un petit bijou ! Je refuse souvent des invitations ou des services de presse, par manque de temps mais ce partenariat avec le théâtre le Local a été une magnifique découverte à laquelle je ne m’attendais pas.

Dans le texte de la pièce, le sexe du narrateur ou de la narratrice n’est pas précisé.

« Une question en suspens, de sorte que le texte peut être compris de deux manières différentes, comme une relation hétéro ou homosexuelle », explique Gilles Rozier.

Question qui passionne Litterama. La pièce est jouée en alternance par un comédien et une comédienne, Chantal Pétillot, et Xavier Béjat.

Ce soir j’ai vu la version féminine, j’irai bientôt voir la version masculine dont je vous parlerai aussi.

Le texte mis en scène par Gabriel Debray est selon ses propres mots, d « une écriture vive, ciselée, très visuelle, cinématographique, pleine de retournement de situation, comme dans un bon polar. »

D’ailleurs la mise en scène est une réussite, comme tout dans cette pièce. La scène est vivante, elle possède sa propre pulsation, qui s’accorde à celle de la comédienne, son jeu d’ombres et de lumière, devient l’articulation entre la mémoire et le récit au présent, entre le territoire du souvenir, cet homme caché dans la cave, et le lieu symbolique de l’Histoire que la narration fait surgir dans une lumière éblouissante et parfois cruelle.

Ce soir, nous avons vu jouer la merveilleuse Chantal Pétillot, dont chaque mot, chaque geste est une évidence, habitée, transfigurée, faisant corps avec le texte, respirant avec lui, grondant ou se pâmant, dans un jeu presque musical, parfois fluide ou syncopée avec quelques points d’orgue. Un jeu inspiré, dont on ne sort jamais indemne. Une modulation constante du corps et de la voix, un souffle, un grand vent, qui nous emporte, nous, spectateurs dans cette histoire d’amour parfois terriblement sombre. Je crois que ce soir nous avons aimé avec elle, avec la même douceur, la même fureur. Mais cette femme aime-t-elle l’homme qu’elle a sauvé, ou n’est-il que le jouet de son désir, ou simplement un peu de crédit à sa bonne conscience ? Chantal Pétillot joue habilement des ambiguïtés de son personnage et de ses zones d’ombre.

Le visage de la comédienne est parfois si proche des spectateurs qu’il apparaît comme en gros plan. D’ailleurs elle ne craint pas devenir planter son regard dans le vôtre.

Elle m’a fait penser à Marlène Dietrich, avec sa voix de basse, et cette sorte d’élégance.

Je crois que l’amoureux.se de théâtre a le devoir d’être un aventurier, pour aller à la rencontre des théâtres de quartier, vers des pièces qui ne bénéficient pas de la publicité qu’ils mériteraient. Je vais souvent au théâtre, et j’ai rarement été aussi émue.

Bien implanté dans le tissu urbain, Le Local est un lieu de création, d’actions culturelles et de pratiques artistiques amateurs, situé au 18 rue de l’Orillon Paris 11e au cœur du quartier Politique de la Ville Belleville/Fontaine au Roi.  L’association « Ombre et lumière » et ses artistes souhaitent favoriser des rencontres, des échanges et applique des tarifs adaptés à un public aux revenus modestes. Les actions qu’elle met en œuvre cherchent avec la parole, avec « des paroles », à créer des rencontres, des échanges culturels entre les artistes et les publics. Ces paroles s’expriment par différentes formes et provoquent d’autres paroles, elles-mêmes sources de création.

 

En librairie le 10 octobre, la suite de « La servante écarlate » traduite en français. Un démenti à la série télévisée ?

Une alternative à la série télévisée dont les saisons se suivent et se ressemblent : violentes et insupportables parfois. Géniales aussi le plus souvent. D’ailleurs je viens d’apprendre que ce livre va également faire l’objet d’une série télévisée.

« Le chef-d’oeuvre dystopique de Margaret Atwood, La Servante écarlate, est devenu un classique contemporain… auquel elle offre aujourd’hui une spectaculaire conclusion dans cette suite éblouissante.

Quinze ans après les événements de La Servante écarlate, le régime théocratique de la République de Galaad a toujours la mainmise sur le pouvoir, mais des signes ne trompent pas : il est en train de pourrir de l’intérieur.
À cet instant crucial, les vies de trois femmes radicalement différentes convergent, avec des conséquences potentiellement explosives. Deux d’entre elles ont grandi de part et d’autre de la frontière : l’une à Galaad, comme la fille privilégiée d’un Commandant de haut rang, et l’autre au Canada, où elle participe à des manifestations contre Galaad tout en suivant sur le petit écran les horreurs dont le régime se rend coupable. Aux voix de ces deux jeunes femmes appartenant à la première génération à avoir grandi sous cet ordre nouveau se mêle une troisième, celle d’un des bourreaux du régime, dont le pouvoir repose sur les secrets qu’elle a recueillis sans scrupules pour un usage impitoyable. Et ce sont ces secrets depuis longtemps enfouis qui vont réunir ces trois femmes, forçant chacune à s’accepter et à accepter de défendre ses convictions profondes. En dévoilant l’histoire des femmes des Testaments, Margaret Atwood nous donne à voir les rouages internes de Galaad dans un savant mélange de suspense haletant, de vivacité d’esprit et de virtuosité créatrice. »

Bibliothèque multimédi@ du domaine Berson- Meulan – Litterama et le café littéraire/ Merci !

Je tenais à remercier vivement la très sympathique communauté de lectrices meulanaises et Karine et son équipe de bibliothécaires pour ce moment de partage.