Archives pour la catégorie Femmes canadiennes

Laisser la vie nous porter pour découvrir l’extraordinaire – Kim Thuy – Interview par La télé de Lilou

Entretien avec Hélène Dorion, poétesse québécoise

http://www.youtube.com/watch?v=3C7A-NOtq48

Histoires nordiques – Lucie Lachapelle / L’appel du nord

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Lucie Lachapelle – Histoires nordiques  (2013)– Bibliothèque québécoise , 2018

Histoires nordiques est un recueil de nouvelles composé de façon assez originale, puisque un même personnage évolue dans ces récits, formant la trame de cette rencontre avec le Nord du Québec.

Lucie Lachapelle connaît cette région pour y avoir séjourné plusieurs fois, et y a même enseigné en 1975. Son récit est donc bien documenté. Toutefois, avertit-elle, «Les personnages pourraient être réels, mais ils sont magnifiés ou enlaidis par la littérature. Ça passe par mes émotions, ma sensibilité.»

Louise découvre le Nord à l’âge de quinze ans, plus exactement le Nunavik et en tombe amoureuse. Elle se promet de terminer ses études et d’y revenir.

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Quelques années plus tard, enseignante, elle fait ses premières armes dans cet environnement assez difficile, il faut bien l’avouer. Certains sont morts en voulant franchir les quelques mètres qui séparent deux maisons, en pleine tempête. Le froid y est parfois si mordant, qu’il n’est pas rare d’avoir des membres gelés. Enfin, ce sont surtout les risques qu’encourent les étrangers, parfois très mal préparés à la vie dans le Nord. Les inuits, eux, ont adapté leur vie à leur environnement. Toutefois, le réchauffement  climatique et la fonte des glaces, déjà dans les années 70, introduisent des ruptures auxquels ils ne sont pas préparés.

Louise est profondément émerveillée par les beautés du Nord, la nature à perte de vue, la lumière à nulle autre pareille, et la qualité du silence. Le Nord la révèle à elle-même, la renvoie à sa solitude, mais lui fait découvrir aussi sa force intérieure.

« L’esprit ouvert, le cœur éponge, la sensibilité à fleur de peau ; fière, droite, humble. Elle a su traverser les tempêtes, respirer le vent, absorber la lumière, le froid, le silence.»

Ce récit évoque les difficultés de Louise à s’intégrer, à avoir une vie amoureuse, et un avenir dans cette région où elle reste l’étrangère. Son mode de vie ne l’a pas préparé à la dure condition des femmes innues. Et sa relation avec la nature reste extérieure, celle-ci n’est pas peuplée d’esprits, à la manière innue qui entretient des relations extrêmement vivantes et étroites avec les lieux – la rivière est vivante, elle attend ses morts, elle s’endort ou se réveille.

« Louise fait bien attention de ne pas dévisager les gens qu’elle croise. Elle ne veut pas qu’ils se sentent regardés comme des objets, des sujets d’étude. À vrai dire, c’est plutôt elle qui se sent observée. Les gens interrompent leurs occupations, lèvent les yeux, se retournent sur son passage.»

Ouverte d’esprit, elle tente d’apprendre la langue autochtone, l’inuktitut, et fait de son mieux pour comprendre les coutumes locales.

Mais la démesure du nord vous ravit, dans les deux sens du mots, elle vout émerveille, et vous engloutit.

Ces chroniques du Nord sont passionnantes, je les ai lues de bout en bout, absorbée par elles. Lucie Lachapelle y est respectueuse de l’altérité, et tente de raconter un itinéraire singulier, une rencontre.

Grâce à mes « amies » québécoises, je ressens mieux ce que veut dire d’appartenir à une communauté francophone.

Et puis c’était un Québec en novembre… avec avec  Karine et Yueyin. Elles me pardonneront si je suis complètement à contretemps car c’est aujourd’hui le jour d’

Anais Barbeau Lavalette que j’ai déjà chroniquée avec « La femme qui fuit »

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Québec en novembre

Une fois n’est pas coutume, je continue ma découverte du Québec avec  Karine et Yueyin.

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Quelques rendez-vous :

2 novembre – Littérature québécoise contemporaine
6 novembre – Dany Laferrière
12 novembre – Roman publié en 2018
13 novembre – Un éditeur BQ :la bibliothèque québécoise
14 novembre – BD ou roman graphique québécois
16 novembre – Eric Plamondon
18 novembre – autour de la littérature jeunesse
20 novembre – Classique de la littérature québécoise
22 novembre – Littérature autochtone
23 novembre – Top Ten à la québécoise (top de livres, de raisons, de films, etc.)
24 novembre – Anais Barbeau-Lavalette

 

Une poétesse que j’aime beaucoup aussi, mais qui habite là-bas, à Montréal :

La femme comestible, premier roman de Margaret Atwood

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La femme comestible, The edible woman, 1969, traduit de l’anglais (Canada) par Michèle Albaret-Maatsch, Pavillons poche Robert Laffont, Paris 2008, 522 pages

La femme comestible est le premier roman de Margaret Atwood, publié en 1969 et écrit au plus fort du Canadian Woman’s Liberation Movement. Constitué de trois parties d’inégales longueurs, la narration alterne de la première à la troisième personne pour revenir à la première, témoignant de la quête d’identité de la narratrice.

