Timeless – Rupi Kaur – Recueil « Le soleil et les fleurs »

Insta ? Instapoets !

Lors de l’investiture de Joe Biden, une jeune poétesse, Amanda Gorman, a fait vibrer le monde entier avec son poème The Hill We Climb. D’autres poétesses du web ont vu le jour, sur facebook, instagram ou Tik Tok. Elles sont nées avec les réseaux sociaux et n’ont pas peur de s’en servir.

Une nouvelle génération d’autrices, de poétesses notamment, ont pu publier grâce aux réseaux sociaux. On les nomme les instapoets. La poésie, que l’on croyait désuète, semble renaître tel le phénix. Le hashtag #instapoetry connaît un réel succès et permet à de jeunes autrices de gagner des milliers de followers et, pour certaines d’entre elles, de voir leurs œuvres publiées. Rupi Kaur, jeune canadienne de 28 ans, publiée et traduite en français connaît un large succès. Elle a créé un photo-essai sur les menstruations, objet d’un tabou profond dans toutes les cultures et particulièrement dans nos sociétés, qui a déclenché de nombreuses polémiques mais aussi un engouement de la part des jeunes femmes (et des moins jeunes) qui la suivent et se reconnaissent en elle. Son engagement, son combat pour des valeurs humanistes et ses actions en faveur des femmes, en font une poétesse talentueuse, courageuse et intègre. Elle est d’ailleurs considérée comme la « papesse » des instapoets.

Des romancières, telle Cécile Coulon, qui n’imaginait pas publier de la poésie ( la poésie ne se vend pas ?) a fait connaître son œuvre poétique sur facebook. Le succès autour de ses publications lui a permis d’éditer un recueil « Les ronces » qui a reçu le prix Guillaume-Appolinaire 2018.

Certaines instapoets collaborent avec des grandes marques afin de générer des revenus à leur activité. Cet aspect commercial semble peu compatible avec la création poétique pour certains, pour d’autres il s’agit simplement de surfer sur la vague et d’être dans l’air du temps.

La poétesse Cleo Wade s’est associée à la marque G… pour la journée de la femme qui souhaitait sensibiliser les consommateurs.trices aux inégalités persistantes entre les deux sexes. On ne peut pas suspecter d’opportunisme, cette jeune femme de 31 ans, qui possède déjà une œuvre conséquente ( Heart TalkPoetic Wisdom for a Better Life ou  Where to Begin), a plusieurs centaines de milliers d’abonnés et publie des poèmes dans Teen Vogue ( If I Could Write One Million Love Poems (A Love Letter To Trans Kids) et The New York Times. Elle est aussi activiste de la Women’s prison association (source feelfree.media).

Mais depuis quand, me direz-vous, les marques et le commerce de luxe font-ils œuvre de philanthropie ? N’est-ce pas profiter d’un changement dans les mœurs pour promouvoir une image jeune et branchée, tout en assurant la visibilité de sa marque, quitte à assumer un peu de polémique ?

La poésie sort du format traditionnel de l’œuvre en papier, du recueil : elle se slame, se performe, et invente des formes originales pour se diffuser et toucher un nouveau et large public. Les Etats-Unis, grâce à la Beat Generation (magnifique exposition à Pompidou il y a quelques années) et aux poètes afro-américains sont à l’origine du « spoken word », de la dimension scénique de la poésie, slamée, mêlée au théâtre et à la danse. Elle porte aussi de nouveau messages et en s’émancipant des milieux universitaires, et des cercles fermés d’intellectuels, peut aller à la rencontre des milieux populaires, des jeunes des quartiers, en s’invitant aussi dans les prisons, où la parole, les mots et le lien participent à la réparation (Voir le poète Yves Gaudin). Elle se renouvelle et se transforme pour le meilleur et pour le pire…

Merci à Héloïse qui m’a fait connaître Rupi Kaur et a attiré mon attention sur cette nouvelle génération de poétesses.

