Isabel Fraga – Le sourire de Leonor, nouvelles traduites du portugais par Parcidio Gonçalves, éditions La Différence, 2007
Isabel Fraga est née en 1950. Fille unique de Maria Judite de Carvalho, écrivain qui a tenu des chroniques durant plusieurs années dans les journaux portugais (1921-1998) et de l’écrivain portugais Urbano Tavares Rodrigues. Elle habite Lisbonne.
Les traductions françaises de son œuvre sont liées aux Editions La Différence qui a édité les trois œuvres que j’ai répertoriées à ce jour dans la traduction française. La maison d’édition a été placée en liquidation judiciaire le 20 juin 2017. Sous l’impulsion de Joaquim Vital, exilé portugais, ont été publié de nombreux auteurs portugais dont Isabel Fraga. Je n’ai pas vu de réédition chez d’autres éditeurs. Ces livres ont donc une seconde vie sur le marché de l’occasion.
Ce recueil est composé de 17 nouvelles. Les personnages principaux en sont des femmes de tous âges, dans des situations variées, femme au foyer ou femme indépendante, jeune ou d’âge mûr, de la bourgeoisie ou de milieux plus modestes.
Ces personnages ont leurs zones d’ombres et de mystère qui les rend parfois inquiétants ou subversifs, bien qu’il n’y ait pas de rébellion ouverte. Et c’est peut-être cela qui donne un petit goût de fantastique à ces nouvelles : les conflits sont tellement intériorisés qu’ils acquièrent une dimension presque surnaturelle, aux travers d’actes manqués, ou de gestes qui paraissent à première vue inexplicables. La révolte couve cependant et elle est d’autant plus violente qu’elle ne peut se dire dans une société qui a hérité des rigidités de la dictature.
Comment un homme peut-il devenir allergique à sa femme et se couvrir de plaques et de démangeaisons, ou perdre ses cheveux en quelques jours, de quelle vengeance va se saisir cette jeune femme qui jure de ne plus montrer ses dents à son mari ?
Il y a aussi des passages d’une grande poésie : « C’était une chose unique au monde, une étoffe blanche. Les autres ne pouvaient pas comprendre. Elle-même ne comprenait pas très bien. Il lui arrivait de penser combien il était beau que cinq cents, mille points unissent le corsage à la jupe, qu’une manche ne soit plus seulement une manche, et que surgisse une robe, qui était toute une vie et non pas un point, ni vingt ni quarante mais des milliers, des millions de tous petits points. ».
De jugements ou de constats douloureux :
[…] au Portugal, on ne pouvait pas vivre de musique. Ni de littérature, encore moins de poésie. Il fallait avoir les pieds sur terre. »
Un objet littéraire intéressant.