Depuis que Marian est fiancée, et qu’elle sait qu’elle va se marier, abandonner son travail et certainement faire des enfants, l’angoisse l’étreint et elle ne peut plus rien avaler. Conflit entre ses désirs, certainement inconscients, et le rôle social qu’elle est amenée à jouer, le rapport à la nourriture devient le fil conducteur du récit.

Opératrice en marketing, son quotidien d’enquêtrice, la mène de porte à porte, à tenter de cerner les besoins ou désirs des consommateurs pour mieux les manipuler grâce à de savantes études marketing. Or, malgré la révolution sexuelle des années soixante, Marian MacAlpin est prisonnière des valeurs de la génération qui la précède, produit de consommation comme un autre, dont on attend qu’il réponde exactement aux attentes du consommateur masculin.

En effet, une femme, à l’époque ne se définit qu’à travers l’homme qui partage sa vie, mère nourricière, et reproductrice, ses enfants assurent son destin, circonscrit au cercle étroit du foyer. Elle est une femme comestible, dévorée symboliquement par son mari et ses enfants. Jusqu’à ce qu’elle reprenne le contrôle de sa vie. Marian sent en effet que son moi et son corps sont en train de se séparer, et que ce dernier ne lui obéit plus traduisant sa coupure avec la réalité. L’assimilation par le corps des aliments est analogue à l’assimilation par le corps social et  la transformation de la femme en sujet socialement acceptable. Elle est ainsi « digérée ». L’homme assume un rôle de prédateur, la femme étant une proie comme une autre. C’est aussi pour cette raison qu’elle ne peut plus manger, elle entend le « cri » de la carotte, par solidarité en quelque sorte avec toutes les autres proies.

Margaret Atwood analyse finement les stéréotypes de genre à travers plusieurs personnages, soit qu’ils les respectent ou  qu’ils en prennent le contre-pied, tel Duncan, qui refuse d’être un homme fort et protecteur. Ou Ainsley qui veut faire un bébé toute seule, en dehors du mariage.

Il y aurait bien d’autres choses à dire, tellement ce roman est riche de symboles et de métaphores. Il est souvent d’un humour grinçant, j’avoue que j’ai souvent ri à sa lecture.

« Vous risqueriez de faire quelque chose de destructeur : le besoin de nourriture passe avant le besoin d’amour. Florence Nightingale était une cannibale, vous savez. » , l’avertit Duncan.

lire margaret Atwood

L’habitude des bêtes, Lise Tremblay/ Découverte Festival America 2018

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L’habitude des bêtes, Lise Tremblay, éditions Boréal 2017 pour l’édition au Canada, Editions Delcourt pour la présente édition.

Je poursuis ma découverte des romancières québécoises, avec leur langue si savoureuse et leur talent de narratrices.

Lise Tremblay est née à Chicoutimi. Elle a obtenu plusieurs prix, dont celui du Gouverneur général pour son roman « La danse juive » et le grand Prix du livre de Montréal en 2003 pour son recueil de nouvelles « La héronnière ».

L’habitude des bêtes est étrangement un roman d’hommes, d’hommes qui parlent peu, qui expriment rarement leurs sentiments mais qui, à la suite de drames survenus dans leur existence, ont entamé une révolution intérieure qui va peu à peu transformer leur façon de vivre leur virilité.

Les « vrais » hommes n’aiment la nature que pour la dépouiller, ils prennent sans demander, utilisent l’intimidation et la violence pour parvenir à leurs fins. Ils sont les maîtres de la nature avec laquelle ils ne cherchent pas l’harmonie mais la domination. Des loups vivent dans le parc où ils sont protégés, mais ils ont eu le malheur de s’approcher un peu trop près des habitations des hommes. Est-ce une menace ? Ou plutôt n’est-elle pas dans les cœurs et les mains de ceux qui revendiquent si férocement leur virilité ?

Le narrateur a adopté un chien qui a changé sa vie et son rapport aux autres. Il le dit, il a été un père odieux sans s’intéresser ni à sa fille, ni à sa femme, obsédé par son hydravion, et par sa vie de luxe.

Sa fille a souffert longtemps, elle ne veut être ni fille, ni garçon, rien en trop, rien qui dépasse. Elle va prendre une décision qui va changer sa vie.

Un jour tout change, peut-être l’habitude des bêtes.