Rencontre avec Gaëlle Josse à la médiathèque de la ville de Meulan-en-Yvelines

Mon amie Karine animera la rencontre avec Gaëlle Josse le samedi 12 juin à 15H00 à la médiathèque de la ville de Meulan. Cela promet d’être un beau moment grâce au talent de l’une et de l’autre. Si vous êtes en région parisienne, venez découvrir cette ville charmante et le très joli domaine Berson et ses beaux jardins.

Bibliothèque Multimédi@ – Domaine Berson18/20 rue de Beauvais 78250 Meulan-en-Yvelines78250 Meulan-en-Yvelines

gaelle josse

Femme de lettres, venue à la littérature par la poésie, elle viendra vous parler de son travail et présenter son dernier roman Ce matin-là, paru le 7 janvier aux éditions Noir sur Blanc.

En partenariat avec la Librairie du Pincerais.

Les amoureux – Madeleine de Scudéry (1607-1701)

A mon amoureux

Les amoureux

L’eau qui caresse le rivage,
La rose qui s’ouvre au zéphir,
Le vent qui rit sous le feuillage,
Tout dit qu’aimer est un plaisir.

De deux amants l’égale flamme
Sait doublement les rendre heureux.
Les indifférents n’ont qu’une âme ;
Mais lorsqu’on aime, on en a deux.

Madeleine de Scudéry (1607-1701)
Romances et poésies

Issue d’une petite noblesse provinciale, elle resta célibataire, ce qui lui assura la possibilité de faire une carrière littéraire qui dura presque cent ans. Elle écrivit des œuvres que son frère, auteur, était le seul à signer. Ibrahim ou l’Illustre Bassa (1641), Les Femmes illustres ou les Harangues héroïques (1642). dix tomes d’Artamène ou le Grand Cyrus (1649-1653), récit d’aventures où se reconnaissent les instigateurs de la Fronde. Après l’échec de la Fronde, la romancière commença à tenir salon chaque samedi dans sa maison du Marais. Son autre grand roman, aux accents parfois féministes, Clélie, histoire romaine (1654-1660), lui est clairement attribuée. Y figure en particulier la célèbre Carte de Tendre, où les trois fleuves d’Estime, de Reconnaissance et d’Inclination mènent aux trois cités de Tendre. De façon allégorique, y sont énoncés les principes sentimentaux de l’autrice. L’esthétique galante, qui sous-tend le récit, donne la part belle aux femmes, à leur goût et leur sensibilité. Elle s’essaya ensuite à la nouvelle : Célinte (1661), Mathilde (1667), La Promenade de Versailles (1669), imprégnés toujours des codes romanesques traditionnels.

Ces romans ont donné lieu à une vogue de romans précieux proposant une vision idéalisée de l’amour et une peinture poétisée de la société mondaine.

S’ensuivirent dix volumes de conversations morales, parues entre 1680 et 1692, qui lui assura la reconnaissance, l’estime et l’admiration (prix d’éloquence de l’Académie française lors de la création de ce concours en 1671, pension du roi à partir de 1683).

Les contemporains, relayés par la postérité, ont critiqué les extravagances et les outrances de la préciosité, qui certainement ont existé, (grâce notamment aux Précieuses ridicules de Molière) et oublié l’originalité de ce mouvement. (D’après Le Dictionnaire universel des créatrices, Nathalie Grande)

Femmes poètes – Catherine Pozzi – Nyx/ Thalie Envolée

Alina Nelega Comme si de rien n’était/ le silence des mots

Alina Nelega Comme si de rien n’était, traduit du roumain par Florica Courriol, 2021, des femmes-Antoinette Fouque

La littérature roumaine possède une extrême vitalité, déjà éprouvée avec Gabriela Adamesteanu et Adina Rosetti , Marta Petreu, et pour la poésie avec la grande poétesse Ana Blandiana.

Alina Nelega, revisite la dernière décennie de la dictature Ceausescu à travers le destin de deux femmes, Nana et Cristina, dont les amours interdites par le régime  ne peuvent se vivre qu’à travers la clandestinité dans une société extrêment corrompue où tout se monnaye à coups de billets et de faveurs sexuelles.

