Le roman Effi Briest dépeint la condition des femmes dans la Prusse bourgeoise du XIXe siècle. Effi est un personnage complexe, à la fois victime d’un monde soumis aux lois des conventions morales, et à la faiblesse de son caractère et du manque de fermeté de ses valeurs.
Le baron von Innstetten demande la main d’Effi, fille de la femme qu’il a aimée autrefois et qui a refusé sa demande en mariage pour lui préférer un meilleur parti. Il a une quarantaine d’année et Effi à peine dix-sept ans. Il est devenu un fonctionnaire embourgeoisé, et ne manque pas d’ambition. Effi va se soumettre à la décision de ses parents et se marier sans amour. Bien qu’elle juge le baron trop âgé, elle se laisse séduire par son ambition et sa position sociale. Par ennui, elle commet l’adultère avec un homme qu’elle n’aime pas véritablement. Cette liaison est découverte quelques années plus tard , et ostracisée par toute une société régie par un monde soumis aux lois des conventions morales, commence alors la descente aux enfers de la jeune femme…
Ce roman de la fin du XIXe siècle dépeint la situation des femmes de cette époque en Allemagne et en Prusse. La morale puritaine et son impératif de pureté exige des femmes un comportement exemplaire. Elles doivent être soumises et obéissantes et se montrer des mères dévouées. La sexualité des femmes est taboue puisqu’elles sont censées se consacrer exclusivement à la maternité. C’est pourquoi elles doivent être prudentes car elles sont à la merci de l’opinion et du qu’en dira-t-on dans une société qui se soucie uniquement du paraître. Leur comportement, leur tenue vestimentaire comme chacun de leur propos sont décortiqués par une bourgeoisie à la morale étriquée et préoccupée de plus en plus par les valeurs matérielles et l’argent.
Cette suprématie du paraître sur l’être engendre une grande hypocrisie sociale dont sont victimes d’abord les femmes parce qu’elles ne peuvent être socialement autonomes, mais aussi les hommes. Et chacun a sa responsabilité dans une certaine mesure dans ce qui lui arrive. Ici pas de naturalisme à la Zola, même si Effi cite « Nana » qu’elle n’a visiblement pas lu. Le déterminisme n’est pas total. Il y a des choses ou des orientations que l’on peut choisir.
Ainsi le personnage de cette cantatrice dans le livre qui vit des amours interdites et mène une carrière de chanteuse lyrique. Elle semble éprouver un certain bonheur. Ce qui pêche avec Effi, c’est qu’elle est faible et ne va pas au bout de la passion. Elle est perdue aussi par son ambition et son manque de courage. Mariée trop jeune, victime d’un mariage arrangé dont ses parents sont responsables, elle a pourtant le choix d’orienter sa vie dans une certaine mesure. Le mari détruit trois existences car il n’a pas le courage d’affronter le ridicule du mari trompé pourtant personne d’autre que lui ne connaissait la liaison de sa femme qui semblait avoir cessé depuis longtemps. Son code de l’honneur est le fruit de ses limites morales et intellectuelles.
Car c’est par faiblesse ou par bêtise que hommes et femmes dégradent les valeurs en conventions. Aucun amour ni générosité ne les irradient plus ; elles deviennent comme des écorces vides. Ainsi des parents renient leurs enfants, des amis leurs amis au mépris de la solidarité la plus élémentaire.
Effi appelle peut-être un nouveau type de femme désireux de prendre en main son destin et dont la force et le courage moral permettra de briser le carcan des conventions sociales. On dirait en tout cas que c’est ce que Theodor Fontane appelle de tous ses vœux.
J’ai vraiment beaucoup aimé ce livre car l’auteur observe finement ses personnages et il peint cette jeune femme avec beaucoup de tendresse même s’il marque les limites du personnage.. J’avais vu l’adaptation que Rainer Werner Fassbinder avait réalisée en 1974, classique du film de femmes dans la grande veine des mélodrames sirkiens. Mais les personnages mis en page, les fondus en blanc, les cartons se superposant à la voix du réalisateur donnent un récit un peu long et ennuyeux alors que le livre est tout le contraire.