Il ne se passe pas grand-chose dans ce roman, mais là encore il est comme un visage familier, que l’on reconnaît même de loin, même en plein brouillard, une silhouette, une démarche, quelque chose de connu et de rassurant, d’aimé aussi.

Alors que le Québec est si loin, et ses hivers si rudes, sa nature si indomptable parfois.

Mais les cœurs qui battent sont les mêmes…

Je ressors de cette immersion au Québec vraiment chargée de trésors sur lesquels je ne vais pas manquer de veiller.

Merci les amies !

Rivière tremblante -Andrée A. Michaud / Découverte Festival America 2018

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« J’affectionne le roman noir parce qu’il y a toujours un mystère qui plane. Mais je veux en faire à ma manière, que ça dépasse la seule enquête policière.»

Rivière tremblante est tout à fait de cette eau-là, pour ne pas faire de mauvais jeu de mots. Deux enfants disparaissent, une enquête est (mal-)menée, les victimes sont soupçonnées d’être des bourreaux, et plus rien ne va de soi.

Mickaël Saint-Pierre, douze ans, a disparu dans les bois de Rivière-aux-trembles alors qu’il était en compagnie de Marnie Duchamp,  Andrée A. Michaud ne nous épargne aucun des tourments de l’âme de la jeune fille, la détresse, la culpabilité qui la hantent  et ont ravagé son existence. S’il y a un enfer il est bien sur Terre et ce sont les hommes qui l’ont inventé, aucun doute là-dessus.

D’ailleurs trente ans plus tard, au même endroit, Bill Richard, dont la fille a également disparu, emménage à Rivière-aux-Trembles.

Marnie, vous savez, c’est celle qui part avec la caisse, dans le film de Hitchcock, un prénom tout fait pour vous porter la poisse, et comme si ce n’était pas suffisant d’avoir tant souffert, l’auteur en remet une petite louche au cas où.

On retrouve les bois, les lacs, les hivers enneigés, les tempêtes du Québec, et la belle langue aussi.

Je crois que nos amies québécoises ont un potentiel littéraire certain, et qu’à les lire, on peut attraper une sorte de virus, qui inciterait à lire et ouvrir d’autres livres.

D’ailleurs, je commence à me demander où je vais passer mes vacances l’été prochain, hum.

Il existe un certain nombre de lecteurs-trices fan de polar, je vais essayer de les convaincre de lire celui-ci dans le cadre du challenge organisé par Sharon.

Catherine-Eve Groleau – Johnny / Découverte Festival America 2018

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Catherine-Eve Groleau – Johnny – Les Editions du Boréal 2017

J’ai commencé ma découverte des canadiennes francophones, et notamment québécoises avec cette auteure et je ne l’ai pas regretté.

Grace à la langue tout d’abord, ce français d’outre atlantique dont les expressions m’ont enchantée, je me suis enfargée également parfois, je me suis parfois encannée dans ma tête ce que je pourrais écrire de ce roman, et il y a vraiment des jours où vraiment je n’étais pas d’humeur à me faire achaler alors que j’essayais de traduire mes sensations en rêvant dans le métro ou le RER. Oui, j’ai la chance d’emprunter les transports parisiens et de mettre presque une heure pour faire sept kilomètres en grande banlieue.

Alors c’est sûr je suis tombée en amour avec cette langue et cette littérature.

Je dirais que Johnny est un roman où l’on se sent bien, à la lecture, on y retrouve les imperfections d’un visage aimé, les beautés de l’ailleurs, et une petite musique que l’on reconnaît.

A vrai dire, Johnny n’est pas seul dans ce roman, parce qu’il rencontre Valentine, aussi blonde qu’il est brun, et à qui de longues jambes ont assuré une gloire éphémère.

Il est abénaki, vingt-deux ans quand il quitte son village indien. Son teint basané lui permet de se faire passer pour un italien lorsque il arrive à Montréal.

Bien sûr, Catherine-Eve Groleau évoque les grands espaces, mais aussi les lieux désolés et sans avenir, les banlieues tristes et les vies amères. On est très loin de la jolie carte postale du Québec ou de Montréal.

Ce récit a parfois des accents de tragédie, car le déterminisme social joue à fond, et il est plus facile a priori de s’en sortir en prenant le mauvais chemin, la petite criminalité regorge de ces êtres à la dérive à la recherche d’une vie meilleure.

La fin semblera inéluctable, et il n’y aura pas de happy end.

Mais vous aurez envie de retrouver c’est sûr ce je ne sais quoi, qui vous aura saisi à la lecture.