A la violence étatique répond la violence d’une société extrêmement patriarcale, qui s’amplifient l’une l’autre, créant un enfermement, une peur sourde, rampante, quotidienne qui mine le fond des êtres, leur intériorité, jusqu’à leurs corps même.

Alina Nelega en démonte les mécanismes, car ce n’est pas de la terreur, non, mais « une brume légère qui descend peu à peu, invisible au début, telle une toile d’araignée qui se tisse dans un coin et qu’on ne remarque pas, puisqu’elle s’étend à chaque instant sans se faire remarquer. »

En effet, dans cet univers de faux-semblants où aucune parole sincère ne peut s’émettre, tout se passe comme si de rien n’était. Il faut faire comme si tout était normal, les coupures d’électricité, les magasins vides, l’interdiction de voyager et tutti quanti.

Cristina est adolescente dans les années 1980 et a une passion pour l’écriture. Mais comment écrire avec cette censure permanente ? Elle ne cesse d’écrire dans sa tête même lorsque ses mains, ses doigts restent silencieux, engourdis, pris dans la toile. Un texte, des mots, sont autant de preuves contre vous dans une société où existent les mots autorisés et les autres.

Elle aime Nana qui entreprend des études de théâtre dans un répertoire cadenassé, limité le plus souvent au folklore. Tout devient subversif dès lors qu’on ne respecte pas les codes, arbitraires, parfois absurdes et changeants fixés par le régime.

Les mots restent donc silencieux, ne peuvent ni s’inscrire dans le corps, ni se vivre, sinon dans des échanges mesurés, surveillés, commentés.

La sécuritate règne, et traque les mots interdits, dans une société verrouillée où l’on est parfois à soi-même son propre tombeau, enfermé dans une intériorité comme un no man’s land.

Le talent d’Alina Nelega est de dynamiter les tabous, avec une extrême précision narrative, même si elle cultive parfois l’ellipse, l’allusion (mais n’est-ce pas ainsi dans cette société qu’elle décrit et où tout se dit de manière détournée ?) dans un style contemporain et novateur, où des changements d’angle surviennent dans le récit, où les prises de paroles peuvent se fondre dans la narration, sans tiret, et le dialogue passer parfois du discours direct au discours indirect, créant une fluidité entre l’intérieur et l’extérieur, le dialogue, et le monologue intérieur,  une étrangeté qui rend ce style très poétique.

J’ai vraiment pris le temps de lire ce livre, de le laisser et d’y retourner, de lire et de relire.

Un beau texte.

Placement libre – Ella Balaert/« Inventer ce n’est pas mentir, c’est ouvrir l’espace, laisser de l’air aux choses, aux gens. »

Placement libre – Ella Balaert – 2016, des femmes, Antoinette Fouque

« Inventer ce n’est pas mentir, c’est ouvrir l’espace, laisser de l’air aux choses, aux gens. »

De deux billets en placement libre, Ella Balaert fait surgir et orchestre avec brio un questionnement philosophique sur la liberté, sur la place qui nous est assignée à chacun dans la société et sur les mécanismes de l’exclusion qui broient les individus.

Une femme réserve deux places au théâtre pour aller voir son idole, Denis Macaret, et à la réception de ses billets, elle s’aperçoit qu’ils sont en placement libre. Les deux jours qui précèdent la représentation , elle doit lutter contre l’angoisse, et réfléchir sur sa propre vie.

La totale liberté, prônée par le capitalisme libéral nous rendrait-il  « expulsable », « éjectable », « expatriable » renforçant la loi du plus fort, soumettant les plus faibles à la « loi de l’empoigne » dans le théâtre du monde ? Ou la liberté est-elle conquête de sa propre place sans qu’elle nous soit assignée, d’un individu sans destin, ivre de désir et soumis à l’incertitude ?

De cette maxime shakespearienne, « Je tiens ce monde pour ce qu’il est : un théâtre où chacun doit jouer son rôle. », le personnage féminin tente, sous forme de provocation, une autre : « Trouve ta place dans ce monde ou quitte-le ». Injonction ambigüe et radicale, dérangeante même. Je l’ai comprise ainsi : malgré les embûches, invente ta place. Impose-toi. Mais elle suggère aussi le désespoir de ceux qui ne trouvant aucune place en ce monde, renoncent à jamais, et décident d’en finir.

