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L’élégance des veuves – Alice Ferney

L-elegance-des-veuvesUne force obscure pousse les corps les uns contre les autres, creuse le désir et fait chanter la chair car « le sang et la chair ont une éternité derrière et devant eux. »

Le livre d’ Alice Ferney, à travers une chronique familiale, rythmée par les décès et les naissances dans un cycle vital, explore la condition des femmes au début du XXe siècle dans le milieu de la bourgeoisie.
Le destin des femmes est d’être mère, de « s’occuper de la maison, des repas, des invitations, de l’enfant à venir, de son époux et de ses amies ». Les couples ne font pas l’amour mais des enfants. Le conservatisme religieux pèse sur le destin des femmes de la bourgeoisie qui à l’instar de Mathilde, un des personnages principaux, enchaîne une grossesse après l’autre. Dieu commande et la chair obéit, il donne et il retire.

Mathilde, épuisée par ses grossesses successives en mourra. Le mari sera complice de cette mort, car il sera resté sourd aux avertissements du médecin qui lui recommandait d’épargner une nouvelle grossesse à sa femme.
Pourtant le mariage d’Henri et de Mathilde est un mariage d’amour mais dans lequel aucun des deux époux ne remet en question le poids de la tradition. Mathilde aime ses enfants, car c’est l’enfant qui la fait et lui donne « une place dans l’immensité de l’inconnu ». La peau de ses enfants est « la continuation de la sienne », mère et enfant fusionnant ensemble. Elle semble être de ces femmes qui s’épanouissent dans la maternité.

Je mettrai ce livre en regard avec celui d’Elizabeth Badinter, « Le conflit. La femme et la mère », dans lequel elle dénonce le retour à un certain conservatisme qui réduit les femmes au statut de mère en les confinant à leur fonction de reproductrice, la maternité étant considérée comme l’expérience cruciale autour de laquelle s’articule l’identité féminine. C’est tout à fait ce que décrit Alice Ferney. La différence sexuelle définit le rôle de chacun dans la société. Il faudra attendre le combat des féministes, l’avènement de la contraception qui permet le contrôle des naissances et de l’émancipation financière des femmes pour changer la donne.