Festival America 2018 – Heather O’Neill – Les enfants de cœur

Les enfants de coeur par O'Neill

Heather O’Neill – Les enfants de cœur (The Lonely Hearts Hotel ), traduit de l’anglais (Canada) par Dominique Fortier, 480 pages, éditions du Seuil, Paris, 2018

Ce récit est un conte noir et cruel qui se déroule pendant la Grande Dépression qui jeta hors de leurs foyers des hommes, des femmes et des enfants, sur les routes, sous les ponts, et dans les orphelinats.

Deux de ces enfants se rencontrent dans un orphelinat, et tombent amoureux l’un de l’autre. Amour vite réprimé sous la férule des sœurs. Les brimades, les coups, les punitions injustes, et même les abus sexuels rythment la vie des deux enfants, Rose et Pierrot, qui trouvent malgré tout dans la force de leur imaginaire, et le pouvoir de création qui est en eux, les ressources pour résister, grandir et enfin partir de ce lieu de …perdition. Ils sont deux êtres solaires qui attirent et possèdent une aura qui a le pouvoir de captiver ceux qui les rencontrent.

Mais l’abandon laisse des blessures immenses et des failles dans lesquelles vont s’engouffrer les misères du temps : la prostitution, la drogue, le crime, règnent en maître dans Montréal dévasté et vont soumettre les enfants devenus adolescents à la tentation d’une vie facile.

« Ce n’était pas une bonne chose que de posséder une imagination pour une fille vivant à Montréal au début du XXe siècle. De l’intelligence, voilà ce qu’il lui aurait fallu ».

Pourtant Rose n’en manque pas, une forme d’ambition en tout cas, le désir d’échapper à la misère et de réaliser ses rêves.

Mais « Le corps d’une jeune fille est le lieu le plus dangereux du monde, car c’est là que la violence risque le plus de s’exercer. », Rose aura-t-elle suffisamment de chance pour y échapper ?

Ce conte est aussi un manifeste féministe :

« C’est parce qu’on est des filles. On est censées avoir seulement des émotions. On n’est même pas censées avoir des pensées. Et c’est très bien d’éprouver de la tristesse, du bonheur, de la colère et de l’amour – mais ce ne sont que des humeurs. Les émotions ne peuvent rien accomplir. Une émotion, ce n’est qu’une réaction. On ne veut pas simplement avoir des réactions, dans cette existence. Il faut accomplir aussi des actions. »

Il analyse finement la condition des femmes en ce début de siècle, et les multiples entraves dont Rose doit se libérer :

« On lui avait appris que les femmes devaient se montrer impassibles et qu’il était inconvenant pour elles d’exprimer leurs émotions en public. Avoir ouvertement des émotions, c’était comme être une prostituée debout à la fenêtre, la poitrine exposée à tous les vents. Mais elle s’en fichait. »

Elle a le pouvoir de croire en ses propres capacités. Elle prend conscience de son pouvoir et du pouvoir des autres femmes :

« Tout ce qui avait été écrit par une femme avait été écrit par toutes les femmes parce que toutes en bénéficiaient. Si une femme était un génie, c’était la preuve que c’était possible pour toutes les autres. »

Mais tout ne se paye-t-il pas, surtout quand on est une femme ?

Il est aussi un récit sur le pouvoir de l’art, du théâtre et du cirque face à un monde désenchanté.

Il faut lire ce roman échevelé, fantaisiste et parfois absurde, pour le savoir.

Heather O’Neill est née et vit à Montréal. Après La Ballade de Baby, finaliste du Orange Prize for Fiction, The Girl Who Was Saturday Night et le recueil de nouvelles Daydreams of Angels, à paraître aux éditions du Seuil, Les Enfants de cœur est son troisième roman.

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Festival America 2018 : Anaïs Barbeau-Lavalette, La femme qui fuit

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Anaïs Barbeau-Lavalette – La femme qui fuit – Le livre de poche, éditions Marchand de feuilles, 2015

Ce livre a eu un prodigieux succès à sa sortie, et a obtenu de nombreuses récompenses : Prix des libraires du Québec 2016, Prix France-Québec et grand Prix du livre de Montréal.

Les raisons en sont certainement la grande qualité de l’écriture, l’originalité du récit, louvoyant entre la réalité et la fiction, dans la quête de cette grand-mère que l’auteure a très peu connue, et qui a terriblement blessé sa mère en l’abandonnant à l’âge de trois ans et en refusant de la voir plus tard. Mère attendue, espérée et toujours absente. Forcément de récit nous touche, car il fait écho à la peur de l’abandon, profondément enracinée en nous, et la crainte de ne pas être aimé-e-s ou pas assez.

Peut-être a-t-on conscience également, en lisant ce récit, qu’être une femme libre dans la première moitié du XXe siècle était une véritable gageure quand on était une femme. Une femme pouvait être une muse, mais être artiste à part entière, reconnue à l’égale des hommes, il ne fallait pas y compter, c’était plutôt l’exception qui confirmait la règle. Suzanne Méloche était une artiste et l’une des rares femmes, peintre et poétesse, représentante du mouvement automatiste au sein du surréalisme.