Des différents déterminismes qui jouent pour ou contre nous : socio-économique, biologique, psychique, peut-on faire des leviers ? Ou est-on condamné.e.s  au placement réservé, « à vie ou presque » ?

Et que dire de ceux qui passent d’un monde à l’autre ? De la fille d’ouvriers qui rejoint un monde d’intellectuels, se sentira-t-elle à jamais étrangère, coupable d’être à la mauvaise place ?

Sera-t-elle condamnée à jamais « à couper sa salade au couteau » ?

L’emploi du « tu » dans la narration, organise l’analyse, aussi précise que celle d’un entomologiste. Le tu est la petite voix intérieure que nous avons tous, celle de la conscience, qui réconforte, qui admoneste, qui vitupère ou qui réconforte.

J’éprouve, avec les œuvres de cette autrice une forme de connivence ; ma lecture entre profondément en résonance avec elle.

Je pourrais dire beaucoup d’autres choses, tellement ce roman est brillant et affûté ; on y sent aussi la colère, un souffle brûlant qui insuffle aux mots une respiration dans les phrases, autour des phrases.

« J’ai écrit ce roman dans une grande colère et une réelle inquiétude. Je le dédie à toutes celles et à tous ceux qui se sentent excl-e-s du monde, qui n’y trouvent pas, ou plus, leur place, pour qu’ils ne retournent pas cette injustice contre eux-mêmes ou contre autrui. » Ella Balaert

Sursum Corda – Véronika Boutinova/ Ver à soie Virginie Symianec éditrice

Sursum Corda est un roman attachant, parfois déconcertant, tissant les voix de deux amoureux aux personnalités originales, fortes et sensibles, séparés par des frontières qui sont autant géographiques que métaphysiques ou psychologiques.

Virginie Symianec tente de « Dérouler les fils – y compris de la pensée -, les attacher au métier, les tresser, les entrelacer, tisser des liens – du texte donc -, y compris avec d’autres sociétés, explorer les trames de nos imaginaires et les raisons de nos solitudes, c’est bien là ce que font concrètement tous les éditeurs. » Elle possède un souffle profond. Infatigable chercheuse, elle mérite votre intérêt et un bon accueil.

Littérature de l’ailleurs, d’un ailleurs proche et douloureux, qui pose la question, chère à l’éditrice, du mouvement en littérature : textes  » comme des invitations sans cesse renouvelées à concevoir l’écriture comme le témoignage d’une quête, d’un déplacement ou d’un décentrement propres aux multiples formes de l’expérience exilique. »

Zuka est le fruit d’une histoire violente et contrariée, contraint au déplacement forcé durant l’éclatement de l’ancienne Yougoslavie (1991-95). Jusqu’à sa réannexion par les croates, la Krajina de Knin, où il est né et a grandi, était majoritairement peuplée de Serbes qui ont expulsé la population croate en 1991 et a été reconquise par les forces croates durant l’été 1995. L’amour peut-il être le lieu d’une résilience, lorsque deux êtres ont vécu des événements traumatisants ?

Comment l’Histoire nous modèle-t-elle à nos corps défendant ? Comment l’amour, qui est une histoire de corps, incarne-t-il ou sublime-t-il les violences de l’Histoire ?Zuka et Charlotte sont séparés une grande partie du temps, dans une Europe aux frontières étanches, mais lorsqu’ils se retrouvent, leur bonheur est toujours en équilibre, sur un fil, au bord de la fracture. Ils cherchent à garder « le lien cosmique » qui les unit, mais ne peuvent pas plus vivre l’un avec l’autre, que l’un sans l’autre.

Charlotte vit dans une péniche, qui se délabre, mouvement arrêté sur cet élément fluide. Elle pourrait larguer les amarres; mais quelque chose l’en empêche qui est de l’ordre du lieu et de l’appartenance.

Ce roman est le roman de leurs voix, de leur amour, de leurs contradictions, de leur grandeur et leurs faiblesses. A écouter, à lire, aux éditions du Ver à soie.

