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Les derniers jours de Smokey Nelson – Catherine Mavrikakis

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Les derniers jours de Smokey Nelson – Catherine Mavrikakis – Sabine Wespieser éditeur 2012

Smokey Nelson attend dans les couloirs de la mort. Il a été condamné à la peine capitale et attend depuis 19 ans l’exécution de la sentence. Il a tué sauvagement un couple et leurs deux  enfants dans un motel des environs d’Atlanta.

Trois témoins directs ou indirects évoquent le criminel et la façon dont il a bouleversé leur vie.

Sydney Blanchard ouvre ce roman choral par un monologue qu’il adresse plus ou moins à sa chienne alors qu’il roule vers la Louisiane. Il n’est pas vraiment  sympathique d’ailleurs, vaguement raciste, sans réelle ambition, fan de Jimi Hendrix  dont il joue les standards, un peu lâche aussi.  Il a été arrêté par erreur et a passé quelque temps en prison à la place du coupable.

Il a été innocenté par Pearl Watanabe (seconde voix du roman) qui travaillait dans le motel cette nuit-là. Elle a parlé au meurtrier et même fumé une cigarette avec lui, avant de découvrir les cadavres mutilés de ses victimes. Il aurait pu la supprimer car elle était le seul témoin. Or, il lui a laissé la vie sauve. Pearl, sous le poids de la culpabilité qui la ronge, vit dans un long cauchemar.

Sam qui a été assassinée est la fille de Ray Ryan. Ray Ryan entend la voix de Dieu qui lui parle et lui permet de supporter la douleur de la perte. Il n’ a pas de conscience propre, tout lui est dicté par cette voix qui perd tout caractère sacré et devient presque triviale. Cette voix crie vengeance et Ray Ryan ne pourra prendre de repos tant que le meurtrier ne sera pas exécuté.

Mais la mort de Smokey Nelson fonctionne comme un couperet qui annihilera toute possibilité de rédemption pour le meurtrier et ceux qui ont croisé sa route. Face à l’absurde, ce que chacun avait mis en place pour vivre une vie normale, finit par s’écrouler.

 

Catherine Mavrikakis dit qu’elle aime bien que le lecteur soit bousculé et dans ce livre, pas de doute, on ne reste sur aucune certitude acquise. Il n’y a pas de portrait psychologique du meurtrier, rien ne le prédestinait à ces meurtres sauvages et on ne saura jamais ce qui a déclenché la tuerie. Pas d’antécédents judiciaires, une enfance et une adolescence relativement préservées, rien n’explique son geste. Peut-on devenir meurtrier par accident ? Peut-on être entraîné soi-même dans une violence qui nous dépasse ? Question angoissante s’il en est.

Bien sûr, il ne s’agit pas d’une lecture de distraction mais d’une aventure que Catherine Mavrikakis nous invite à partager, un voyage parfois difficile, un jeu de piste mortel mais dont on ressort grandi, plus intelligent peut-être , moins impatient face aux choses difficiles de l’existence. La littérature devient alors le lieu d’une possible conversion. Et l’œuvre devient éternelle.

Catherine Mavrikakis est canadienne de langue française et c’est mon premier livre dans le cadre du challenge de Denis  sur la francophonie.

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