Le destin de la plupart des femmes était de procréer et d’être femme au foyer, d’autant plus qu’au Québec, l’Eglise avait une influence extrêmement importante et que ses diktats, ses recommandations, avaient valeur de loi. Une forme de rigorisme moral et de censure, rendaient difficile l’expression artistique et l’évolution des mœurs. Les femmes et les artistes en furent également victimes et les femmes artistes, doublement.

J’ai aimé ces très courts textes-chapitres, comme des instantanés, où des moments de la vie de cette grand-mère inconnue, sont esquissés sur le vif, grâce à l’imagination qui pallie les blancs d’une histoire incomplète.

Un très beau livre, où l’émotion est un fil continu.

Vous pourrez rencontrer l’auteur au Salon du livre de Vincennes le samedi de 15h30 à 16h30,  et le dimanche de 11 h à 12h à et de 17H à 18H.

america chez Plaisirs à cultiver

Le Canada invité au Festival America du 20 au 23 septembre 2018

Parmi les auteurs invités, vingt-huit sont canadiens, et sur ces vingt-huit, dix seront des femmes. C’est le hasard, je pense qu’il n’y a pas lieu de faire ici du mauvais esprit. Tout de même, ce n’est pas loin de la moitié ! Aie, c’est vraiment tout près du tiers… Enfin, si on se met à compter, on n’est pas sorti de l’auberge, comme disait ma grand-mère !

Je suis sûre qu’il y a une explication toute simple :

  • Elles ne peuvent pas faire garder les enfants.
  • Elles ont déjà pris toutes leurs vacances.
  • Elles se sont fait voler leurs papiers d’identité, et comme tout le monde le sait, ça prend un temps fou pour les faire refaire.
  • Au Canada, les femmes écrivent moins que les hommes, elles ont mieux à faire (shopping ?manucure ?).
  • Elles écriraient moins bien ?

Je blague bien sûr, et quand on aime, on ne compte pas.  Des progrès sont nets en France, si on consulte l’Observatoire des inégalités 2018,  la Part des femmes parmi les lauréat·e·s de quelques prix littéraires emblématiques, 1900-2017, est de 41%. La Part des femmes dans les jurys de quelques prix littéraires emblématiques, 2012-2017, est de 38% pour la composition de ceux-ci et 18% sont présidentes desdits jurys.

« Dans la majorité des domaines, les femmes sont exclues de la consécration artistique. []Malgré le nombre significatif de femmes dramaturges ou mettant en scène des pièces de théâtre, la part de femmes sélectionnées ou primées est très faible, sans présenter d’amélioration réelle depuis les années 1990.

Le livre est l’un des rares secteurs dans lequel les femmes reçoivent des prix (tableau 55), en dépit de jurys majoritairement masculins (tableau 54). » Observatoire des inégalités 2018

Mais qu’en est-il du Canada ?

Difficile de trouver des informations pour le Canada dans son intégralité, des études distinctes ont été réalisées pour le canada francophone et anglophone, mais elles commencent à dater. A la lecture des grands titres rencontrés sur le web, il semble que la situation soit assez similaire à celle que les femmes vivent dans le reste du monde occidental, mais je n’ai pas plus de précision. Si des canadiens passent par-là, peut-être pourront-ils nous éclairer ?

Qu’à cela ne tienne, nous essaierons de compenser cela en leur donnant un peu plus de visibilité. Il est très important que les français fassent véritablement leur connaissance.

Qui sont-elles ?

Margaret Atwood –  Anaïs Barbeau-LavaletteNaomi FontaineCatherine-Eve GroleauEmma HooperNancy LeeJulie MazzieriAndrée A Michaud Heither O’NeillLise Tremblay

Qui sont-ils ?

Christophe BernardDavid Chariandy – deWitt Patrick – Dickner Nicolas – El Akkad Omar – Goudreault David – Grenier Daniel – Guay-Poliquin Christian –  Hardcastle Kevin – Larue Stéphane –  McCabe Alexandre – Morissette Guillaume – Plamondon Éric – Reid Iain – Vigna John – Villeneuve Mathieu Wilson D.W. – Winter Michael

Nous lirons aussi un écrivain américain : Gabriel Tallent avec My absolute darling

Au pays de Donald, « La servante écarlate » relève la tête !

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Margaret Atwood – La servante écarlate (The Handmaid’s tale), Pavillons poche Robert Laffont, 2017, traduit de l’anglais (Canada) par Sylviane Rué

Il est particulièrement intéressant de lire ou de relire aujourd’hui « La servante écarlate » de Margaret Atwood, à la lumière de l’histoire récente des Etats-Unis, et des manifestations qui ont eu lieu pour protester contre les restrictions au droit à l’avortement, suivant la politique menée par Donald Trump, dans certains Etats américains ( Voir les photos ici)

Et l’auteure de rappeler la fondation profonde des Etats-Unis sur « la brutale théocratie de la Nouvelle Angleterre puritaine du XVIIe siècle, avec ses préjugés contre les femmes » et sa résurgence dans une certaine frange chrétienne extrémiste du Parti Républicain.