L’eau forte – Le désir

Et ne pas oublier la revue de ce jeune éditeur talentueux, soucieux de rendre visibles les écrits féminins, dans ce magnifique et dernier numéro de la revue :

Douzième numéro de la revue L’Eau-forte, Le Désir propose une plongée dans le monde d’Éros, regroupant les participations de poètes et de romanciers au fil d’une méditations sur l’énergie et la vie. Ce numéro clôture la publication de la revue, qui signe son dernier numéro avec, au sommaire, les écrivains François Bégaudeau, Gaëlle Josse, et Iliana Holguín Teodorescu.

La revue littéraire L’Eau-forte s’associe à l’événement du Printemps des Poètes 2021, en faisant paraître son douzième et ultime numéro sur la thématique du Désir. Avec des textes de François BégaudeauGaëlle Josse, ou de la jeune écrivaine Iliana Holguín Teodorescu, la revue propose de finir en beauté, sur une tonalité qui l’a accompagnée au fil des numéros, depuis 2017 : la passion de publier des textes vifs, saillants, mêlant le patrimoine aux créations d’aujourd’hui.

Aux côté des contemporains, le sommaire de ce numéro regroupe des textes classiques de La Fontaine, Xavier de Maistre et de la poétesse Renée Vivien (1877–1909), traductrice des fragments de Sappho.

« À la frontière de la sauvagerie, et pourtant profondément mélancolique, le Désir accompagne toute âme humaine ; source d’attraction des corps, il représentait pour Wilhelm Reich (1897–1957), qui cherchait à en capter l’énergie déferlante, le signe par excellence de la vie. Un phénomène aussi fascinant que mystérieux et originaire. »

Sommaire du numéro

François Bégaudeau : Notes sur les canards sauvages.

Xavier de Maistre : Voyage autour de ma chambre.

Iliana Holguín Teodorescu : Toi·t.

Gaëlle Josse : « Je tente d’arranger mes jours… ». Poèmes inédits.

Didier Paquignon : Trois monotypes inédits.

Renée Vivien : « Atthis aux cheveux de crépuscule ». Trois poèmes d’après les Fragments de Sappho.

Karine Josse : Wilhelm Reich et la fonction de l’orgasme.

La Fontaine : Comment l’esprit vient aux filles.

image – Renée Vivien – Licence creative commons – Wikipedia

Printemps des poètes/ le désir féminin- Marina Rogard

C’est avec Marina Rogard et son regard étoilé que se clôt ce printemps des poètes et poétesses. Merci à elle de m’avoir prêté son texte. Poétesse du web que j’ai découverte récemment, elle nous offre sa douceur et sa fantaisie.

Au plus près [de ta bouche]

Au plus près 
De ta bouche
Le baiser-fleur 
S’étire
En jolis grains
De malice.

Une minute de silence 
Pour dérober 
Le désir.

En faire une échappée 
En costume taillé
Pour tes yeux belle-de-lune.

Et tout recommencer…

Le baiser
L’échappée 
Et la fleur allumette
Qui flamme
Des douceurs 
Sur un instant de fête.

Au plus près 
De ta bouche
L’amour
Cet avia-coeur…

Renoue les ciels bleus
Délices
Et de couleurs.

Marina Rogard

© Tous droits réservés – 2021 – Marina Rogard

Nue sous la fenêtre/ Jean de Santec

J’étais jaloux de l’ombre sur ton corps

J’étais jaloux de la lumière sur tes seins

Le soir jouait à te vêtir d’or et de brun

Tu étais nue sous la fenêtre, c’était bien.

son blog

J’aime les poèmes de Jean de Santec

Ouvert aux vents griffus / Xavière Gauthier

Je remercie Xavière, pour laquelle j’ai une profonde admiration, du prêt de cette œuvre

ouvert à l’agonie géante qui empale et sourit

ouvert aux chutes de neige

à l’albâtre écumant qui jongle sous la lune

ouvert au tombeau de jacinthe

aux papillons obscurs qui déchiquettent les nues

ouvert au cri, à la bite endormie

aux morsures, au sureau

ouvert aux renards vers, couchés sous la mantille

ouvert aux crabes, rampants à l’infini

ouvert au poil marin qui rumine un orage

ouvert aux branches, aux passants attardés

à l’astre-mandarin, portant des bébés fauves

aux berbères étincelants

raclant leurs têtes mauves

ouvert

ses lèvres frottant les draps sales

mon sexe dans la douleur du noir

Poème extrait du recueil Rose saignée (Editions des femmes, 1974)

