Ce livre est constitué de quatre récits, quatre nouvelles, quatre voix et des hommes, engagés dans l’Histoire et dans la violence de ce monde, victime ou bourreau le plus souvent, en proie à la culpabilité et aux souvenirs. Des esclaves qui tentent de s’échapper, un capitaine négrier, un ancien poilu reconverti en mercenaire et trafiquant, un poète qui se souvient de la femme qu’il a aimée, ou trois officiers de marine qui se retrouvent chaque année autour d’un bon repas, ces histoires sont des histoires d’hommes.
Dans la nouvelle « La nuit Mozambique » un rituel s’instaure, chaque convive doit à son tour raconter une histoire. Dans ce récit, l’Afrique est figurée, convoquée, espace de fantasme et de projection dont Laurent Gaudé avoue ne pas savoir s’il correspond à la réalité mais qui libère quelque chose qui a trait à l’écriture. A propos d’un autre livre, il avouait ne jamais situer ces récits dans un espace proche: l’ailleurs a une magie que le proche n’a pas, elle sert de révélateur, à la manière d’une plaque photographique, à sa propre intériorité. Elle est peut-être l’éloignement de l’universel …
De ces hommes, on approche la sueur, les corps échauffés par la violence, ruinés par la vieillesse, corps en fuite, corps en mouvement. Même lorsque les hommes sont assis, ils voyagent à leur corps défendant, ils évoquent, ils racontent et alors surgissent les bateaux et les éléments. Tels ces clandestins entassés dans la coque, sacrifiés à l’égoïsme et à l’argent. Le teint est fiévreux, la brûlure apparente, la nuit enveloppe les tragédies d’une touffeur presque tropicale. Les dents crissent, les fronts frappent les poutres.
Pas d’épanchement, seulement « la tristesse des hommes face à leur finitude », tout au plus la vieillesse donne-t-elle « des mains de vieille femme », car les jeunes hommes ont des mains de « fauve » et des sourires arrogants, la violence, dit une personnage, « je la sentais en moi, par jaillissements».
Je me suis laissée prendre par ces histoires sombres, presque souterraines, mais sans passion. J’aime beaucoup Laurent Gaudé, et je le lis régulièrement parce que je le trouve intéressant mais j’avoue que ces univers où le masculin est âpre et torturé m’oppressent un peu.
Comme toi j’aime l’écriture de Gaudé, imagée, en clair-obscur, tour à tour tendre et torturée… une écriture des sens. Je pense au soleil des Scorta lu il y a peu et à Eldorado sur les migrants… Je relirai cet auteur, c’est sûr.
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Oui, comme toi j’ai beaucoup aimé ces deux œuvres. Une écriture toujours torturée c’est sûr.
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