Pour ceux qui n’auraient pas encore lu l’histoire ou vu la série (saison 1 dirigée par Reed Morano sur un scénario de Bruce Miller, avec Elisabeth Moss dans le rôle principal, tournée entre septembre 2016 et février 2017 ), « La servante écarlate » est une dystopie situant le nouveau régime de la république de Gilhead, fondée par des fanatiques religieux, aux Etats-Unis. A la suite d’une chute de la fécondité due à la pollution et aux maladies sexuellement transmissibles, les quelques femmes encore fertiles sont réduites au rang d’esclaves sexuelles auprès des notables du régime. Defred, « servante écarlate » parmi d’autres n’a plus le droit ni de lire, ni de travailler, et ne possède plus rien.

Ce qui fait la force du régime, c’est son organisation : les femmes y sont surveillées et contraintes par des femmes, parmi elles certaines sont croyantes et persuadées du bien-fondé d’un tel régime.

Ce n’est pas sans rappeler le débat qui fait rage aux Etats-Unis et ailleurs entre les féministes essentialistes (considérées par beaucoup comme des antiféministes) et les autres, l’expérience de la maternité étant pour les premières la source essentielle du pouvoir féminin et ce qui les définit (l’éthique du care) ; dans cette optique, la contraception et l’avortement feraient obstacle au cycle naturel du corps féminin (et donc à son destin).   D’ailleurs, Defred le dit ainsi en s’adressant intérieurement à sa mère : « Tu voulais une culture de femmes. Et bien, la voici. »

Mais Margaret Atwood, ne fait pas de son héroïne, une simple héroïne féministe, cela va bien au-delà, en ce sens que la structure pyramidale du pouvoir, concentre hommes et femmes dans les strates supérieures – même si les hommes ont une réelle suprématie – de la même manière qu’en ces couches inférieures, existent des hommes et des femmes pareillement dépossédés d’une partie importante de leur liberté.

Elle rappelle en cela que toutes les femmes ne sont pas féministes, et que cela a été le principal obstacle à l’émancipation des femmes. Certaines se satisfont d’un rôle subalterne en échange du confort et de la sécurité. Bref, cela est un autre débat, forcément très politique et …polémique.

Vous comprendrez pourquoi « La servante écarlate » s’est vendu et continue à se vendre, à des millions d’exemplaires dans le monde entier, devenant une « sorte de référence pour ceux qui écrivent à propos d’évolutions politiques visant à prendre le contrôle des femmes, particulièrement celui de leur corps et de leurs fonctions reproductrices » (page 513).

Margaret Atwood est pressentie depuis plusieurs années pour le Prix Nobel de Littérature, elle est une des auteures majeures de la littérature de notre temps.

La tresse, Laetitia Colombani / Trois femmes, trois destins et un vrai succès éditorial

La tresse - Laetitia Colombani - edition grasset - Lire sous Le ...

Laetitia Colombani – La tresse  Grasset § Fasquelle 2017

Voilà un livre qui a fait beaucoup parler de lui, gros succès éditorial, boudé par certains critiques, célébré comme le possible best-seller de l’été. A la Foire du Livre de Londres, seize pays ont déjà acheté les droits de traduction. A quoi est dû ce formidable succès ?

Peut-être en tout premier lieu, la force de l’intrigue, très habilement nouée et dénouée par son auteure, à l’image de cette tresse que l’on fait et défait qui tient le lecteur en haleine.

Ensuite, l’écho à cette mondialisation dans laquelle nous vivons pour le meilleur et pour le pire. Ces trois femmes vivent en Inde, au Canada et en Italie et sont reliées entre elles par un fil, ou plutôt une histoire de cheveux. La plus humble et la plus déshéritée est Intouchable et s’appelle Smita. Elle vit en Inde et est chargée de nettoyer le village des excréments de ses concitoyens. Elle rêve d’un autre avenir pour sa fille et voudrait l’envoyer à l’école. Ce tableau de l’Inde et de la violence qui est faite aux femmes ne peut que toucher le lecteur occidental et le révolter.

Sarah, canadienne, est la femme cadre, à qui tout réussit mais qui sacrifie sa vie personnelle et sa famille au travail. La maladie la forcera à réinventer sa vie.

Quant à la troisième, Giulia, elle travaille aux côtés de son père dans un atelier de confection de perruques en Sicile. Face à la pénurie de cheveux qui ne permet plus de produire les postiches et autres mèches, elle devra trouver une alternative au cheveu sicilien.