Grande figure du monde contemporain, Xavière Gauthier a profondément marqué toute une génération de femmes dont je suis, et inspire la jeune génération par la force de ses engagements.

Elle a publié sa thèse de doctorat en 1971 sous le titre Surréalisme et Sexualité chez Gallimard. Engagée, elle a lutté pour le droit à l’avortement. Elle publie Surréalisme et sexualité en 1971, Léonor Fini en 1973, et un recueil de poèmes brûlants et iconoclastes qui m’aura bouleversée à sa lecture.

Elle a fondé la revue Sorcières, les femmes vivent, revue artistique et littéraire, qui fut une revue phare des années 1975 à 1982. Collaboratrice de Laurence Perrenoud, éditrice pour l’enfance et la jeunesse, spécialiste de Louise Michel dont elle a écrit la biographie (La vierge rouge), elle transcrit dans « Les parleuses » ses entretiens avec Marguerite Duras.

Il serait vraiment nécessaire que son recueil de poèmes soit réédité, dans une nouvelle édition, si un éditeur ou une éditrice passe par là …

Une femme en crue / Caroline Boidé- Bruno Doucey

« Je veux écrire comme la jeune fille qui se déshabille et court vers le lit de son amant. » Alejandra Pizarnik est une poétesse argentine née au sein d’une famille d’immigrants juifs d’Europe centrale (1936-1972)

Cet obscur objet du désir ou l’écriture désirante.- Marie-Pierre Cattino (3/3)

L’écriture et le désir en 3 épisodes, écrit par Marie-Pierre Cattino que je remercie pour cette belle participation au printemps du désir et de la poésie.

Le désir (au) féminin n’est pas toujours là où on l’attend. Ce sont rarement les mains qui tremblent, mais plutôt le son autour du corps, qui va et vient, s’en échappe, – ce qui entoure la peau – et met un trouble. On ferme les yeux. Il disparaît. On les ouvre. On se demande si c’est réel, si ce qu’on a entendu est vrai ou faux. Si le désir se mélange avec l’amour d’un corps. Si c’est en ce moment que tout se joue, ou seulement si c’est la mort d’une relation. Si le désir tue le reste, tue les habitudes, tue les comportements vulgaires, primaires. Au contraire, si l’amour rend le désir bien plus sage et conventionnel. Trop peut-être.

On entend : «Ca va ? C’était bien ? » On a envie de mourir. Tous les mots sont de trop. Alors dans l’écriture, il faut aller ailleurs, fouiller plus loin dans un revers de la mémoire. Mais rien ne vient car tout est nouveau, toutes les fois. On revient à soi. On a besoin de silence, de cet écart entre temps et rupture. On ne sait pas trop où l’on se trouve. On sait que c’est imminent. On revient à soi, on croit revenir à soi. On n’en revient rarement.

« L’amant » s’est dissipé dans la brume. C’était il y a longtemps, très longtemps. Le premier amour est mort. Mais son désir est entier et Duras le tient fort entre ses doigts sans lâcher, elle l’écrit. L’amant chinois est mort. Mais le désir (au) féminin triomphe.

Merci à Marie-Pierre pour ce texte magnifique, Litterama

Illustration : Marie-Pierre Cattino « sans titre », 2021 encre de Chine noire, sur papier, au dos: datée signée. 

Malgré la tourmente économique dans laquelle se trouve les éditions Koïnè, due au contexte actuel, plusieurs livres doivent voir le jour :

  • Le frère de Léa, Marie-Pierre Cattino et Christian Bach, traduction bilingue allemand, espagnol, anglais. Article dans La revue des livres pour enfants de la BNF : L’art du bref | N° 317 – 2020. 