Pour finir, la force de ce livre tient à cette idée d’une solidarité universelle. Ce qui passe dans un endroit de la terre a des répercussions dans un autre. Nous sommes tous liés et l’indifférence n’est plus possible car aujourd’hui nous savons grâce à la vitesse de l’information et aux réseaux de l’internet. Nous ne pouvons ignorer la détresse de cette femme indienne, d’autant plus que notre modèle occidental attaché de plus en plus aux droits des femmes, nous a sensibilisé à ces problèmes.

On peut y voir aussi un féminisme planétaire, centré sur l’égalité des droits. Certains pourraient lui reprocher une forme d’ethnocentrisme laïque et occidental qui méconnaîtrait les particularismes locaux.

Peut-être une certaine idée du bonheur, de l’égalité des sexes et de l’amour sont la trame de ce livre, mais qui s’en plaindrait ?

Un très bon roman pour l’été.

Dianne Warren – Cool water / Un désert au Canada

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Dianne Warren – Cool water Presses de la cité, 2012 pour la traduction française (Dianne Warren 2010)

Traduit de l’anglais (Canada) par France Camus-Pichon

 

Ce livre est d’abord un véritable voyage. Voyage dans la province de la Saskatchewan, à travers les dunes et les prairies des Little Snake Hills où se déroule l’action du livre, dans ou aux alentours de la petite ville de Juliet, au centre-ouest du Canada, au nord du Montana.

Des cow-boys parcourent les dunes, un banquier, Norval Birch endure les affres de la mauvaise conscience, Lynn Trass, dévorée par la jalousie tient « L’oasis café » où se côtoient les habitants des alentours et prépare de délicieuses tartes au citron, Vicki Dolson, mère de six enfants tente de surmonter le désastre de la faillite de leur ferme, Lee a hérité de la ferme de ses parents adoptifs et d’un cheval arabe débarqué là par hasard. Quant à Willard, amoureux sans le savoir de sa belle-sœur Marian, veuve de son frère, il tient le dernier drive-in de la région et projette des films sur écran géant.

Des fermes en ruines témoignent d’un monde qui se meurt. Celui des anciens colons, sans terres, qui étaient venus s’installer là.

Ils sont des citoyens ordinaires de cette zone rurale canadienne qui dément tous les clichés sur cet immense pays. Non, il n’y a pas seulement des forêts et des lacs, il y a aussi une chamelle échappée dans les dunes, et mille battements de cœur, sous un soleil de plomb.

Le soir, d’énormes moustiques vous assaillent.

Le paysage est véritablement le personnage principal de ce livre. Dianne Warren explique qu’elle a eu du mal à lui donner des frontières. C’est pourquoi le récit commence par une course de chevaux dont le parcours est un cercle. Lee est celui qui entretient des relations profondes et poétiques avec le paysage et dont la solitude est la plus profonde.

Les personnages sont liés les uns aux autres, par la géographie ou les sentiments. Par la narration qui les fait se croiser et s’entrecroiser. Qui fait d’eux des hommes et des femmes qui nous ressemblent, sujets aux mêmes tourments, acculés aux mêmes impasses, d’une profondeur insoupçonnée d’eux-mêmes dans un temps cyclique.

L’auteure croise aussi le fil avec nous, car elle nous enserre si bien dans le récit qu’il n’est pas facile de s’échapper.

Fugitives d’Alice Munro – Prix Nobel de littérature

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Fugitives  de Alice Munro            Nouvelles           Editions de l’olivier 2008

Runaway 2004 traduit de l’anglais (Canada) par Jacqueline Huet et Jean-Pierre Carasso

Toutes les femmes de ce récit se retrouvent confrontées à une image d’elles-mêmes avec laquelle elles sont profondément en conflit.

Face à une société qui ne leur laisse pas le choix, face à des compagnons qui reproduisent les modèles hérités de leur père et se remettent peu en question, elles choisissent la fuite.

Parce qu’il y a peu de place pour leurs aspirations et leurs désirs, elles préfèrent escamoter les problèmes afin de pouvoir survivre. Même si au fond, elles ne font que déplacer la cause de leur souffrance.

Ce recueil contient des nouvelles qui ont pour cadre les années 60. Les femmes commencent à prendre une nouvelle place dans la société, mais les traditions sont encore très vivaces, ainsi dans une des nouvelles, dit-on d’une étudiante brillante qu’il est dommage qu’elle soit une fille, car si elle se marie, tout son labeur et celui de ses professeurs seront réduits à néant, et dans le cas contraire, si elle ne se marie pas, elle deviendra probablement triste et solitaire, perdant ses chances d’avancement au profit des hommes.

Assumer ses choix de vie est aussi plus facile pour un homme : « Les choix bizarres étaient tout simplement plus faciles pour les hommes dont la plupart trouveraient des femmes heureuses de les épouser,  tel n’était pas le cas en sens inverse. »

Alice Munro parle aussi avec beaucoup de justesse de cette rage qu’éprouve cette héroïne face à l’opinion commune qui veut que les femmes soient « belles, adorables, gâtées, égoïstes, avec un pois chiche à la place du cerveau. » C’est ainsi qu’une fille doit être pour qu’un homme en soit amoureux. Ensuite, elle céderait son égoïsme pour l’affection inconditionnelle qu’une mère doit à ses enfants.

Bien sûr les représentations sur le rôle des femmes et leur prétendue « nature » a beaucoup évolué en Occident et au Canada certainement.

Alice Munro évoque avec beaucoup de finesse  également, les occasions perdues, les dialogues impossibles, et la façon dont les émotions, les sentiments peuvent produire des changements dans l’air, dans la luminosité, dans le contour des objets, dans le monde autour de soi.

J’ai beaucoup aimé ce recueil de nouvelles à la mélancolie souvent poignante. Les femmes y sont incapables d’aller au bout de leurs désirs, de leur révolte, parce que cela leur demande beaucoup trop d’énergie ou parce qu’elles ne peuvent supporter la rupture avec leur milieu social et la solitude que cela implique.

Alice Munro est née au Canada en 1931. Lauréate de nombreux prix littéraires, admirée par Joyce Carol Oates et de nombreux autres écrivains, elle est considérée comme l’un des plus grands écrivains anglo-saxons  de notre époque.

Article publié le 15 août 2011 sur Litterama.fr, mon ancien blog

Les derniers jours de Smokey Nelson – Catherine Mavrikakis

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Les derniers jours de Smokey Nelson – Catherine Mavrikakis – Sabine Wespieser éditeur 2012

Smokey Nelson attend dans les couloirs de la mort. Il a été condamné à la peine capitale et attend depuis 19 ans l’exécution de la sentence. Il a tué sauvagement un couple et leurs deux  enfants dans un motel des environs d’Atlanta.

Trois témoins directs ou indirects évoquent le criminel et la façon dont il a bouleversé leur vie.

Sydney Blanchard ouvre ce roman choral par un monologue qu’il adresse plus ou moins à sa chienne alors qu’il roule vers la Louisiane. Il n’est pas vraiment  sympathique d’ailleurs, vaguement raciste, sans réelle ambition, fan de Jimi Hendrix  dont il joue les standards, un peu lâche aussi.  Il a été arrêté par erreur et a passé quelque temps en prison à la place du coupable.

Il a été innocenté par Pearl Watanabe (seconde voix du roman) qui travaillait dans le motel cette nuit-là. Elle a parlé au meurtrier et même fumé une cigarette avec lui, avant de découvrir les cadavres mutilés de ses victimes. Il aurait pu la supprimer car elle était le seul témoin. Or, il lui a laissé la vie sauve. Pearl, sous le poids de la culpabilité qui la ronge, vit dans un long cauchemar.

Sam qui a été assassinée est la fille de Ray Ryan. Ray Ryan entend la voix de Dieu qui lui parle et lui permet de supporter la douleur de la perte. Il n’ a pas de conscience propre, tout lui est dicté par cette voix qui perd tout caractère sacré et devient presque triviale. Cette voix crie vengeance et Ray Ryan ne pourra prendre de repos tant que le meurtrier ne sera pas exécuté.

Mais la mort de Smokey Nelson fonctionne comme un couperet qui annihilera toute possibilité de rédemption pour le meurtrier et ceux qui ont croisé sa route. Face à l’absurde, ce que chacun avait mis en place pour vivre une vie normale, finit par s’écrouler.

 

Catherine Mavrikakis dit qu’elle aime bien que le lecteur soit bousculé et dans ce livre, pas de doute, on ne reste sur aucune certitude acquise. Il n’y a pas de portrait psychologique du meurtrier, rien ne le prédestinait à ces meurtres sauvages et on ne saura jamais ce qui a déclenché la tuerie. Pas d’antécédents judiciaires, une enfance et une adolescence relativement préservées, rien n’explique son geste. Peut-on devenir meurtrier par accident ? Peut-on être entraîné soi-même dans une violence qui nous dépasse ? Question angoissante s’il en est.

Bien sûr, il ne s’agit pas d’une lecture de distraction mais d’une aventure que Catherine Mavrikakis nous invite à partager, un voyage parfois difficile, un jeu de piste mortel mais dont on ressort grandi, plus intelligent peut-être , moins impatient face aux choses difficiles de l’existence. La littérature devient alors le lieu d’une possible conversion. Et l’œuvre devient éternelle.

Catherine Mavrikakis est canadienne de langue française et c’est mon premier livre dans le cadre du challenge de Denis  sur la francophonie.

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