Qu’est devenue la sœur de Léa? À son arrivée dans son nouvel établissement scolaire, Jasmine se rapproche de Léa que les autres appellent la peste. Sur fond de harcèlement, la tension monte. Jasmine doit choisir son camp.

https://soundcloud.com/christian-bach-424632253/

  • Etat de chocs (je frappe quand je m’émeus) » *écriture en incursion avec Camille Davin, voyage au long cours dans la découverte de l’écriture de l’autre. Mise en scène de Françoua Garrigues, dramaturges, Camille Davin et Marie-Pierre Cattino.

Dans une cité urbaine contemporaine, il y sera question d’interdits, danger et jeux vidéo. Un jour des adolescents passeront à l’acte… Mélange de fiction et de théâtre documentaire.

  • Les larmes de Clytemnestre, édition Koinè, 2011, traduction en grec par Panagiota Kalogéropoulou, et Mikhaïl Valvis, 2019, bientôt aux éditions Koïnè, diffusion en Grèce.

D’autres part, j’ai entrepris des Encres noires, couleurs et techniques mixtes. 70 formats ont vu le jour, depuis le premier confinement !

Le printemps des poètes/Le désir féminin – Laurence Délis

On navigue à vue de rêves

Allongés nus sur un lit d’herbe folles, au milieu des maringouins assoiffés

Le soleil joue d’ombre et de lumière

Sur nos corps impatients.

La tête en friche

Eloignés des normes et des habitudes de ce monde

On navigue à vue de rêves

L’un énergumène

L’autre schizophrène.

On danse l’air de l’autre

Comme nos sourires en vie de nos corps.

Chairs aimées

Assoiffées de baisers

Et de tendresse éternelle

Nos étreintes au goût de folie belle.

On navigue à vue de rêves

Encore.

L’un énergumène

L’autre schizophrène.

Quant à la nuit, peaux rassasiées, âmes nourries, panses comblées de fruits de lambrusque

Le sommeil nous gagne.

Bon

Jour

Dans

Tes

Bras.

Romancière, poétesse, plasticienne, Laurence Délis possède de multiples cordes à sa sensibilité qu’elle fait vibrer avec beaucoup de talent.

Sa galerie d’art : http://artscad.com/@/LaurenceDelis

son blog : Palette d’expressions

Pièces démontées, le 27 et 28 mars dans le 20e arrondissement : Les poétesses nous parlent

Voici le message du collectif « Pièces démontées » . « Tendez l’oreille, les Poétesses nous parlent les 27 et 28 mars.
Ouvrez-les yeux, tendez l’oreille : des drôlesses rôdent dans le quartier de la porte de Bagnolet. Trench-coat mastic ajusté, ceinture verrouillée sur leur trésor : de la littérature sulfureuse sous le manteau.
Elles sont prêtes. Elles vous attendent. Elles vous guettent.
Au détour de nos quotidiens couleur couvre-feu, elles sont à l’affût pour vous proposer, en toute discrétion, de la came, de la bonne, de la pure : du désir féminin, d’ici et d’ailleurs, universel et singulier. Elles vous susurrent, rien qu’à vous, ces paroles de troubles, d’émois et de force. Mais en gardant une distance sanitairement acceptable. Audacieuses, pas irrespectueuses, les dealeuses.
Le prix à payer ? Votre disponibilité et votre propre désir de les entendre.
Ces passeuses de trouble à la sauvette vous attendent les 27 et 28 mars, pour deux rencontres quotidiennes :«les poétesses vous parlent le matin»  à 11h, 16 rue Joseph Python le 27 mars  et cour du 4, place de la porte de Bagnolet le 28 mars «les poétesses vous parlent l’après-midi» à 16h, 16 rue Joseph Python le 27 mars et  cour du 4, place de la porte de Bagnolet le 28 mars.
Ou venez vous délasser dans un salon individuel d’écoute, confortable à souhait, placé en plein air et nettoyé entre chaque utilisation. Vous y retrouverez ces paroles enfiévrées murmurées pour votre bon plaisir. « 
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